L’ASMR ou la relaxation par les bruits de bouche et d'objets

Chuchotements, mastications, taping… Depuis plusieurs années, l’ASMR ou technique de relaxation se basant sur des stimuli sensoriels, fait de plus en plus d’adeptes. Mais comment ces sons peuvent nous procurer du bien-être ? Misophones s’abstenir !

Par Tiffany Sales. Photo : Pixabay. |

Si certains regardent des films ou vont à la salle de sport pour se détendre, d’autres allument leur ordinateur et se laissent hypnotiser par des vidéos où des personnes se filment en train de chuchoter et produire des sons du quotidien tels que des bruits de papier froissé, de mastication, de taping ou encore de crépitement. Ces personnes sont des adeptes de l’ASMR (de l'anglais Autonomous Sensory Meridian Response soit « réponse automatique des méridiens sensoriels ») : une technique de relaxation qui se base sur des stimuli sensoriels particulièrement répandus pour apporter plaisir et détente. Bien sûr, tout dépend de la sensibilité de chacun, les sons qui fonctionnent pour certains seront inefficaces pour d’autres.

Si tout le monde n’y est pas sensible, ceux qui l’expérimentent parlent d’un frisson le long de l’échine, de chatouillements à l’arrière du crâne et d’une sensation de bien-être intense. Certains qualifient même les sensations ressenties « d'orgasmes cérébraux ».

A quoi ressemblent ces vidéos ? Généralement, l’auteur des vidéos se filme face caméra en train de chuchoter, de manger ou encore de produire une série de mouvements et de tapotements sur divers objets. Ces stimuli sensoriels sont ensuite captés par des micros ultrasensibles pour enregistrer le son en trois dimensions.

Une méthode réellement efficace ?

A l’heure actuelle, seules deux études scientifiques ont étudié l’ASMR. La première, réalisée en 2015 par Emma L. Barratt et Nick J. Davis de l’Université de Swansea, deux psychologues de l’université de Swansea au Royaume-Uni, s’appuie sur un panel de 475 personnes. Parmi les volontaires, 98% avouent utiliser l’ASMR pour se relaxer, 13% pour soulager des douleurs chroniques et 69% pour soulager leurs symptômes de dépression. Seules 5% des personnes interrogées utiliseraient ces vidéos pour assouvir des désirs sexuels.

En outre, 8 répondants sur 10 utilisent les vidéos pour trouver le sommeil et regardent les vidéos avant de se coucher. 7 sur 10 estiment que la méthode les aide à gérer leur stress au quotidien. Toujours selon cette même étude, l’ASMR améliorerait l’humeur, jusqu’à 3 heures après la sensation et permettrait de réduire les symptômes de la dépression.

Une autre étude publiée l’année suivante à l’Université de Winnipeg, au Canada, avance que les personnes réceptives à l’ASMR détiennent certaines caractéristiques communes. Les zones cérébrales liées à l’imaginaire, aux souvenirs et au plaisir auraient en effet une activité beaucoup plus intense que chez les personnes non réceptives.

La vidéo de cette Youtubeuse comptabilise plus de 8 millions de vues.

Enfin, malgré le peu de littérature scientifique à ce sujet, il est possible d’expliquer les fondements neurologiques de ce phénomène. « Dans le cerveau, il y a plus de neurones pour le son que pour tous les autres sens réunis (… ) L’oreille est un récepteur au tact qui s’est surspécialisé; après tout, elle réagit à la pression exercée par les sons. Donc les ASMR caressent littéralement notre cerveau », explique Pierre Lemarquis, l’un des auteurs de l’étude datant de 2015.

Regarder des vidéos ASMR permettrait selon ces derniers de conduire à une sécrétion de sérotonine, un neurotransmetteur impliqué dans la régulation de notre horloge interne et qui joue un rôle sur l’humeur. « Même si nous n'avons pas assez de recul pour prouver scientifiquement les bienfaits des sons qui sollicitent l'ASMR, on peut tout de même observer plusieurs choses. L'oreille reçoit une vibration qui est transformée en signal chimique. Cela libère des substances qui font du bien au cerveau, comme la morphine endogène (antalgique naturel) et la sérotonine (présente dans les antidépresseurs), qui favorisent l'apaisement ». Les sons peuvent alors amener les adeptes à ressentir des picotements sur le corps, des frissons et des chatouillements ou encore une sensation de chaleur mais « cela demande d'être sensible à la suggestion, tout comme l’hypnose ne fonctionne pas sur tout les individus », conclut le neurologue.

A tester donc excepté pour les misophones pour qui l'ASMR risque de produire l'effet inverse de celui escompté...