Les grandes heures d'IWC

Devenue l’une des signatures les plus cotées du monde horloger, la marque IWC Schaffhausen fête cette année ses 150 ans d’existence. À cette occasion, elle présente une collection anniversaire spéciale, comprenant au total 27 pièces en édition limitée et qui sont inspirées de montres icônes qui ont marqué l’histoire de la Maison.

Point esthétique commun de ces garde-temps : ils arborent des cadrans imprimés en blanc ou en bleu, avec un effet brillance obtenu grâce à un laquage en plusieurs couches, rappelant les fameuses finitions émaillées.

Cet hommage au passé de la grande maison de Schaffhausen est aussi pour nous l’occasion de revenir sur quelques-unes des personnalités qui ont contribué à écrire l’histoire d’IWC, et des modèles historiques qui ont marqué le parcours de la marque.

Naissance américaine

En 1868, l’horloger Fiorentine Ariosto Jones, alors âgé de 27 ans, quitte Boston pour la Suisse et fonde à Schaffhausen l’International Watch Company. Auparavant, il a découvert au sein de la E. Howard Watch & Clock Company les méthodes de fabrication modernes de l’industrie horlogère américaine. Il souhaite désormais associer cette approche à l’habilité manuelle des horlogers suisses afin de produire pour le marché américain des mouvements de montres de poche de grande qualité.

Il bâtit en un temps record une infrastructure de production destinée à produire plus de 10.000 mouvements par an, et ce, à une époque où la plupart des montres étaient encore réalisées par des horlogers travaillant chez eux. Jones était incontestablement un visionnaire, mais se voyait confronté à des défis tels que la croissance rapide de la production ainsi que la hausse des salaires et des droits de douane. En décembre 1875, alors qu’il ne peut plus satisfaire les attentes de ses actionnaires, Jones se voit contraint de retourner au Etats-Unis. En 1880, l’industriel schaffhousois  Johannes Rauschenbach-Vogel reprend la manufacture. Le pionnier F.A. Jones ne reviendra plus jamais à l’horlogerie et meurt le 18 octobre 1916, près de Boston.

Le temps des icônes

À la mort de son prédécesseur Johannes Rauschenbach-Schenk en 1905, Ernst Jakob Homberger reprend les rênes d’IWC. Homberger est entré dans la famille en épousant la plus jeune fille de Rauschenbach. Son beau-frère, le célèbre psychiatre Carl Gustav Jung, est alors encore actif dans l’entreprise. En 1929, Homberger rachète les parts de Jung et devient l’unique propriétaire de la manufacture. Grâce à ce patron strict appliquant les méthodes de la vieille école, IWC traverse avec succès la dure crise économique des années 1930.

Inspiré par ses deux fils passionnés d’aviation, Homberger lance en 1936 la montre spéciale pour Aviateur, tradition encore vivante aujourd’hui à Schaffhausen. C’est également sous sa direction qu’est lancée la fabrication de la première Portugieser, en 1939. En 1944, il engage Albert Pellaton au poste de directeur technique d’IWC, un expert en questions techniques et en processus de production.

La première « Ingenieur » est présentée en 1955. Une enveloppe en fer doux protège efficacement son mouvement des champs magnétiques et le remontage automatique Pellaton, particulièrement efficace, utilise pour la première fois les deux sens de rotation du rotor pour remonter le ressort-moteur. Ernst Jakob Homberger disparait la même année. Son fils Hans Ernst reprend la direction d’IWC, dont il sera le dernier propriétaire privé.

Un Homme d’exceptions

Dans les années 70, l’arrivée sur le marché des montres à quartz japonaises bon marché plonge de larges pans de l’industrie horlogère suisse dans une profonde crise. En 1978, IWC est reprise par l’entreprise allemande VDO Adolf Schindling AG. En recrutant Günter Blümlein, les nouveaux propriétaires se sont adjoint les services d’un ingénieur qui mise résolument sur l’héritage et la tradition de la manufacture et sonne chez IWC la renaissance de la mécanique haut de gamme.

Pendant cette période, Kurt Klaus met au point le célèbre Calendrier erpétuel, utilisé pour la première fois en 1985 dans la famille des Da Vinci. En 1990, IWC propose la Grande Complication qui comprend notamment la légendaire répétition minutes de Dominique Renaud et Giulio Papi.  En 1993, la « Il Destriero Scafusia » est éditée à l’occasion du 125e anniversaire d’IWC : elle est la montre la plus compliquée jamais construite à Schaffhausen.

En 1980, l’IWC Porsche Design Chronographe Titane est la première montre-bracelet au monde dotée d’un boitier en titane. Elle est suivie, en 1986, par la Da Vinci Calendrier Perpétuel, la première montre pourvue d’un boîtier en céramique d’oxyde de zirconium noire. En février 2000, IWC, Jaeger-LeCoultre et A. Lange & Söhne sont repris par Richemont. Günter Blümein meurt brutalement en 2001, à seulement 58 ans, emporté rapidement par une maladie grave.

En l’an 2000 Georges Kern rejoint Richemont. À seulement 36 ans, il prend la direction d’IWC et devient ainsi le plus jeune CEO du groupe. Au cours des années suivantes, il transforme IWC, qui n’était alors qu’une manufacture de niche surtout connue en Europe, en une marque de luxe internationale. Georges Kern resserre le portefeuille de produits et adopte un positionnement plus clair grâce aux six familles de montres que sont les montres d’Aviateur, les Portugieser, les Portofino, les Ingenieur, les Aquatimer et les Da Vinci. Il sera l’architecte de la transformation d’IWC d’un fabricant de montres en une marque de luxe moderne.

Les fameuses portugaises

En 1939, deux marchands portugais commandent auprès d’IWC une série de grandes montres de poche devant être aussi précises que des chronomètres de marine. Les capitaines et les officiers de la marine marchande portugaise souhaitent porter au poignet une « une très grande montre ». Les horlogers de Schaffhausen logent alors le mouvement de montre de poche pour homme calibre 74 dans un boîtier de montre-bracelet.

Le mouvement de montre savonnette est parfaitement adapté à cet usage, car la petite seconde forme un angle de 90° avec la couronne. La première Portugieser, référence IW235, est dotée d’un boîtier de 41,5 millimètres de diamètre, dépassant ainsi de loin les dimensions habituelles des montres-bracelets de l’époque. La minuterie chemin de fer bordant le cadran, les chiffres arabes et les aiguilles feuilles élancées reflètent l’élégance intemporelle des Portugieser d’IWC.

Plongeuses légendaires 

Dans les années 1960, la plongée sous-marine se démocratise de plus en plus. En 1967, lors du salon de l’horlogerie de Bâle, l’IWC présente donc sa première montre plongée : l’Aquatimer, référence IW812 AD. Entraînée par le légendaire calibre automatique 8541, cette montre est étanche jusqu’à une profondeur de 200 mètres. Une lunette tournante placée sous le verre, actionnée au moyen d’une seconde couronne, permet de régler le temps de plongée.

Elle remplace la lunette externe classique. L’avantage de ce système réside surtout dans le fait que la lunette interne ne nuit pas à l’étanchéité de la montre. Son cadran noir ainsi que ses aiguilles et ses grands chiffres luminescents garantissent une lisibilité optimale, même à grande profondeur et dans de mauvaises conditions de visibilité.

Les montres sans aiguilles

L’été 1884, IWC sonne le début de l’ère digitale : les premières montres de poche avec chiffres sauteurs quittent la manufacture. Basées sur le système Pallweber, horloger établi à Salzbourg, elles affichent les heures et les minutes à l’aide de grands chiffres imprimés sur des disques rotatifs. Cependant, la réserve de marche des montres de poche Pallweber est relativement faible, car elles utilisent des roues dentées ajourées , un processus très énergivore. 

Bien qu’IWC ait réussi à améliorer significativement leur conception, les montres de poche Pallweber, dont 20.000 exemplaires sortiront de la manufacture de Schaffhausen, ne connaissent qu’un succès éphémère. La production est interrompue dès 1890. Ce n’est qu’un siècle plus tard, avec les montres à quartz, que l’affichage digital de l’heure revient sur le devant de la scène.

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