Les photographies "nature" de Michel d'Oultremont

Amoureux de la faune et de la flore, le jeune Michel d'Oultremont parcourt la planète à la recherche d'animaux à photographier. Une passion qui l'a déjà rendu célèbre et qu'il commente à travers ses clichés coups de coeur, petits conseils de pro à la clé.

PAR OLIVIA ROKS. PHOTOS MICHEL D’OULTREMONT. |

Tout a commencé à ses 12 ans. Avec un ami et une longue-vue, Michel d’Oultremont aime observer les oiseaux. De fil en aiguille, il s’intéresse de plus en plus à la nature… À 15 ans, il découvre la photographie, en amateur d’abord, puis après des études dans le domaine. Sa spécialité :
la photo “nature”, bien sûr. En 2014, à seulement 22 ans, c’est la consécration, Michel remporte les deux prix les plus prestigieux du secteur : le Fritz Polking Award en Allemagne et le Wildlife Photographer Of The Year organisé par la BBC et le musée des Sciences Naturelles de Londres.

Aujourd’hui, ce jeune homme talentueux a la chance de pouvoir vivre de sa passion, dont il assume l’exigence. Ses photographies sont toujours réalisées sans trucages ni retouches ni filtres ni lumières additionnelles, et ne représentent que des animaux libres et sauvages.

Ses prochains voyages ? Le parc de Yellowstone et les Abruzzes en Italie. Son rêve ? Voir l’ours blanc, déjà rien qu’avec des jumelles, cela serait génial. Ou encore le tigre de Sibérie, qui n’a jamais réellement été bien photographié…

Ours brun, Croatie

“J’étais avec un ami dans un parc naturel situé au sud de la Croatie. Nous nous sommes donnés 14 jours pour photographier l’ours brun. L’aide des gardes-forestiers nous a été précieuse, c’est eux qui nous ont indiqué les clairières où ils en repéraient régulièrement. Avoir une bonne connaissance de l’animal que l’on souhaite photographier est primordial : étudier son mode de vie, ses comportements, apprendre à déceler ses traces et ses empreintes… J’ai ensuite “affûté“, c’est-à-dire réalisé une petite cage avec un effet camouflage où j’ai attendu sans bouger. Pour photographier des mammifères, il faut veiller au sens du vent car s’ils sentent notre odeur, souvent, ils fuient.

Parfois je peux attendre cinq, six, sept heures sans rien voir à l’horizon. J’utilise un très gros téléobjectif. Pas spécialement pour zoomer mais pour apporter beaucoup de luminosité, ce qui me permet de réaliser des photos tôt le matin ou tard la journée. Ici, l’ours est arrivé exactement où je l’espérais, à une vingtaine de mètres. Il a commencé à manger. Entre lui et moi, aucune barrière… Ensuite il m’aperçoit et me fixe : pendant une dizaine de secondes, nous sommes comme en contact. C’est là que je le photographie. Puis il a recommencé à manger et est reparti tranquillement au bout de vingt minutes. Une rencontre inoubliable.”

Fou de Bassan, Écosse

“Je suis pour quatre jours sur la côte Est écossaise, où les falaises sont nombreuses mais la météo pas toujours clémente. Pour cette photographie, je me trouve au sommet de l’une d’entre elles, 100 mètres au-dessus de l’eau, en pleine tempête, le bout de mes pieds dans le vide, avec un vent à plus de 60 km/h dans le dos. On peut se demander ce que représente le fond, très graphique, de ce cliché : il s’agit de la houle des vagues frappant la falaise. L’oiseau survolant avec courage cette mer agitée, c’est un fou de Bassan, le plus grand oiseau marin d’Europe. On ne le remarque peut-être pas mais il fait près de deux mètres d’envergure. Il nichait dans la falaise et peinait à regagner son foyer.”

Cerf, Ardennes belges

“Ici, on est à la fin de la période du brame. J’avais repéré une jolie clairière, avec de belles herbes et m’y suis installé à l’affût tôt le matin, une heure avant le lever du soleil, avant que les animaux arrivent. Le paysage, entièrement gelé, était splendide, une ambiance vraiment féérique. Mais je n’étais pas bien équipé, et je commençais à me refroidir, et donc à somnoler. Je me suis réveillé juste au moment où le cerf est arrivé. Je l’ai vu traîner, se coucher, puis approcher très exactement dans ma direction. Sa tête était dissimulée par les hautes herbes mais ses bois bien visibles. Il s’est arrêté à cinq mètres de moi. J’étais bien camouflé, il ne m’a pas vu. Il a poursuivi sa route sans inquiétude… C’était vraiment un matin magique comme on les aime en automne.”

Chevreuil, Hollande

“Pour cette photo, j’avais créé un affût flottant sur lequel était posé mon appareil photo. Moi je marchais dans l’eau, recouvert d’une bâche de camouflage. Ce procédé permet d’approcher les oiseaux de très près, parce qu’ils croient qu’il s’agit d’un déchet qui flotte. Je me rends dans ces marais entourés de grandes forêts remplies de chevreuils depuis six ans. C’est un domaine privé mais ses propriétaires m’autorisent à y accéder. Ce matin-là, deux heures avant le lever du soleil, j’attends l’arrivée des oiseaux…Rien. Soudain, j’aperçois un chevreuil prêt à traverser le marais avec, derrière, le soleil qui se lève et fait naître une superbe brume orangée sur la photo, à cause du contre-jour. En six ans, je n’avais jamais réussi une photo comme celle-ci ! Il faut vraiment fouler le terrain tous les jours pour avoir la chance de vivre ces instants aussi improbables que formidables…”  

Gorgebleue, Genappe

“Le gorgebleue est un oiseau assez rare que l’on distingue grâce à sa belle bavette bleue. Dans la réserve naturelle de Genappe, à deux pas de chez moi, je faisais du repérage avec mes jumelles. Dans la roselière, j’entends le chant d’un oiseau qui m’interpelle et je l’aperçois. Je suis vite rentré chercher mon appareil photo et me suis assis dans l’eau avec mon trépied face à ces plantes, des massettes plumeuses. Le but ? Qu’il se pose au-dessus. Je patiente, le soleil se couche peu à peu… L’oiseau est enfin arrivé, juste quelques secondes, puis est reparti. Je n’ai pu prendre que trois photos, dont celle-ci.

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