Partir où le van nous mène

L’Histoire n’est qu’un éternel recommencement, et les hippies ont laissé assez de traces dans notre imaginaire pour que des pans entiers de leur culture nous reviennent régulièrement. Dernier avatar en date : la “ Van Life ”, ou le nomadisme motorisé voire customisé. Et alors, vous partez quand  ?

Par Laurent Zilli. Photos DR sauf mention contraire. |

C'est un courant qui prend de l’ampleur depuis quelques années : les " Vanlifers ", ou ceux qui pratiquent la "Van Life ", littéralement "la vie en van " aménagé. Dans une société où tout va trop vite, où tout coûte trop cher, ces nomades d’un nouveau genre ont décidé de dire “ Stop ” le temps d’une parenthèse longue de quelques semaines, quelques mois voire plusieurs années...

Style de vie alternatif ou nouvelle manière de pratiquer le tourisme, la Van Life ne signifie pas pour autant rejet de la société ou de la modernité. Ces nostalgiques du mouvement hippie et de leurs fourgons fleuris – période que la plupart n’ont jamais connue - restent en effet fermement ancrés dans le troisième millénaire. Smartphone, ordinateur portable et appareil photo digital sont toujours du voyage.

Et il y a toujours suffisamment de Wi-Fi ou de 4G quelque part pour partager leurs expériences à grands coups d’Instagram ou de blogs. La preuve : tapez " Vanlifer " ou “"Van Life " dans Google, et préparez-vous à des heures de lecture.

Visiter Oncle Bill et tante Harriet

Le berceau de la Van Life, comme souvent, ce sont USA. Parce qu’il est plus aisé là-bas qu’ici de tout quitter, vendre ses biens en un temps record et vivre quelque temps de ses petites économies, quitte à s’arrêter dans un patelin pour se refaire une poignée de dollars en bossant dans le resto du coin (oui c’est possible) avant de repartir. Et parce que la culture du van y est fortement ancrée, et n’a pas attendu l’ère Flower Power pour se développer. Dans un pays si vaste, ce véhicule a toujours été considéré comme un moyen confortable et bon marché de voyager.

Prendre le volant pour une excursion de quelques jours a toujours fait partie de leur mentalité, ne serait-ce que pour rendre visite à oncle Bill et tante Harriet, dans leur petite maison construite à 2 500 km. D’ailleurs, contrairement à la majorité des pays d’Europe, où le camping est très strictement réglementé, la législation US permet de s’arrêter à peu près partout pour la nuit et improviser un feu de camp, moyennant quelques simples mesures de sécurité. Même les parcs nationaux possèdent leurs propres zones de camping sauvage autorisé.

Une carte routière et des rencontres

Objectif commun de tous Vanlifers, d’Amérique ou d’ailleurs : découvrir le monde autrement. À leur rythme, selon leur itinéraire, selon leur amour de la nature ou des villes. Et des rencontres. Car s’engager sur la route, c’est partir sans réservation, sans réel point de chute, avec juste une carte routière (et peut-être un GPS). C’est donc aborder les locaux pour trouver les meilleurs spots pour la nuit, la bonne épicerie pas cher, le bon resto du cru plutôt que l’attrape-touriste, ou encore le centre médical le plus proche. C’est rencontrer une famille qui vous permettra d’installer votre van sur leur propriété, pour quelques heures ou plusieurs jours, qui vous invitera à leur table, qui jettera avec un œil sous votre capot pour régler un moteur capricieux. Mais la Van Life, c’est aussi se préparer à des expériences moins heureuses, quoiqu’instructives.

Hors Europe de Schengen, bonjour les douaniers éventuellement méfiants, récalcitrants ou gourmands, les routes improbables, les convoitises que peuvent susciter des voyageurs occidentaux a priori davantage vulnérables. Non, tout n’est pas romantique dans l’aventure, surtout si on veut la vivre à l’extrême. Voilà pourquoi il est conseillé de satisfaire à quelques prérequis.

D’abord, il faut aimer conduire, c’est une évidence. Ou jouer les passagers durant de très longues heures. Il ne faut pas non plus craindre la promiscuité : vivre plusieurs semaines, mois voire années dans un espace de cinq mètres sur deux peut se révéler une véritable épreuve. Idem pour le confort. Oubliez le matelas Bultex et le sommier à latte monté sur rotules, trop encombrants. Avaler plusieurs milliers de kilomètres dans un van et des dizaines de nuits sur un lit de fortune est donc incompatible avec des lombaires fragiles. Obsessionnels de l’hygiène, ne vous y frottez pas non plus : vous n’aurez droit qu’à un petit brossage de dents matin et soir, un rafraîchissement sommaire et une douche seulement quand l’occasion se présente !

Mets de l’huile…

Encore un détail : la mécanique. Vous y touchez, un peu ? Tant mieux, car à moins de pouvoir vous payer un van VW ou Mercedes neuf, full équipé et sous garantie, il vous faudra apprendre à vérifier le niveau d’huile sous peine de prendre le risque de vous retrouver immobilisé au milieu de nulle part. Impossible, en effet, de parler Van Life sans évoquer le véhicule lui-même. L’icône absolue du genre, c’est le Combi VW. Et plus il est vieux, plus c’est la classe. Mais pas que. Car plus il est ancien, plus sa mécanique est paradoxalement robuste. Et, s’il y a panne, plus il s’avère aisé de se débrouiller avec des notions pas trop poussées. N’oubliez pas non plus de bichonner votre intérieur. Si vous partez longtemps, autant vous composez un foyer ambulant aussi douillet que possible.

Pour les aficionados de la Van Life Total Experience, ceux qui veulent tout aménager eux-mêmes de A à Z, internet regorge de sites pertinents (voir ci-contre). À partir d’une camionnette deux places strictement utilitaire, certains vous bricolent de ces petits nids d’amour... Mais vous avez aussi le droit de d’abord juste tâter le terrain. À cette fin, diverses entreprises proposent des locations de vans déjà tout prêts au voyage. Attention, on a dit van, pas mobil-home...