Carnet de voyage(s) dans le sud #7

Dernière semaine pour notre journaliste entre le festival d’Avignon et son théâtre. Dernière ligne droite pour vivre quelques pièces comme autant de bonheurs répétés.

Par Isabelle Plumhans. Photos : Isabelle Plumhans, Flickr : Elliott Brown, Paula Funnell. |

Jour 7. Quand le festival touche doucement à sa fin...

Et qu’on réalise qu’on aurait encore mille choses à voir, autant à faire. Et que du coup on se la joue cool. Comment ça, contradictoire, moi ?

Pour se faire plaisir, retour en enfance avec du théâtre pour adulte à partir de 6 ans -ou 10, ou 3, suivant le genre de la pièce. Moi, des enfants, j’en ai pas. Mais ce théâtre, majoritairement représenté cette année, in et off, au festival, est souvent bijou d’inventivité, de simplicité et de sensibilité. Comme ce « Tristesse et joie dans la vie des girafes », auquel j’ai assisté, entourée d’enfants sur mini banquettes à l’avant de la salle, adultes en arrière, sur des sièges plus conventionnels. Des adultes qui parfois n’accompagnaient aucun enfant. Tous, nous étions subjugués pareil (y compris les « grands » forcés, par manque de place, de s’asseoir sur mini sièges). Texte profond, d’une promenade de Girafe, petite fille qui a perdu sa maman et qui grandira en une nuit, mise en scène épurée et jeu toujours juste, jamais singé. Ça, c’était dans le in, texte de Tiago Rodrigez mis en scène par Thomas Quillardet. Dans le off, il a été aussi question du voyage d’une petite fille, avec le grand Piletta Remix. D’itinérance de l’autre côté du Rhône. Et de verre en terrasse, histoire de se poser. Allez, je te raconte…

Pour rajeunir et s’émouvoir
On écoute la radio qui fait son théâtre

Piletta Remix, c’est une pièce radiophonique et démente du collectif WOW ! qui raconte les aventures de Piletta, partie chercher la plante de Bibiscus sur la colline de Bilipolis. Le thème te semble enfantin. Ok. Mais attends d’avoir vu la pièce pour juger. Sur scène, deux comédiens, un auteur-bruiteur, un musicien et un ingénieur du son. Des micros. En salle, des spectateurs (toi, bientôt, moi aujourd’hui) avec des casques. Sur scène, la petite équipe qui crée en live l’odyssée de Piletta, bruitage, son et voix. En salle, on y est, on y croit. Et on s’en va, tout près de Piletta, on suit ses aventures, on s’émeut de s’émouvoir, de comprendre, cœur et corps. Edit : si t’es pas à Avignon cette semaine (comment ça je me répète ???), ils sont mi-août au festival de théâtre de Spa. Détour obligé. Pigé ?

Piletta remix, du collectif WOW !, aux Doms tous les jours à 13h, jusqu’au 26/07, les 16 et 17/08 à 19h au festival de Spa et le 23/08 au festival Théâtre au Vert, à Thoricourt (Silly), www.lecollectifwow.be

Pour se rafraîchir
On vit aux rythmes teinturiers

La rue des teinturiers, c’est l’escale avignonnaise obligatoire. Animée, jour et nuit, des troupes qui tractent, des touristes qui flânent, des marchands de bric et broc qui hèlent et des festivaliers qui cherchent un coin où se poser. Année après année, mon passage obligé d’été, c’est la terrasse de la Cave des Pas Sages. Un bar à vin et bière, qui fait petite restauration. Pourquoi là ? Pour le service, qui, même en folie festivalière, garde le sourire et le bon mot. Et surtout pour le charme discret et un peu usé de ses vieilles pierres, façade authentique et terrasse en bord de petit ruisseau, grande roue (reliquat de celles des teinturiers qui autrefois habitaient la rue, donc) tout à côté. J’ai l’impression d’être hors la ville, un instant. Le temps d’un verre de blanc, ou d’un jus d’abricot, selon l’heure. Farniente fébrile en journée, happy hour en début de soirée, concerts sympatoch’ plus tard dans la nuit, tu feras selon la liste de tes envies. Et si tu passes par là, jette aussi un coup d’œil à la chouette sélection du bouquiniste voisin. Tu m’en diras du bien.

La cave des Pas Sages, rue des teinturiers, 41, Avignon.

Pour changer de tempo
On entre en itinérance…

A Villeneuve en scène. Villeneuve, dont, si tu me suis, je t’ai déjà parlé. Tu sais, ce petit morceau de paradis, un pont plus loin que la cité des papes, Chartreuse de bonheur et auberge de jeunesse toute chouette. A Villeneuve, ils ont la bonne idée d’organiser leur festival, pendant celui d’en face. Un festival des théâtre en itinérance : musique, cirque, arts de la rue… mais aussi ateliers d’écriture, réflexologie plantaire (il me semble t’avoir déjà parlé du pied du festivalier mis à mal en juillet) ou encore espace ludique occupe sa programmation… Bref, un festival pour toute la famille, qui se pratique à la cool, détendu et heureux. Certains spectacles sont d’ailleurs accessibles dès 3 ans. Bon, la mauvaise nouvelle pour toi qui es dans le sud là, tout de suite, maintenant, c’est que Villeneuve-en-scène, c’est fini depuis ce week-end. Mais si je t’en parle quand même, c’est parce que Villeneuve-en-scène cherche, année après année, des ambassadeurs. Soit un top filon : en échange de ton service, tu peux assister à tous les spectacles, tu reçois des entrées gratuites à distribuer, et tes repas sont pris en charge. Sans compter le beau t-shirt et le joli badge à ton nom que tu reçois. C’est pas beau ça ? Penses-y, pour l’an prochain. Enfin, moi, j’dis ça, j’dis rien…

Villeneuve-en-scène, www.festivalvilleneuveenscene.com

Le plus du jour
Les food trucks chez Jean Vilar

Jean Vilar, c’est le monsieur grâce à qui le festival d’Avignon existe. Celui qui, voici 70 ans, a décidé que l’avenir du théâtre passait par la décentralisation. Soit quitter Paris, ses codes bourgeois et ses habitudes pour proposer un théâtre au plus proche de son public, dans le vent de la cour d’Honneur, en été… notamment. Et ça, ça méritait bien un lieu à son nom en cité papale. Du coup, place de l’Horloge, il y a la Maison Jean Vilar, rattachée à la prestigieuse BNF de Paris. Là, les archives du festival, un espace d’exposition. Et, en période de festival, de nombreux débats à l’ombre des grandes toiles dans sa courette pavée et quelques représentations. Cette année on y mange, aussi. Grâce aux quelques food trucks qui se relaient dans cette même cour. Une façon de rappeler qu’au temps de Jean Vilar, aux entractes et après les spectacles, on oubliait les petits fours et le champagne proposé pour des repas aux accents démocratiques.