Ces galeries d’art qui cassent les codes à Bruxelles

Lieux d’exposition et sources d’inspiration, les galeries bruxelloises changent de visage. Gros plan sur deux d’entre elles installées dans autant de quartiers de la capitale.

PAR AGNÈS ZAMBONI. PHOTOS D.R. SAUF MENTIONS CONTRAIRES. |

La Bocca Della Verità

Derrière la façade Art nouveau de la maison Van Dijck signée Gustave Strauven, se cache un visage d’un autre style, celui postmoderne d’un bâtiment atypique, imaginé à la fin des années 80 par l’architecte Michel Poulain. Longtemps occupé par une petite école de langues, il vient d’être investi par le galeriste et curateur Jean-François Declercq, qui n’en est pas à son coup d’essai. Après avoir créé un premier lieu d’exposition dans l’ancienne maison atelier d’Oscar Jespers et, pendant le confinement, redonné vie à l’espace Area 42, dans l’immeuble construit par l’architecte Michel Polak, le voici lancé dans une nouvelle aventure : donner leur chance à des créateurs, qui n’ont quasi jamais exposé, mais dont l’inventivité est en train d’exploser.

 

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Une prise de risque

La première exposition a présenté des designers issus de la nouvelle scène du design belge ou qui ont choisi d’installer leur atelier à Bruxelles, en Wallonie ou en Flandre. Le vase Lusus Naturae, fabriqué à partir de calcite naturelle, la console Plane, en aluminium assemblé mécaniquement, sont des œuvres de Thibault Huguet, explorateur des potentialités de divers matériaux. Au dernier niveau, on découvre les cierges et bougies XXL d’Hélène del Marmol, colonnes totémiques en cire végétale composées d’éléments moulés séparément avant de former de véritables sculptures.

Quant aux designers Arnaud Eubelen et Chloé Arrouy, ils travaillent avec des matériaux de récupération dotés de finitions haute couture. « L’univers et la mission des galeries sont en pleine mutation. Je ne veux pas refaire ce que j’ai déjà fait. Aux expositions d’objets et de textiles, je veux notamment associer des performances musicales et croiser les disciplines. La seconde exposition est justement une collaboration avec la galerie parisienne It’s great design et la curatrice Margherita Ratti qui sélectionne des designers, hors des sentiers battus, pour leur vision innovante et leur personnalité unique. Intérieur design présente des acteurs du slow design qui renouent avec des techniques artisanales et ancestrales. C’est le cas des meubles multifonction Binomio de Giuseppe Arezzi, qu’il a réalisés dans le cadre de sa résidence à l’Institut culturel italien de Paris. Mais aussi de ses sièges Manico, liés à la tradition vernaculaire, et racontant la simplicité de la vie rurale. Composés d’une structure en frêne et coussins en lin de couleur vivre, ils sont fabriqués avec un minium de matière.

L'adresse ? 85 boulevard Clovis, 1000 Bruxelles.
Infos pratiques : T. 0475 64 95 81, infos via jf@boccadellaverita. gallery ; Rendez-vous sur la page Instagram (pour connaître les horaires d’ouverture variables).

La Shåk Gallery

Elle s’appelle Marcela Sheridan, lui, c’est Bertil Åkesson. Le nom qu’ils ont choisi pour le lieu qu’ils ont créé réunit les deux premières lettres de leur nom de famille respectif : Shåk... comme une charnière reliant les différentes parties d’un meuble, le symbole de l’union de leurs deux mondes. Marcela a grandi entre le Mexique et les États-Unis et Bertil a vécu à Paris, avec une éducation suédoise. Leur rencontre, sous le signe des arts à Art Basel, a permis de rassembler leurs découvertes mais aussi de conjuguer leurs sensibilités esthétiques et références culturelles. Dans une autre vie, j’ai été designer de bijoux et d’objets pour la maison aux États-Unis et à Londres, précise Marcela. Quant à Bertil, passionné par les styles anciens et en particulier le mobilier gustavien, il a progressivement glissé vers des choix plus modernes et les créations de design scandinaves.

Un espace ouvert

Ce qu’ils souhaitent avant tout, c’est célébrer la synthèse des arts. Chaque fois que c’est possible, nous travaillons avec l’aide d’une curatrice car on ne peut pas tout connaître, raconte Marcela. La galerie fait dialoguer des œuvres emblématiques de design historique et des créations de designers belges actuels. Parmi les pièces scandinaves présentées, on peut admirer un magnifique banc en palissandre (bois aujourd’hui protégé) de Torbjørn Afdal. Ici, c’est l’extension de notre maison qui est devenue trop petite pour accueillir toutes nos passions. Et on peut ainsi les partager. Dans le futur, nous aimerions présenter encore plus d’œuvres d’art, précise Bertil Åkesson.

Le modernisme japonais y est à l’honneur jusqu’au 16 mars 2022. Au programme, un rare tabouret de Soetsu Yanagi, réalisé en 1936 pour le musée Mingeikan, la fameuse chaise en bambou de Ubunji Kikodoro, réalisée en 1937, exposée à l’exposition universelle de New York en 1939 et qui inspirera Charlotte Perriand 20 ans plus tard lors de sa visite au Pays du Soleil-Levant ainsi que l’iconique Rope Chair de Riki Watanabe. Marcela s’occupera ensuite directement d’une exposition sur les femmes et le design intitulée The future is female, présentée jusqu’au 30 avril 2022, avant un show sur le design mexicain en septembre/ octobre 2022. Les céramiques suédoises émaillées de poissons en argent signées Wilhelm Kåge, des années 1940/50, me rappellent les pièces avec incrustations d’argent d’Emilia Los Castillo fabriquées au Mexique. Et l’année se terminera avec une thématique sur la chaise.

L'adresse ? 54 rue Darwin, 1050 Ixelles.

Infos pratiques : T. 02 735 48 35. shakgallery.com , info@shakgallery.com ; Plus d'infos sur la page Instagram : . Ouvert du jeudi au vendredi de 11 h à 18 h et sur RDV.