Comment le covid va-t-il changer la vie au travail ?

Nouveaux rythmes, nouvelles priorités, comment sera la vie au bureau après la pandémie ? Nous avons demandé à Catherine Piana, consultante, formatrice et coach. 

Photo by Olena Sergienko on Unsplash. |

En quoi le confinement aurait-il des répercussions sur notre vie professionnelle ?
Il a permis de sortir de cette roue du hamster dans laquelle on tourne en boucle. Cela a été l’occasion de se demander si cette façon de vivre, de travailler, fonctionnait pour soi. Ce qu’elle générait, les valeurs qui nous convenaient ou pas…  Cela a permis de nourrir une réflexion, qui s’étend d’ailleurs au-delà de la sphère professionnelle : au niveau du relationnel, de l’alimentation, des activités physiques, des loisirs…  

Concernant le travail, certains ont pu se rendre compte qu’ils avaient besoin de travailler en étant entourés de collègues, d’autres ont réalisé les bienfaits du télétravail, ne serait-ce même qu’un ou deux jours par semaine. Ils ont pu apprécier par exemple le fait de ne pas devoir faire la route, ou de ne pas emprunter les transports en commun tous les jours. Travailler chez soi peut réduire le stress, mais aussi, vous éloigner de personnes toxiques dans votre environnement professionnel. Ce qui est quand même assez fréquent ! Il y a donc des personnes qui seront heureuses de retourner sur le lieu de travail, d’autres qui le feront avec des pieds de plomb. Cette pause forcée, c’est finalement l’occasion de se poser et de réfléchir à ce que l’on veut vraiment. Ce qui est assez complexe à aborder. 

Quelles questions doit-on se poser ? 
Tout d’abord, il faut se demander si ce que l’on fait a du sens pour soi. Qu’est-ce que mon travail m’apporte ? Est-ce que je m’y épanouis ? Est-ce que j’ai le sentiment de contribuer à quelque chose de plus vaste ? On constate ainsi que nombre de gens qui souffrent de burnout ne trouvent plus de sens à ce qu’ils font, ont l’impression de ne servir à rien. Ensuite, viennent les interrogations sur les valeurs : est-ce que ce que je fais est en accord avec mes valeurs ? Le confinement a cela d’intéressant dans la mesure où il a permis de revenir à l’essentiel, de s’interroger sur ce qui est vraiment important pour soi. On en sort en sachant, ou du moins en s’étant interrogé sur ce que l’on a encore ou plus envie de faire, sur le type de système dans lequel on veut encore évoluer ou pas. 

Comment réagir alors ? 
Si on réalise que le système dans lequel on évolue ne nous convient plus, il ne faut pas pour autant tout claquer du jour au lendemain. Démissionner n’est pas une solution. Ne rien faire non plus. Mais divers aménagements peuvent être envisagés. Par exemple, si on s’est rendu compte que l’on se concentrait mieux chez soi pour certaines tâches que dans un open space, ou que les longs trajets quotidiens nous épuisaient, on peut négocier des jours de télétravail. Si on a pris conscience de la présence d’une personne toxique, on peut en parler, à la personne concernée, à son responsable, aux ressources humaines.

Chez certains, cela pourra encore se traduire par la nécessité de lever le pied, de revenir à une vie plus équilibrée, ne serait-ce que pour passer plus de temps avec ses enfants. Dans ce cas, on peut demander à adapter son temps de travail. Il existe des tas de formules pour aboutir à ce que l’on veut vraiment. Idéalement, il faut se faire accompagner. On a le nez trop plongé dans le guidon que pour réfléchir à la bonne façon de  procéder.

Beaucoup risquent d’être freinés pour des raisons matérielles. Comment y faire face ?
Là encore, la période que nous venons de traverser nous a permis de nous interroger sur ce qui est vraiment essentiel, sur nos réels besoins et par extension, à quoi on dépense notre argent. Pas mal de gens ont réalisé que durant le confinement, leur solde est resté positif, et compris qu’ils surconsommaient en temps normal ! D’autres qu’ils prenaient plus de plaisir, ressentaient plus de satisfaction, à passer du temps en cuisine à faire du pain avec leurs enfants qu’à aller faire du shopping. 

N’est-il pas plus simple de remonter dans la roue sans se poser de questions ?
La tentation est grande d’y remonter sans se poser de questions ou en oubliant celles qu’on s’est posées. Mais, inévitablement, on va replonger dans les mêmes soucis. Quel que le soit le domaine d’application, il serait dommage d’ignorer la réflexion qu’a pu apporter le confinement. Un truc simple, c’est  de consigner par écrit ce qu’on a apprécié ou pas durant cette période, ce qui s’est bien passé, ce qui a été désagréable. Cela permet de débroussailler le terrain si on veut agir dans la foulée. Et si ce n’est pas le cas, de ne surtout pas oublier les fruits de cette réflexion. 

Quel rôle doivent jouer les employeurs et chefs d’équipe ?
La façon de vivre la sortie du confinement dépend de la façon dont on a vécu celui-ci, du rythme qu’on a adopté. Certains se sont adaptés très vite, d’autres ont mis du temps, d’autres encore se sont sentis complètement perdus, inutiles… Et surtout, beaucoup auront perdu des proches. Les émotions seront donc fort présentes. Et quelles qu’elles soient, elles doivent être accueillies et exprimées. Il est important que le milieu du travail puisse les prendre en compte. C’est là que, selon moi, on verra où sont les vrais leaders. Ils laisseront un temps à leurs équipes pour libérer leurs émotions, leur ressenti, leurs craintes, leurs attentes…Il faudra un temps pour rétablir la connexion et recommencer les activités avec une certaine sérénité. Et des aménagements seront nécessaires. Notamment en ce qui concerne les horaires et le télétravail.

Refuser le télétravail traduit un besoin de contrôle, qui est illusoire. Ce n’est pas parce que quelqu’un reste assis derrière son écran dans votre champ de vision qu’il est plus productif que s’il était chez lui ! Quand les gens demandent à travailler de chez eux, cela ne veut pas dire qu’ils vont passer leurs journées à regarder des séries en mangeant des chips. Le confinement l’a d’ailleurs bien montré : ils travaillent et sont parfois même plus productifs. Il faut oublier le management par le contrôle et opter pour un système guidé par des objectifs clairs, avec du suivi, de l’écoute, du dialogue, de la motivation. Le manque de communication, de connexion, de confiance… est totalement improductif. 
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