IWC, le ciel pour horizon

Cette année, la Manufacture revisite sa collection de Montres d’Aviateur (ou montres pilote). Un exercice que les afficionados de la marque apprécient particulièrement. Nous avons rencontré son CEO, Christoph Grainger-Herr.

Magali Eylenbosch |

Nous ne nous attendions pas forcément à un retour de la montre Pilot sur le devant de la scène…

Vraiment … ? Qu’attendiez-vous ?
Je pensais à la ligne Portofino…
Peut-être l’année prochaine… 
Quand nous avons inauguré notre nouvelle Manufacture, il y a 3 ans, nous avons démarré un processus très important qui intégrait les mouvements. Le but était d’offrir une gamme de prix plus attractive. Nous nous situions aux alentours de 10.000 €, voire plus. Nous avons commencé en 2019 en offrant le calibre 32 Automatic, le chronographe 69000 et le 82000 Automatic. Ensuite, l’an passé, nous avons constaté un réel engouement pour la Portugieser Automatic 40 et  la Portugieser chronographe qui figurent parmi les modèles les plus populaires. Il nous semble essentiel de travailler sur l’ergonomie de nouvelles tailles de boîtier et d’étendre la garantie grâce à la précision offerte par les calibres 82000 et 69000. Nous devions également augmenter d’autres critères comme l’étanchéité. Ce travail a été fait pour la Portugieser et nous voulions le faire pour la ligne de Montres d’Aviateur. Tout spécialement pour le Chronographe 41 mm ou  la Big Pilot 43. C’était notre nouvel objectif, mais nous ne négligeons aucune autre ligne. Vous le constaterez très prochainement.

Les Manufactures demeurent globalement très prudentes en termes de nouveauté. Ne craignez-vous pas que l’on vous reproche de rester dans votre zone de confort ?
Nous devons aborder tout ça de différents points de vue. Tout d’abord, nous ne relançons pas d’anciens modèles, nous continuons le développement de notre gamme Pilot. Il n’y a pas de pièces vintages dans la nouvelle collection. Il s’agit de montres iconiques qui évoluent pas-à-pas. Cette continuité nous permet de ne pas faire l’impasse sur l’ADN du produit. En même temps, nous innovons en termes de matériaux, de couleurs, etc. Il ne s’agit pas de prudence ou de timidité, mais lorsqu’on parle d’une marque comme IWC, il y a bien sûr des références cultes qui restent présentes dans les collections. Les clients recherchent des pièces qui ont un héritage et qui s’inscrivent dans la continuité. 

Vous proposez un large éventail de bracelets interchangeables équipés du « Quick Change System ». C’est une réelle demande du client aujourd’hui ? 
Je pense que oui ! C’était un véritable challenge au niveau du design d’intégrer un bracelet fiable et facile à utiliser. D’autant que les matières des bracelets sont très différentes. À notre époque, il y a une demande croissante pour des produits pratiques qui offrent la possibilité d’être utilisés chez soi. Plus personne n’a envie d’aller chez l’horloger pour changer le bracelet d’une montre. On préfère le faire en quelques secondes, chez soi.

Comment définiriez-vous le client IWC aujourd’hui ?
De nombreux clients sont aussi bien attachés à l’esthétique qu’à la mécanique. D’Est en Ouest, nous avons affaire à des gens passionnés, des entrepreneurs qui commencent à construire quelque chose. Ils viennent chez IWC pour célébrer la réussite d’une étape importante de leur vie, mais sont toujours tournés vers le futur.

De nombreuses marques font appel à des ambassadeurs. Pensez-vous que leur rôle ait encore beaucoup d’impact sur le public ? 
L’industrie du luxe a toujours utilisé le pouvoir de l’identification pour véhiculer les valeurs de la marque. Lorsqu’on achète un objet dont la fonction n’est pas essentielle, comme une montre mécanique, c’est qu’on adhère aux valeurs de la marque, mais aussi que l’objet va révéler une partie de notre personnalité. On va transmettre un message aux gens qui nous entourent. Le fait de s’identifier à une personnalité remonte à l’époque romaine. Et bien sûr au 20ème siècle, on a assisté à l’émergence des stars de cinéma, des athlètes. Aujourd’hui, on fait appel aux stars de la télé-réalité et des média sociaux. C’est un système qui fonctionnait il y a cinquante ans et qui fonctionnera toujours dans 50 ans. La vraie question à se poser est comment construire une relation pour que la collaboration fonctionne. On choisit de travailler avec certains ambassadeurs comme Bradley Cooper, Lewis Hamilton, Tom Brady ou Cate Blanchett parce qu’on entretenait une relation privilégiée avec eux bien longtemps avant de travailler ensemble. Avant que l’on ne collabore avec Bradley Cooper, il ne portait presqu’exclusivement que des montres IWC. Tom Brady a acheté sa première IWC au milieu des années 90, bien avant notre rencontre. Il faut que nous partagions des valeurs  et des projets communs. Cela va plus loin que de mettre un visage sur un panneau publicitaire. Parfois, ils participent au design. Ça a été le cas avec Lewis Hamilton. C’est à ce moment-là que nos relations ont un sens.

On parle de plus en plus de parité. Quelle est l’importance de votre clientèle féminine et avez-vous remarqué un enthousiasme grandissant des femmes pour l’horlogerie mécanique ?

Oui, c’est évident ! C’est d’ailleurs un marché en pleine expansion, même si jusqu’à présent notre positionnement était davantage masculin. Les femmes aiment l’esprit et le design d’IWC. Elles n’ont pas peur de porter une montre oversize, même si, du côté de l’Asie, la demande va plutôt vers des petits diamètres, surtout la Portofino 34 et 37 mm. 

Est-ce qu’aujourd’hui horlogerie doit rimer avec écologie ?
Cela a toujours été le cas, même lors de nos débuts à Schaffhausen, il y a 154 ans. Un produit de luxe doit provoquer une émotion, répondre aux plus hauts critères de qualité, être rare et être vecteur de plaisir pour le client. En aucun cas, il ne doit se demander dans quelles conditions il a été fabriqué et quel est son impact sur l’environnement. Et pour que ce ne soit pas un sujet d’inquiétude, nous mettons tout en œuvre afin de proposer un produit éco-responsable.

La Portofino Automatic en acier est proposée à  4.500 €. C’est l’entrée de gamme. Pensez-vous ajouter à la collection une montre à un prix plus accessible pour une clientèle plus jeune ? 
Nous sommes satisfaits de notre positionnement en termes de prix et d’âge de nos clients. Il y a un premier segment entre 5.000 et 10.000 € qui concerne les modèles comme la Portofino dont vous parlez, mais aussi les chronographes. Ensuite, nous avons des pièces dont les prix varient entre 20.000 et 40.000 €, par exemple pour un calendrier perpétuel. Le but est que le client entame une relation avec IWC en achetant une première montre automatique. Qu’il évolue avec nous et choisisse plus tard un chronographe. Et peut-être qu’après, il se laissera séduire par un calendrier perpétuel.

Quelle est la stratégie concernant l’e-commerce ?
Nous serons 100 % online dès le mois de juillet.

Quel sera le rôle du détaillant parfait d’ici 2025 ?
Il aura toujours un rôle essentiel. Il faut un équilibre entre les différents réseaux de distribution. C’est chez le détaillant que le client va chercher des renseignements sur la marque et sur le produit. L’achat d’une montre mécanique est rarement un achat impulsif. Le client change souvent d’avis avant d’acheter une montre plutôt qu’une autre. C’est un investissement important. Je pense également qu’en 2025, le détaillant devra offrir tous les services en boutique, par téléphone et sur toutes les plateformes.

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