Le co-living, ces lieux urbains où loger et bosser

Séjours longue durée ou courtes escapades, dîners branchés dédiés aux voyageurs de passage et aux locaux, lieux de travail et de détente... Depuis que le vivre ensemble est un concept à la mode, les pros de l’immobilier et de l’hôtellerie développent de nouveaux lieux sous le signe du co-living. Décryptage et bonnes adresses pour tester le concept.  

PAR MARIE HONNAY. PHOTOS D.R. SAUF MENTIONS CONTRAIRES. |

À Paris, dans le Marais, ainsi qu’à Belleville, autre coin de la capitale adoré des touristes branchés, mais aussi des locaux, les hôtels du groupe People (le nom n’a évidemment pas été choisi par hasard) jouent dans cette cour. Fini le temps où les restos d’hôtels étaient tellement lugubres qu’on préférait commander un bolo tristounet en room-service. À l’instar de ce qu’on peut observer dans le secteur de la mode, l’objectif de ces lieux de vie est de dépasser le concept d’âge en s’adressant aux jeunes baroudeurs, mais aussi aux quinquas de passage à Paris pour un séminaire et aux célibataires récemment divorcés en quête d’un lieu de vie temporaire à l’ambiance conviviale, cool et branchée. Et tant qu’à les inspirer, autant investir des espaces chargés d’histoire comme une ancienne fabrique de tabac réhabilitée.

L'intérieur de l'hôtel People à Paris. 

Pour que la sauce prenne, rien n’est laissé au hasard, ni la déco sous le signe de l’art contemporain (les street artists sont choisis pour leur ancrage local), ni l’accueil “tout sourire” de la jeune équipe, ni les activités (dont le brunch, un incontournable dans ce type d’endroits où cohabitent les familles bobos et les voyageurs curieux de faire “toast à l’avocat commun” avec les Parisiens), ni les valeurs défendues par le groupe. Comme le local et l’écologie : les hôtels People utilisent un max de produits locaux et les salles de bains sont équipées de sablier pour inciter les voyageurs à prendre des douches les plus courtes possible.

En vidéo, nos conseils pour bien télétravailler :

Yust change la donne

Si vous poussez les portes de YUST, vous comprendrez vite pourquoi le terme “hôtel” ne convient pas vraiment à cet établissement situé dans le très branché quartier de Berchem, près d’Anvers ; un concept qui vient d’inaugurer une enseigne du même nom à Liège, face à la gare Calatrava en attendant une ouverture à Bruxelles d’ici deux ans. Mobilier de designers (des éditions rares pour la plupart !), livres d’art dans le salon/lobby, grand rooftop avec vue, restaurant branché esprit food-sharing au rez-de-chaussée, nombreuses œuvres d’art à tous les étages. Ce lieu a tout ce qu’il faut, là où il faut, pour séduire les citadins en manque de sensations fortes. Si, compte tenu du concept précité, on pourrait s’attendre à croiser une majorité de trentenaires tatoués, graphistes ou musiciens, de passage à Anvers pour quelques jours, la réalité est un peu différente.

C’est qu’ici, on peut séjourner brièvement ou plus longtemps, à savoir un mois minimum si on opte pour un format “long stay”. Dans ce cas, on réserve un loft avec cuisine plutôt qu’une simple chambre et on profite des services hôteliers proposés : le bar et le restaurant (comme dans les établissements People, chez YUST, on privilégie les producteurs locaux pour alimenter les cuisines), évidemment, mais aussi les cours de yoga, les after- works, les DJ sets... Un event manager attitré au lieu est d’ailleurs chargé de trouver des idées pour booster l’esprit communautaire de l’hôtel. De quoi permettre aux résidents, mais aussi aux locaux, de s’encanailler plusieurs soirs par semaine. Et de préférence de se parler et plus si affinités.

L'esprit nomade

Directeur général du groupe YUST Housing, Louis Claes, le jeune ingénieur commercial à l’origine du concept, est tombé dans le bain de l’hôtellerie après avoir réalisé une étude de marché sur les nouvelles attentes des voyageurs. Sa rencontre avec un promoteur immobilier en quête d’un nouveau challenge a donné naissance à Yust. Ces dernières années, il suffit d’observer le succès des services comme Deliveroo et Uber Eats, pour comprendre que les besoins et envies des gens ont changé. Aujourd’hui, qu’on ait 20 ou 50 ans, on est amené à changer plus fréquemment de job. Et homeworking oblige, on travaille là où on vit. La plupart d’entre nous deviennent parents plus tard et lorsqu’on divorce, on combine vie nomade et moments plus organisés. Ce mode de vie hybride a très logiquement donné naissance à de nouveaux concepts tels que YUST, précise Louis Claes.

YUST, présent à Anvers et Liège, propose des établissements avec mobilier design, œuvres d’art, resto et bar branchés... Plus qu’un hôtel, un lieu de vie.

YUST propose pas moins de 100 chambres au décor branché : 60 dédiées aux séjours longue durée conçues dans un esprit loft, 10 dortoirs et des espaces plus classiques, idéals pour les escapades d’une ou deux nuits. Car en marge des clients business, les voyageurs qui souhaitent découvrir la ville préfèrent évidemment séjourner dans un quartier bouillonnant. À une époque où instagrammer ses vacances est un must pour de nombreux voyageurs, un coin de la ville riche en galeries d’art, coffee shops et bars branchés constitue forcément un plus. Mais ce qui fait revenir les vacanciers, c’est surtout l’offre des bars et des restaurants. Chez YUST, elle compte pour 50 % du chiffre d’affaires du groupe. Nous avons opté pour une approche Fast-Fine. Comprenez : une offre simple, mais dans l’air du temps, centrée sur des assiettes locales, de saison, majoritairement véganes et à partager. Une approche qu’on retrouve également à l’hôtel gantois Yalo, où le grand bar central fait se rencontrer locaux aux looks branchés et touristes lassés des enseignes classiques.

Quant au rooftop du YUST, il propose des burgers gourmets (et bon marché) dédiés à une clientèle plus jeune. Car la force du co-living 2.0, c’est son côté accessible. On dort dans de beaux draps et on mange bien, mais sans mettre son budget dans le rouge. Face à l’engouement croissant pour le co-living, les groupes traditionnellement leaders dans le registre des appart-hotels s’invitent dans le créneau, trop porteur pour ne pas être exploité. Cette année, le groupe Adagio lance par exemple un concept parisien dans ce même esprit.

À Bruxelles, les maisons-clubs 

Autre émanation des confinements, le projet Maison Cokoon, à Bruxelles, initie les maisons-clubs : des lieux d’habitation partagés, où l’on peut vivre ensemble chacun chez soi. Anne Lange et Christophe Parot, fondateurs du projet, ont simplement voulu inventer un nouvel art de vivre à plusieurs. Ici, on a voulu mélanger le luxe discret du boutique-hôtel et l’exigence du club privé. Pour qui ? Des citadins avides de vivre une expérience de vie commune, qu’ils soient professionnels mobiles, “jeuniors” (jeunes seniors) ou jeune couple. Chaque maison s’articule autour de10 à 12 suites (solo ou duo) de 30 à 60m2 avec un salon privé, une salle de bains, un espace nuit et une kitchenette, réparties dans une belle propriété aux espaces communs : cuisine de chef, table d’hôtes, salon, bibliothèque, Cokoon Room relaxante et un grand jardin... Ainsi, chacun dispose de son espace d’intimité, tout en pouvant partager aussi des moments conviviaux autour d’un repas, d’une séance de yoga ou d’un film. Les services des maisons-clubs incluent une épicerie commune, le ménage régulier, l’internet et d’autres commodités. Au total, cinq maisons ouvriront à Bruxelles, à commencer par la Maison Merjay à Ixelles, en juin 2022, puis une autre à Uccle en septembre, suivie de projets similaires en France et au Portugal... Un nouvel habitat qui révolutionne le concept de pension de famille.

À Bruxelles, Maison Cokoon propose des lieux d’habitation partagés, où l’on peut vivre ensemble... chacun chez soi !

Billard, spa ou resto ?

À Liège, depuis environ un an, un ancien bâtiment au look industriel du quartier du Val-Benoît a été reconverti en giga espace de co-living. Chez Arc, on ne passe pas en coup de vent. Les résidents, entre 20 et 80 ans, sont là pour plus longtemps. C’est le cas de l’artiste liégeoise Pupa Biasucci et de son compagnon, l’artisan céramiste Florian Dejardin, qui s’y sont installés récemment. Ce qu’on aime ici, c’est l’aspect communautaire. Je peux profiter de l’espace de coworking à l’ambiance cosy ou du spa compris dans la location de notre loft. Au moment des repas, on a le choix : rester en amoureux dans notre appartement, descendre avec notre casserole dans la cuisine commune pour partager un chili avec les autres résidents ou aller au resto puisque notre communauté jouit de réductions dans certaines cantines de la ville. Quand j’organise des évènements, je peux privatiser des salles communes et inviter des gens, mais aussi les résidents à se joindre à la fête, précise Pupa.

Pour ce jeune couple, comme pour les étudiants, les artistes et les expatriés désireux de s’intégrer rapidement, cette solution temporaire est une aubaine. Certains jours, un résident propose un cours de yoga ; d’autres fois, on se rassemble pour profiter d’un tarif de groupe dans un musée. Il se peut aussi que l’un de nous propose une partie de billard ou se mette au piano. Pour Florian et moi, ce lieu présente beaucoup d’avantages. Et si mon business se développe, je compte bien louer d’autres espaces pour, à terme, y installer mes bureaux, conclut l’artiste.

En pratique : yust.com, prix sur demande ; maisoncockoon.com, à partir de 1 760 € par mois ; arc-liege.be, à partir de 500 € par mois.

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