Les petits rituels du chanteur Arno à Bruxelles

Arno, le plus ostendais des Bruxellois, a quitté la scène ce week-end, nous laissant tous un peu orphelins. Nous avions eu la chance de le rencontrer il y a quelques années dans son « second living », l’Ancienne Belgique…

Par Sigrid Descamps. Photos Dany Willems, Mathieu Golinvaux. |

Si tant de monde aimait Arno, au-delà même de sa musique, c’était en grande partie aussi parce que l’homme incarnait l’artiste sans chichis par excellence. Malgré la célébrité, l’artiste était resté fidèle à lui-même, tout en simplicité, mariant humour et coups de gueule dans un même élan. Originaire d’Ostende, il avait cependant élu résidence à Bruxelles, et partageait son temps entre les deux. Dans la capitale, il n’était pas rare de le croiser, à toute heure de la journée, parfois de la soirée, tantôt sur l’une des terrasses du Vieux Marché aux Grains, tantôt au comptoir de l’Archiduc ou encore, dans l’enceinte de l’Ancienne Belgique où, régulièrement, il nous arrivait de l’y voir, discrètement installé, debout au fond de la salle ; il venait ainsi découvrir et applaudir d’autres artistes.

La vidéo du jour :

C’est d’ailleurs dans l’un des salons privés de cet établissement mythique que nous l’avions rencontré pour la dernière fois. C’était il y a deux ans déjà, pour la sortie de « Santeboutique ». Quelques semaines à peine avant qu’il annonce officiellement être atteint d’un cancer du pancréas, ce même crabe qu’il combattra jusqu’au bout deux années durant, offrant encore un dernier tour de chant à ses fans fidèles, avec évidemment, escale dans cette Ancienne Belgique qu’il aimait tant ! L’artiste nous avait alors livré ses habitudes du week-end…

« Demain n’existe pas ! »

Se savait-il déjà condamné ? Toujours est-il qu’il avait entamé l’entretien en nous avouant vivre sans jamais penser au lendemain… « Pour moi, hier est mort et demain n’existe pas, je vis au jour le jour. Je ne fais pas la distinction entre lundi et samedi. Par contre, j’ai un rituel. Une fois que je suis debout  — l’heure est très variable, je dors parfois jusqu’à midi ! — je vais acheter trois journaux, dans les deux langues, et je les lis en buvant une tasse de thé noir. Je suis allergique au café ! Je m’installe sur une terrasse, dans le centre de Bruxelles, et je lis tout en observant les gens. Il y a toujours plein de monde qui passe, même quand il pleut... Lire la presse, c’est ma façon de me tenir au courant de ce qui se passe en Belgique et dans le monde. Ça, et regarder le journal télévisé le soir. Il m’arrive de comparer comment une même information est traitée au Nord et au Sud, c’est parfois très différent. » Et de nous avouer dans la foulée, ne pas s’intéresser aux réseaux sociaux, fait inhabituel pour un artiste de sa trempe et de sa renommée, qui avait le contact si facile : « Je ne suis pas du tout connecté aux réseaux sociaux, je n’ai même pas de smartphone. Si je touche à ces trucs, ça va exploser ! Il suffit de regarder mon téléphone pour comprendre que je suis un vieux dinosaure (rires). »

 


Photo : Dany Willems

Bruxelles, sa belle

Si Arno revendiquait fièrement ses racines ostendaises – « J’aime retourner régulièrement à Ostende ; il y a là-bas une lumière spéciale. Entre le Casino et les thermes, tu peux voir des bancs de sable qui entrent dans la mer et avec la lumière du ciel, ça donne un sacré bazar ! », il était plus que jamais attaché à Bruxelles. « J’ai vécu dans plein de villes — Paris, Londres, Copenhague... — mais Bruxelles reste ma préférée, il s’y passe toujours plein de trucs. Il y a des cinémas, des musées... Je pourrais d’ailleurs aller faire un tour au musée. Et là, pour le coup, je ne regarde pas les gens, je me concentre sur les expositions. Quand je joue dans une ville à l’étranger, je repère toujours un musée à aller visiter durant l’après-midi. J’adore ça, surtout si je peux découvrir des choses que je ne connais pas du tout. Sinon, à Bruxelles, j’aime me rendre aux Musées royaux des Beaux-Arts. Si je reste chez moi, soit je bosse sur ma musique, soit je lis. Ces derniers temps, je lis énormément. J’ai redécouvert Carlos Castaneda. Un auteur que je lisais dans les années septante. J’ai retrouvé un de ses livres dans ma bibliothèque et j’ai eu envie de replonger dans son œuvre. Je relis aussi les romans de Tony Parsons. Et je ne lis qu’en anglais. Une habitude prise durant l’enfance, ma famille a des racines anglaises et on a vécu en Angleterre plusieurs années. Le soir, il y a de fortes chances pour que vous me croisiez à l’Ancienne Belgique. C’est mon second living ! »

Photo: Mathieu Golinvaux - Le Soir
 

A noter qu’à partir de ce lundi 25 avril, un registre de condoléances sera ouvert à l’hôtel de ville de Bruxelles, de 11 h  à 18 h, et ensuite, de 18 h à 23 h, à l’AB Café. Une belle occasion pour tous ceux et toutes celles qui l’ont croisé, applaudi, écouté, aimé… de lui rendre hommage.

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