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«La graine de lin est un ingrédient exceptionnel»

Pour améliorer et équilibrer notre alimentation en oméga-3, nourrir les animaux avec des graines de lin, mais aussi de l’herbe, de la luzerne a une efficacité scientifiquement prouvée, et cela peut avoir des répercussions positives sur la santé humaine. Yvan Larondelle, professeur de biochimie et de nutrition de la faculté des bioingénieurs de l’UCLouvain, explique comment un tel résultat est possible.

En faisant vos courses, vous avez sans doute déjà remarqué le label « Mieux Pour Tous » qui orne certains produits comme la viande de porc, les œufs, et bientôt du lait, de la viande bovine, ou de la volaille. Un label qui, comme son fondateur l’explique, a pour ambition, en alimentant les animaux avec des graines de lin, des fourrages comme de l’herbe ou de la luzerne, plutôt qu’avec du maïs et du soja, de nous fournir une alimentation plus saine et respectueuse de la nature. Il faut rééquilibrer la ration des animaux. Et « ce n’est pas qu’un slogan », lance d’emblée le professeur de l’UCLouvain Yvan Larondelle. « Il y a aujourd’hui un faisceau de données scientifiques qui appuient ces propos ».

Une alimentation plus équilibrée

« L’objectif est d’améliorer l’alimentation de notre population, de la rendre plus équilibrée. Nous avons besoin, pour être en bonne santé, de toute une série de nutriments que nous ne produisons pas nous-mêmes. Parmi ces molécules indispensables, il y a certains acides gras », explique Yvan Larondelle. « Il y en a deux qu’on ne fabrique pas - l’acide linoléique (famille des oméga-6) et l’acide alpha-linolénique (famille des oméga-3) – et il faut y ajouter un troisième, le DHA (oméga-3 à longue chaîne) qu’on ne synthétise pas suffisamment par rapport aux besoins du corps, notamment pour assurer un bon développement cérébral, un système immunitaire efficace ou une meilleure lutte contre le cancer ». Pour être en bonne santé, le rapport entre les oméga-6 et 3 doit se situer entre 1 et 4. « Or, le problème c’est que depuis les années cinquante, l’agriculture a mis en avant des produits oléagineux riches en oméga-6. L’huile de tournesol par exemple a un rapport de 200/1, l’huile de soja de 7/1. La dernière enquête alimentaire menée en Belgique en 2014 a montré que le rapport entre les oméga-6 et les oméga-3 dans notre alimentation est supérieur à 10. On mange déséquilibré ».

Il est donc important de rétablir l’équilibre dans nos ingestions d’acides gras car « celui-ci agit en profondeur sur notre métabolisme en modulant notamment la tension artérielle et nos défenses immunitaires ou en freinant le développement de nombreuses pathologies chroniques et de certains types de cancer ».

Concept de santé unique

« C’est dans ce contexte qu’intervient la graine de lin. C’est une graine assez exceptionnelle car elle contient beaucoup d’acides gras polyinsaturés oméga-3. Elle en contient même trop dans l’absolu, ce qui lui permet de rééquilibrer notre alimentation ». Mais pourquoi ne prescrit-on pas de l’huile de lin à tout le monde alors ? « La raison principale est qu’elle s’oxyde très vite. Elle perd dès lors très rapidement ses propriétés et devient même toxique à cause de cette oxydation. Elle se conserve donc très difficilement. Au-delà, dans un esprit manger local, la culture nécessite d’être plus développée en Belgique car cela peut être intéressant dans les assolements et pour la santé du sol ». Dès lors, pour bénéficier des vertus de cette plante, une solution passe par l’animal. « En consommant des graines de lin, les animaux améliorent leur propre santé mais augmentent aussi le contenu en oméga-3 de leurs muscles et organes (porc, volaille, bovins) ou de leurs productions (lait, œufs), ce qui est tout bénéfice pour les consommateurs humains finaux. Mais certains animaux comme les poules pondeuses font encore mieux parce qu’elles convertissent efficacement l’acide alpha-linolénique de la graine de lin en DHA, l’acide gras oméga-3 à longue chaîne que nous peinons à fabriquer nous-mêmes ».

Ainsi, « cultiver du lin de manière durable renforce la santé de nos terres et la diversité de nos productions végétales, améliore la santé de nos animaux d’élevage et rééquilibre nos menus pour nous prémunir contre de nombreuses maladies ».

De la fourchette à la fourche

« De nombreuses études ont montré l’impact positif d’une alimentation plus équilibrée entre les acides gras oméga-6 et oméga-3 sur la santé. A ce titre, nous avons nous-mêmes réalisé il y a quelques années une étude en Région wallonne sur un échantillon de 59 personnes qui ont été suivies pendant 18 semaines alors qu’elles recevaient des menus dont les différents ingrédients étaient naturellement enrichis en oméga-3. Dans cette étude, nous avons observé un réel impact positif sur la tension artérielle diastolique. Quelques semaines après que les volontaires aient repris leur régime habituel, cet effet avait malheureusement disparu, montrant l’intérêt d’une alimentation riche en oméga-3 sur le long terme avec des produits de ce type. On s’est aperçu qu’il y avait un réel impact sur la tension artérielle. Quand ils ont repris une alimentation habituelle, ce bénéfice a rapidement disparu. Il y a donc un impact réel ».

« Nous sommes à un moment où un tournant bénéfique peut être pris dans notre alimentation. De nombreux consommateurs ont pris conscience que manger de manière équilibrée renforce la santé et la résistance aux virus notamment. Cette priorité doit être maintenue dans le temps par les consommateurs qui doivent continuer à encourager les producteurs à s’orienter vers des produits plus sains et équilibrés, même si cela coûte un petit peu plus cher. Il faut renverser l’expression consacrée « de la fourche à la fourchette ». Il convient de voir les choses dans l’autre sens : « de la fourchette à la fourche ». C’est aux consommateurs de pousser les producteurs dans la bonne direction », conclut le professeur Larondelle.

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