Notre top dix des adresses gourmandes et leur plat signature

Il est de ces restaurants où l’on va l’appétit chevillé au corps, tendu vers un plat, qui nous a déjà fait saliver, qui nous a déjà donné du plaisir et avec lequel on veut renouveler l’expérience.

Par Carlo de Pascale. Photos D.R. |

Même si la gastronomie créative me passionne, ce genre d’appétit gourmand me vient rarement à l’évocation de plats déstructurés, revisités et tutti quanti. Il y a des jours pour la découverte, certes, mais il y a aussi des jours pour le plat qui rassure, le classique réalisé à la perfection, la gourmandise, celle du corps et un peu moins de l’esprit. Inventaire strictement non exhaustif de quelques restaurants et de leurs plats prêts à satisfaire les appétits d’homme… et de femme. Parce qu’en ce qui me concerne, je ne connais pas la différence.

L’américain-frites du Canterbury

La famille Niels, c’est notre clan Cipriani (Harry’s Bar, Venise, l’inventeur du Carpaccio) à nous. Le patriarche aurait inventé la recette de l’américain, à tout le moins il a inventé
la sienne, et même si les différentes enseignes (Vieux-Saint-Martin, Grand Forestier d’une part et Canterbury d’autre part) appartiennent désormais à deux branches de la famille, l’américain y est ici un classique auquel personne ne touchera. Oubliez le tartare en kit, le coupé au couteau et autres bœufs hachés à l’italienne barbants. Laissez-vous faire par la recette locale (certes bien chargée en mayo, le food cost doit être tout à l’avantage du restaurateur et who cares ?), cresson ou cressonnette, cornichons ; frites maison que l’on vous propose en repasse dès qu’elles perdent quelques degrés, une gueuze Boon par-dessus, une gaufre de Bruxelles pour finir si tu y arrives, service efficace et discret de ces maisons qui voient passer leurs clients en toutes sortes de compagnies différentes. Cet américain-frites, c’est mieux qu’un doudou, c’est une île.

2 avenue de l’Hippodrome, 1050 Ixelles, 02.646.83.93, www.lecanterbury.be

Les ravioli de Rosticceria Fiorentina

Rosticceria fiorentina… c’est son nom, et pourtant je n’ai jamais entendu personne le prononcer. Pour moi, et surtout pour plein d’autres, c’est chez Nardi, du nom du patron fondateur. On se dit qu’on est chez des Toscans, ces princes de la gastronomie qui ont enfanté de si grandes maisons… De fait, on est vraiment dans une osteria, trattoria, ou ce que vous voulez en – ria, mais surtout pas une pizzeria… Ici les murs, même s’ils reçoivent une couche de peinture de temps en temps, sont les mêmes depuis toujours, idem les tables, recouvertes de nappes en papier, même si de bizarres nappes à carreaux sont apparues sous le papier. J’ai usé là quelques culottes courtes, puis quelques pantalons en flanelle à pinces années 80, alors que j’étais lycéen dans le quartier, j’y ai été longtemps infidèle, et maintenant j’y retourne de temps en temps, notamment pour ces grands ravioli maison, farcis de viande, nappés de beurre à la sauge. Évitez de les demander au ragù, il est très très bon, le ragù, mais viande sur viande, ça ne va pas, il faut la caresse du beurre, le parfum de la sauge, le poudré du parmesan, tout est là où il doit être. Ne vous égarez pas à commander ici un plat postmoderne, genre “tagliata de bœuf à la roquette”. Si vous sortez un tant soi peu des classiques historiques de la maison et des plats du jour riches et gourmands, la sortie de route guette, on vous aura prévenus.

43 rue Archimède, 1000 Bruxelles, 02.734.92.36

Les croquettes aux crevettes du Mayeur

De Mayeur, à Ruisbroek, le long de la ligne TGV, entre maison bourgeoise et fermette post-modernisée, accueille depuis plus de cinq ans le chef Patrick Vandecasserie, longtemps chef de la Villa Lorraine avec son père le géant Freddy. Les Vandecasserie continuent à faire ici la cuisine qu’ils aiment, classique, avec de beaux produits, de la viande, du poisson, des sauces, des soufflés, du tournedos Rossini ou du faisan à la brabançonne… Et les croquettes aux crevettes. Ici on les maîtrise à la perfection. De la bisque — oui elle est bisquée ici la croquette — et une texture qui fait que l’intérieur coule gentiment à l’attaque de ta fourchette, et quelques petits trucs encore que l’on ne révélera pas. On ne vient pas ici pour ne manger que des croquettes aux crevettes, mais jamais je n’y viens sans me laisser tenter par (au moins) une petite, histoire de bien commencer un vrai repas épicurien.

339 Fabriekstraat, 1601 Ruisbroek, 02.331.52.61, www.demayeur.be

La côte à l’os de la Table du Boucher

On est à Mons, dans le centre-ville, ça s’appelle la Table du boucher, et on sait déjà donc que l’on va manger de la bidoche, c’est marqué sur l’emballage. La Table du boucher est une brasserie décorée en brasserie, sans énorme personnalité, mais propre sur soi et bien rangée, un restaurant qui tourne. La Table du Boucher n’est pas uniquement un restaurant “à côtes”, il y a notamment un alléchant menu Bib Gourmand à 37 €, mais, surtout si c’est une première, je ne saurais trop vous conseiller d’attaquer “sur” une côte de bœuf en direct, oui, sans entrée, une belle Holstein, par exemple, ça vous en laissera sous le pied pour vous réjouir des frites, des chicons, de la sauce béarnaise. Car à la différence d’autres enseignes “à viande” l’expérience est ici totale, de la bidoche aux chicons en passant par les frites (on vous propose aussi un rare aligot), ça mérite d’y consacrer tout un appétit. Le chef-patron, Luc Broutard, est un passionné intense de son métier (il dirige d’autres enseignes de la cité du Doudou) et quand la passion t’arrive dans l’assiette via la main du chef qui est aux commandes, il y a comme un goût en plus.

49 rue d’Havré, 7000 Mons, 065.31.68.38, www.latableduboucher.be

Le bibimbap de Maru

On le dit depuis quatre ans, la cuisine coréenne, c’est la cuisine  du moment, la nouvelle tendance, prête à ringardiser la japonaise. Bon, il faut le dire vite car les restaurants coréens ne se multiplient pas vraiment. Mais certains, comme Maru, ont trouvé leur clientèle, fidélisée à l’umami particulièrement intense qui se dégage des préparations de ce spot coréen ixellois plutôt sympathique. Le bibimbap, c’est le plat national coréen. Du riz cuit, posé dans un bol de pierre chauffé à blanc, avec des légumes, un œuf, de la viande en option et le condiment gochujang, cette pâte pimentée et savoureuse qui fait passer le piment d’Espelette pour de la poussière rouge sans saveur. On vient touilloter dans le bol pour vous, pour aboutir à une sorte de riz sauté plutôt grillé, un de ces plats que tu mangeras en plat unique avec d’autant plus de joie que tu l’as commandé
à midi, qui te ravit les sens et l’appétit sans te mettre en état de sieste postprandiale.

510 chaussée de Waterloo, 1050 Ixelles. 02.346.11.11, www.facebook.com/marubrussels

Les tagliatelle al ragù d’Osteria Bolognese

Ici on rentre dans une secte, les “ennemis irréductibles du spaghetti bolognaise”. Oui, Giacomo Toschi, le patron, est Bolognais et il s’est donné une mission, rendre à Bologne ce qui est à Bologne, à savoir, remettre le ragù (la bolognaise, comme on la fait à Bologne, donc le ragù alla bolognese) sur les tagliatelle et non sur des spaghetti. Mais surtout, son ragù, dont la recette a légèrement évolué il y a quelques mois depuis l’arrivée d’un chef bolognais pur jus, il est comme là-bas. Même, il est mieux que dans la plupart des restaurants de là-bas. N’attendez pas une assiette inondée de sauce, non, le ragù, c’est un peu liquide mais pas trop, riche en viande, avec un vrai goût de bœuf concentré parce que l’on a laissé le temps opérer, et il t’offre ce moment magique, cette première bouchée qui est toujours la meilleure, où la tagliatelle chaude lovée sur la fourchette, emprisonne la juste quantité de ragù, attrape le parmesan. Et là, c’est la petite mort, et je pèse mes mots.

49 rue de la Paix 49, 1050 Ixelles, 02.608.51.54, www.osteriabolognese.be

La mousse au jambon Pierre Wynants du Comme chez Soi

Ce monument d’histoire de la gastronomie belge — plus de soixante ans d’étoile au compteur — a fêté ses 90 ans en 2016. On s’accorde à dire que Lionel Rigolet a su insuffler son style — via de très belles réalisations créatives et actuelles — tout en préservant quelques très grands classiques que l’on commandera à la carte; car ici on est dans un étoilé où on peut encore manger à la carte, ça devient rare. Parmi ceux-ci, la sole au riesling, un monument et, la célèbre “mousse de jambon Pierre Wynants”. Quoi, une mousse de jambon dans un bi-étoilé Bibendum ? Oui, tout à fait, une mousse de jambon, mais quelle mousse de jambon ! C’est le genre de plat simple qui a dû être pesé au centigramme, et puis il y a cette coutume délicieuse de la “repasse”. Tu commences ta mousse, tu fermes les yeux tellement c’est bon et le service repasse avec la terrine t’en proposer une rawette en plus, juste un peu de bonheur supplémentaire…

23 place Rouppe, 1000 Bruxelles, 02.512.29.21, www.commechezsoi.be

Le poulet du 97 rue Piervenne

97 rue Piervenne, à Ciney, c’est un restaurant dans une maison qui est un restaurant ou le contraire, on ne sait plus. On cherche, mais alors que l’on pouvait craindre le style table hôte, c’est un vrai resto, pas d’hésitation. On prend l’apéritif en cuisine, puis on s’installe dans la salle à manger qui est, donc, une vraie salle de restaurant, à la déco un peu chargée, mais on se sent comme à la maison, en mieux, vu que — au risque de me répéter — on est bien dans un vrai restaurant ! Ici on fait de la cuisine bourgeoise comme dans le temps, et un des points forts du chef, c’est le poulet. Enfin, le coucou de Malines, en cocotte, magnifiquement servi au plat. Il est beau comme un camion, parfaitement cuit, servi avec salade mayo et frites au couteau. Un poulet pour deux, du jus de cuisson, des champignons, c’est si bon. Le chef vous le découpe en salle, on se croirait à la maison, en mieux, on l’a déjà dit.

97 rue Piervenne, 5590 Ciney, 083.21.61.51, www.facebook.com/G.VanCrom

Le steak de cheval de la Péniche

C’est un endroit qui ressemble à quelque chose qui n’existe plus à Bruxelles avec, comme on dit parfois avec de mauvaises intentions, un côté “bruxellois de souche”. Ici on en tiendrait plutôt une, de couche, tant le lieu, un bistrot bringuebalant où on mange vraiment, affiche une vétusté assumée mais pas forcément en pleine conscience… Pour tout dire, ça confine un peu au brol. La charmante hôtesse des lieux parle encore un peu bruxellois, le patron est en cuisine, on est tout de suite juste bien et le menu du jour se compose de stoemp saucisses, d’immenses soles, de steak et surtout d’un de mes dadas, j’ai nommé le steak de cheval, henni soit qui mal y pense. Je le demande à l’ail, on me répond What else ? et je reçois ce pavé de cheval, avec le jus de cuisson, le genre à base de beurre un peu tout à fait brûlé (d’ailleurs, est-ce du beurre ?), avec les morceaux d’ail dedans… Réservé aux initiés mais si, comme moi, vous êtes amateur du genre, allez-y ! 

37 quai au Bois à brûler, 1000 Bruxelles. 02.219.13.93

Le miso katsu ramen du Yamato

Les ramen (nouilles japonaises) sont partout; un paquet d’enseignes se sont ouvertes depuis quelques années, mais Yamato était le premier. Le chef ayant pris sa retraite il y a quelques années, Yamato est resté quelque temps fermé puis a été repris par le patron de Menma, un autre ramen-shop de la capitale. Sauf que, alors que les ramen deviennent de plus en plus sophistiqués (on en a même vu au homard), le chef n’a pas changé d’un iota les recettes originelles de Yamato, et notamment le miso katsu ramen. On décode : miso = bouillon additionné de pâte miso (pâte de haricots salée, qui donne ce goût “umami” si intense au bouillon) ; katsu = porc pané ; et ramen, tout le monde sait maintenant que ce sont les nouilles japonaises. J’en ai mangé des ramen, des bols et des bols, mais cette version simpliste au porc pané me ramène vingt ans en arrière quand je découvrais pour la première fois avec émerveillement ce magnifique plat japonais ! Et si comme moi vous êtes vraiment fan de porc pané, il se décline aussi en version sur bol de riz, tonkatsu.

11 rue Francart, 1050 Ixelles 02.511.02.00, www.facebook.com/yamatobelgique