Philippine Leroy-Beaulieu, au top de son sex-appeal à 58 ans grâce à "Emily in Paris"

Rencontre exclusive à Paris avec l’actrice française, que l’on redécouvre grâce à la série phénomène, où elle incarne avec assurance cette génération de femmes qui s’imposent de plus en plus comme des icônes de style et des figures de l’anti-jeunisme.

Par Cora Delacroix. Photos Netflix. |

Elle nous rejoint en fin de matinée au café de Flore, à Paris. Cheveux lâchés et visage nu, elle arrive à vélo pour notre rendez-vous au premier étage du café mythique du quartier de Saint-Germain-des-Prés.

La vidéo du jour :

Son agente nous avait prévenus : les demandes d’interviews affluent pour Philippine Leroy-Beaulieu. La cause ? Le succès mondial d’« Emily un Paris », la série romantique créée par Darren Star, le producteur à qui l’on doit déjà « Sex and the City », dont la seconde saison est sortie sur Netflix en décembre dernier. La popularité du show profite à ses interprètes, dont l’actrice française, qui a vu sa cote grimper en quelques mois. Un exploit à 58 ans pour un second rôle. Si vous n’avez pas vu la série : Philippine Leroy-Beaulieu y incarne Sylvie Grateau, une Parisienne hautaine à la tête d’une agence de marketing de luxe, Savoir, qu’intègre la jeune Emily, l’Américaine (incarnée par Lily Collins) fraîchement débarquée dans la capitale. La série, même si l’on y découvre un Paris pas franchement réaliste et divise, est un carton international ! D’après la plateforme, la première saison a été visionnée par près de 58 millions de foyers à travers le monde.  

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Désormais suivie par plus de 350 000 abonnés sur Instagram, l’actrice baigne depuis l’enfance dans le monde du cinéma et celui de la mode.

Le ciné dans le sang

Sur Instagram, où Philippine Leroy-Beaulieu est, elle, désormais suivie par plus de 350 000 personnes, les fans de la série lui demandent notamment ses secrets de beauté, mais surtout « Quand sortira la troisième saison ? », qui est d’ores et déjà prévue mais pas encore datée.

Si les Anglo-saxons la découvrent par ce biais, Philippine Leroy-Beaulieu est, de ce côté de l’Atlantique, une actrice dont le visage nous est familier. On l’a vue toute jeune dans la saga « L’amour en héritage », et au cinéma, elle a tourné pour Andrzej Wajda, Philippe De Broca, Coline Serreau, Jean-Jacques Annaud et même, James Ivory…

Au côté de Lily Collins dans Emily In Paris : “Jouer la méchante, c’est amusant, car on peut tout dire !“

L’un de ses derniers cartons sur les réseaux sociaux fut le post d’une vidéo retrouvée par les archives de l’INA (Institut National de l’Audiovisuel), dans laquelle elle chante et danse sur le plateau de « Champs Elysées », l’émission phare de Michel Drucker, à l’occasion de la sortie du film « Surprise Party » de Roger Vadim. On est en 1983 et elle va avoir 20 ans. Deux ans plus tard, la jeune Philippine Leroy-Beaulieu explosera dans « Trois hommes et un Couffin », qui lui vaudra d’ailleurs une nomination aux César. La comédienne tournera ensuite dans de nombreux films et séries et deviendra un visage familier du cinéma français, mais c’est son rôle de Catherine Barneville dans la désormais série culte « Dix pour cent » qui lui a offert un regain de visibilité en 2015 et relancé sa carrière de femme mature, de Parisienne élégante et sexy.

Le cinéma, elle a toujours baigné dedans. Fille de l’acteur Philippe Leroy, elle a passé les dix premières années de sa vie à Rome. « Il y avait un foisonnement artistique très fort », se souvient-elle. « C’était une enfance à la fois toute simple mais quand même un peu particulière. C’était un milieu où il y avait une grande folie et liberté ». Lorsque ses parents divorcent, elle déménage à Paris, elle a alors 11 ans. Ado, celle qui affirme avoir toujours voulu être actrice côtoie de près le milieu de la mode : aux côtés du couturier Marc Bohan, sa mère crée de la maille et des accessoires chez Dior. Ce qui explique en partie comment elle a su, en 2020, cerner et endosser le rôle de Sylvie, car des femmes comme elle, des femmes de tête un peu distantes et arrogantes, elle en a connu ! « Elles étaient très vulnérables en fait, elles avaient peur de perdre le pouvoir », nous glisse-t-elle.

Comment expliquer l’engouement autour du personnage de Sylvie Grateau ? « Elle exprime une certaine arrogance, une violence, et une vulnérabilité qui va avec, un système de défense que les gens reconnaissent et je pense que cela les amuse »,  explique Philippine Leroy-Beaulieu. « Jouer la méchante c’est amusant aussi pour une actrice, car on peut tout dire. Et c’est ça qui est jouissif pour le public, surtout dans une série comme celle-ci, qui est très fleurie et où un personnage comme ça met les pieds dans le plat et casse un peu le côté caricatural de l’ensemble. »

Dans Emily in Paris, l’actrice incarne Sylvie Grateau, femme de tête, aux commandes d’une agence de relations publiques spécialisée dans le luxe.

Plus de 50 ans, et alors ?

Pour l’actrice, le rôle de Sylvie était loin d’être gagné d’avance : en effet, il était d’abord écrit pour une personne beaucoup plus jeune. Sous les conseils d’une directrice de casting, Philippine Leroy-Beaulieu passe malgré tout un essai. « J’avais l’impression de connaître cette femme », explique-t-elle. Ça matche à tel point qu’une partie du scénario est réécrite pour elle. « Ça me fait plaisir évidemment de donner de la visibilité à un personnage plus âgé. » Elle déplore qu’à partir de 40 ans, les occasions d’incarner des personnages intéressants ou sensuels pour les actrices diminuent et malgré le mouvement actuel, la réalité est encore très caricaturale. « Je pense que l’imaginaire dans le cinéma reste très orienté sexuellement, donc il y a cette espèce d’idée que les femmes sortent du marché sexuel à un certain âge, alors que les hommes en murissant sont encore très attirants et légitimes dans des rôles glamour. » A tel point que, comme dans la saison deux d’« Emily in Paris », lorsqu’une femme de plus de 50 ans sort de l’eau en bikini et se lance dans une relation avec un photographe plus jeune qu’elle, cela fait jaser la presse people et les réseaux sociaux.

Le personnage de Sylvie Grateau est dans l’air du temps, on la voit sortir de l’eau en bikini sans aucun complexe...

Depuis la sortie de la deuxième saison, Philippine Leroy-Beaulieu serait-elle devenue un nouveau « sex-symbol » pour toutes générations ? Récemment, lors d’un défilé de la marque Ami, les clichés d’elle portant une robe verte près du corps et transparente (surtout à cause des flashs), accessoirisée d’une mono boucle d’oreille, ont fait le tour de la Toile, de « The Telegraph » à « Harper’s Bazaar ». Ici encore, ce n’est pas la tenue, mais l’âge de celle qui la porte qui fait débat. « Je suis étonnée que ça ait pris autant d’ampleur », s'amuse-t-elle. « Ok je vois… On se dit, elle a 58 ans et elle ose ! » Il n’empêche : elle est optimiste et persuadée que la situation concernant le regard que l’on porte sur les femmes et leur âge est tout de même en train d’évoluer. Il suffit de voir le succès remporté par le reboot de « Sex & the City » pour constater que le public accroche, même si les réseaux sociaux ont encore la dent dure et si le jugement reste prompt lorsqu’une femme est ridée, grisonnante ou qu’elle prend un peu de poids.

La robe moulante et transparente qu’elle portait lors du défilé Ami a fait le tour de la Toile.

La comédienne affirme qu’en prenant de l’âge, on se moque de plus en plus de ce que pensent ou disent les autres. D’ailleurs, sur Instagram, elle nous raconte qu’elle poste sans stratégie particulière. Elle n’est pas très à l’aise avec le concept des selfies. «On gagne toujours à être regardé par quelqu’un d’autre. Je me dis qu’il faut se servir d’Instagram comme un pirate, c'est-à-dire avec une certaine audace et innocence. »

Femme du monde

 « J’ai plutôt confiance en la vie », glisse l’actrice, qui dégage une certaine décontraction et qui, quand elle ne tourne pas, aime voyager. Dans les années 1990, elle passe beaucoup de temps au Brésil. « Je m’y suis tout de suite sentie chez moi. C’était un peu ma terre privée. » L’actrice est polyglotte ; elle parle cinq langues. « Parler la langue d’un pays, c’est rentrer dans le fondement de comment les gens pensent la vie dans un pays. Quand on veut vraiment comprendre un pays, je pense qu’il faut commencer à comprendre sa langue. » Si elle n’avait pas été actrice, elle aurait sans doute fait quelque chose autour du voyage, « on ne dit plus vraiment exploratrice » sourit-elle, en lien avec la photo car elle aime bien créer des images. Ce dont elle a envie pour la suite ? D’une troisième saison d’Emily explosive bien sûr, mais aussi de jouer des rôles qui n’ont rien à voir avec la figure de la bourgeoise parisienne. L’actrice aime le contre-emploi, assume son âge et incarne une image résolument différente de la quinquagénaire. Un changement de paradigme dans le monde des séries et du cinéma ? « On dirait bien ! », conclut-elle !

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