Rencontre avec trois collectionneurs de garde-temps

Ils aiment les belles montres, les collectionnent et en parlent avec passion

Par MAGALI EYLENBOSH. Photos : DR. |

Pierre Degand

Le plus célèbre et le plus prisé des tailleurs bruxellois, est devenu une référence en matière de goût et d’élégance. Une belle montre se révèle être avant tout l’accessoire indispensable qui achève une tenue. La choisir est un art.

Vous souvenez-vous de votre première montre ?
Absolument ! Je devais avoir 16 ans. J’avais acheté une Omega chez un bijoutier avec mes économies. Je l’ai choisie parce qu’elle était élégante, fine et raffinée. Hélas, on me l’a volée.

Que demandez-vous à une montre ?
Qu’elle soit sobre, élégante, non ostentatoire et faite dans une manufacture de tradition. Je n’achète pas une montre pour sa marque, j’exige un label de qualité et je suis sensible au travail des artisans. J’ai la même philosophie en affaires. 

Vous y connaissez-vous en mécanique horlogère ?
Non, j’aime l’objet, mais je ne m’y connais pas particulièrement en mécanique. J’ai eu l’occasion de rencontrer François-Paul Journe et j’ai passé un excellent moment. C’est un homme passionné par son métier.

Connaissez-vous les complications horlogères ?
Ce n’est pas un critère de choix. Je veux qu’elles donnent l’heure et la date. Je suis quelqu’un de très classique.

Quelles sont les montres que vous possédez ou que vous affectionnez ?
J’ai une Breguet, une F.P.Journe,…. Il y a toujours une histoire derrière les montres que je possède. J’en ai reçues de mon épouse, ou j’en ai achetées parce qu’elles appartenaient à quelqu’un que j’admire et qui est décédé. Il faut faire la différence entre une montre qui a de la valeur et une montre qui a une valeur sentimentale et qui du coup devient un objet très important. 

Les portez-vous ou les laissez-vous dans un coffre ?
Je les porte en fonction de mes tenues. J’ai différentes montres pour le smoking, j’en ai pour le week-end, d’autres pour travailler. 

Est-ce que vous aimez remonter votre montre ? 
Celle que je porte le plus souvent est automatique, je n’ai donc pas besoin de la remonter. Celles que je mets le week-end, je les remonte avec plaisir. C’est une gestuelle traditionnelle. On y revient toujours !

Jean-Paul Masse de Rouch

Talentueux collagiste, mais aussi journaliste et écrivain, Jean-Paul Masse de Rouch cultive l’art de vivre entouré de belles choses. On peut admirer sa dernière exposition,  Travellings 3, un reflet et une réflexion sur ses récents voyagnes, notamment en Amérique Centrale et latine, au 9Hôtel Sablon jusqu’au 15 novembre.

Vous définissez-vous comme un collectionneur ?
J’ai pas mal de montres. Pour un homme, c’est le bijou le plus évident à porter. Un accessoire indispensable. Regarder l’heure sur une montre, ce n’est plus un besoin, mais un plaisir. J’en change en fonction de ce que je porte.

Vous souvenez-vous de votre première montre ?
C’était une Longines rectangulaire et assez plate. Ma grand-tante me l’avait offerte pour mes 12 ans. Je l’ai toujours !

Quelles sont les montres que vous possédez ou que vous aimez ?
J’ai plusieurs montres Cartier, plusieurs Rolex, une Panerai que j’aime beaucoup. J’ai aussi une Hermès, une Gucci, une Dior, une Pomellato,…. Parfois j’achète des montres qui n’ont pas forcément de la valeur mais dont j’aime l’esthétique.

Êtes-vous sensible à la mécanique horlogère ?
Pas vraiment ! Je suis plus attaché à l’esthétique de l’objet. Mais ça m’intéresserait d’en apprendre d’avantage.. 

Portez-vous vos montres au quotidien, même si elles ont de la valeur ?
Sans aucun doute ! Elles sont faites pour ça. J’ai une Rolex Yacht-Master en or et je la porte très souvent.  

Porter une montre, est-ce aussi afficher certains valeurs ?
Certainement. Lorsqu’on porte une montre Cartier, on sait qu’il s’agit d’un très bel objet, fabriqué par une grande manufacture dans le respect de la tradition. Idem pour Panerai qui a toute une histoire, notamment en tant que fournisseur de la marine italienne. Dior ou Gucci ne sont pas des maisons horlogères au sens propre du terme,  lorsqu’on achète l’une de leurs montres, on ne le fait pas pour le savoir-faire horloger. Même si elles sont de bonnes qualité. 

Faut-il donner envie aux plus jeunes de s’intéresser à l’horlogerie ?
La plupart des jeunes que je fréquente, en tout cas ceux qui ont une vingtaine d’années ont en général une belle montre et s’y intéressent. Je n’ai pas la sensation que ce soit désuet. Même si à 12 ans, on préfère recevoir un smartphone plutôt qu’une montre. 

Antoine Rauis

Avocat de formation, Antoine Rauis a fait de sa passion son métier. Il chine aux quatre coins du monde les montres vintages les plus rares et les revend dans ses enseignes de Bruxelles, Luxembourg, Paris ou Ibiza.

Quelle est la première montre dont vous vous souvenez ?
Toutes mes économie sont passées dans l’achat d’une Omega Speedmaster. Les Italiens prennent leurs vacances le 15 août et j’avais été la négocier la veille afin d’obtenir la montre que je voulais à un meilleur prix parce que je n’avais pas tout à fait le budget pour me la payer. J’ai harcelé un pauvre commerçant milanais jusqu’à ce qu’il cède. (Rire) 

Vous saviez déjà ce que vous vouliez ?
J’étais déjà mordu. À l’époque, il n’y avait pas de magasin de montres d’occasion en Belgique et Milan était le pôle le plus développé dans ce secteur.

Votre passion est devenue un  métier…
J’ai commencé à collectionner et à revendre à partir de ce moment-là. La quête et l’achat m’excitent plus que la possession. Très vite, je m’intéresse à une autre cible. Quand Internet a commencé à se développer, j’y passais des heures.  Ça a énormément facilité les échanges au niveau international. Il y a des forums de collectionneurs et ça a donné un coup d’accélérateur à l’activité. D’autant que l’on recherche chaque fois une pièce plus rare et plus chère. J’avais plus envie d’en faire mon métier que de bosser comme avocat.

Vous êtes un passionné de mécanique ?
J’aime la mécanique quel que soit le secteur. Les voitures me passionnent aussi. Cela dit, le marché de la montre d’occasion n’est plus orienté vers les complications. Les montres les plus chères sont plutôt les plus rares, avec un bon pédigrée. Des montres qui se vendaient parfois très mal à l’époque, mais sont devenues mythiques, comme la Rolex Paul Newman. Dans le marché des montres neuves, les marques essaient de valoriser ces complications horlogères. C’est souvent un argument marketing qui permet de vendre les montres très chères. 

Y a-t-il une montre dont vous rêvez ?
Si je pouvais envoyer une lettre au Père Noël, je lui demanderais un Quantième Perpétuel Padellone de Patek Philippe en or rose et platine des années 70. C’est très rare !