Spotted by Ingrid | Les baskets Vuitton-Nike valent-elles vraiment 350 000 dollars ?

La vente de 200 paires de baskets Vuitton-Nike dessinées par Virgil Abloh a totalisé ce jeudi 25 millions de dollars. La plus chère atteignant 350.000 dollars. Doit-on s’inquiéter de ces sommes folles ? Est-ce bien raisonnable ? Notre rédactrice en chef Ingrid Van Langhendonck s'interroge sur le succès fou de ces baskets. 

PAR INGRID VAN LANGHENDONCK. PHOTOS D.R. |

J’ai donc suivi ces enchères particulières hier soir via le site de Sotheby’s, et il faut bien dire que ce fut électrique. Chaque paire a été vendue en moyenne plus de 100.000 dollars, la plus chère atteignant plus de 350.000 dollars. Les 200 paires de l'iconique Nike Air Force 1 customisée par Virgil Abloh pour Vuitton ont été mises aux enchères avec un prix de départ de 2.000 dollars. Chaque paire était proposée emballée dans un étui Louis Vuitton au coloris orange emblématique de la marque. 
La vente était très attendue et le décès récent du créateur aura fait monter l’intérêt pour les collectionneurs, on le sait, la cote d’un artiste monte singulièrement après sa mort… Ce qui est vrai pour les peintres l’est aussi pour tous les designers. Mais que doit-on penser de ces montants astronomiques ? Le monde de la mode est-il devenu fou ? Ces chaussures valent-elles vraiment des telles sommes ?


Les partisans du oui

Les collectionneurs et les fans du designer étaient en ébullition et, on le sait, le marché de la basket est devenu un nouveau mode de spéculation. Les partisans de ce phénomène vous diront que ces 200 baskets ont été vendues en ligne au bénéfice d'une œuvre caritative, ce qui leur confère une aura exempte de nombreux reproches. A ce stade, on ne parle pas d’une paire de baskets, mais d’une véritable œuvre d’art, la signature de Virgil Abloh, une édition limitée donc une rareté certaine : autant d’arguments pour considérer l’achat d’une telle paire comme un investissement, comme on achèterait un objet de design ou une peinture. A ce stade, Virgil Abloh est au sommet de sa gloire : son design, son approche et ses créations agitent notre époque et pour beaucoup, ce succès est légitime.

Est-ce vrai ? Je n’aurais pas la prétention de l’arbitrer. C’est le marché qui dicte sa loi et au final, seul le temps nous dira si ces pièces prennent de la valeur avec les années. On le sait, certains sacs, certaines pièces de haute-couture ont, elles aussi, été considérées et commercialisées comme des œuvres d’art, certaines sont entrées dans nos musées et je ne serais pas étonnée qu’il en soit de même pour ces sneakers. 

La vidéo du jour :

Les partisans du non

Pour d’autres on marche sur la tête : deux marques commerciales, deux géants du marketing qui jouent aux marchands d’art, c’est une imposture. Ainsi, la stratégie qui consiste à starifier un jeune designer à grands coups de campagnes marketing, et à accoler son nom sur n’importe quoi pour faire le buzz est critiquée par certains observateurs. Je suis souvent impressionnée par le pouvoir broyant de ces machines de guerre que sont ces grandes marques et leurs opérations de buzz marketing bien huilées.

Pour ma part, je fais partie de ceux qui estiment que quand Karl Lagerfeld dessine pour H&M, ce n’est pas du luxe, mais qu’on nous le vend comme tel. Et c’est vrai qu’on nage ici dans la quintessence de la pop culture. Celle-là même que dénonçait Andy Warhol en peignant de grandes boites de soupe, nous interpellant sur l’idée que nos objets du quotidien, que certains aspects purement commerciaux de notre univers devenaient de nouvelles icônes malgré nous.

En conclusion, pour cette paire de baskets, comme pour les œuvres d’art, si vous en avez les moyens et que vous en avez envie, faites-vous plaisir. Mais pour ces baskets, comme pour les œuvres d’art, certains n’en ont que faire de l’affectif et ne sont que dans la spéculation ; et c’est cet aspect qui nous laisse un goût plus amer.

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