Marbre, granit, quartzite,... Quel type de pierre choisir pour son intérieur ?

Marbre, granit, quartzite : ces matériaux millénaires séduisent de plus en plus nos intérieurs. Trois spécialistes nous en parlent.

Par Agnès Zamboni. Photos D.R. sauf mentions contraires. |

Cromarbo revitalise une tradition familiale 

Dans l’entreprise fondée par ses grands-parents en 1937, Isabelle Croonenberghs travaille avec son frère Bruno. Dernier grossiste belge de pierre naturelle, en Wallonie, Cromarbo s’adresse à une clientèle belge, luxembourgeoise et française (architectes, particuliers comme professionnels, maîtres d’œuvre et même marbriers…). Car Isabelle et Bruno se sont donnés la mission de faire redécouvrir la magie naturelle de la pierre à une large clientèle. 

Des matières infinies

« Le marbre est une roche calcaire dure et compacte mais sensible aux acides. Ses veines aléatoires provoquées par des inclusions métalliques rendent chaque panneau unique. Le granit, lui, est une roche magmatique d’une grande dureté, inaltérable insensible aux acides, mais ses dessins moins spectaculaires sont aussi moins prisés. Le marbre se patine, mais pas le granit. L’onyx est une pierre calcaire, souvent translucide et donc rétro-éclairable avec des dessins de strates, un aspect enrubanné ou nuageux.

Quant au quartzite, composé d’une grande quantité de quartz, il possède une grande dureté, similaire à celle du granit, mais l’éventail de ses dessins et couleurs est très impressionnant et il peut être aussi magnifié par un éclairage », raconte Isabelle toujours fascinée par les nouvelles pierres débusquées au Brésil, en Turquie, en Iran, en Inde… Ici, les harmonies de bleu et de brun du quartzite Santorini brésilien, les accents verdoyants du marbre Forest green ramené d’Inde, ressemblant à s’y méprendre à un gigantesque cliché aérien d’une forêt, ou ceux de la variété Forest brown, véritable plongée microscopique dans les fibres du bois, côtoient la blancheur du Statuairo italien. 

Quant aux marbres belges, ils ont connu leurs heures de gloire : « Le marbre rouge royal (et rouge griotte) comme le gris de l’Ardenne, sa couche supérieure, proviennent de la même carrière, près de Philippeville. Il ne faut pas oublier le noir de Mazy, le noir le plus dense et pur au monde. La dernière carrière en extraction est à Vodecée ».

Mais les pierres ne révèlent leur beauté cachée et intrinsèque qu’après l’intervention de l’homme et l’étape du polissage qui les subliment et les protègent : Sur la surface brillante ou mate, adoucie ou sablée, les teintes douces ou denses, vives ou nuancées, propres à émerveiller nos yeux explosent. Et pour nos sols, murs, cheminées, habillages de salle de bains, crédences et plans de travail en cuisine … ces merveilles nous inspirent tant d’idées pour embellir nos intérieurs 
mycromarbo.com
 

Sébastien Caporusso explore les filons rares

Architecte d’intérieur, formé au CAD d’Uccle, Sébastien Caporusso a commencé à créer du mobilier à travers des réalisations sur mesure et pièces uniques destinées à une clientèle privée. Aujourd’hui, ses projets audacieux vont encore plus loin et consacrent la majesté des textures naturelles comme celles du marbre. La pierre, il l’attaque au chalumeau ou la découpe en petits morceaux pour révéler ses plus belles flammes. 

Révéler l’exceptionnel

Depuis quelques années, il récupère et stocke des fragments de tranches et de blocs massifs pour se constituer une « matériothèque » personnelle. Dans ses trésors, il puise pour réaliser ses propres créations, dessinant sur un morceau de pierre une forme qu’il découpe lui-même ou confira à un spécialiste pour une découpe au jet d’eau. Et rien ne se perd : les petits cassons, il les intègre à une matière qu’il coule et moule avec ses propres moyens, un ciment truffé de fragments de pierre, métal, billes de verre, coquilles de moule, éléments plastique… « On a trop tendance à vouloir adoucir le marbre. Je le préfère lorsqu’il est bouchardé, flammé, brossé… et qu’il se distingue du toucher plastifié que produit le polissage classique. J’essaie de faire ressortir sa structure, révéler son caractère unique ».

Sébastien choisit les marbres pour leurs particularités, retaille dans les panneaux débités pour se focaliser sur une veine particulière, un dessin et compose des sortes de mosaïques créatives. Pour sa table Hahen au plateau formant un terrazzo géant, dans une harmonie de bleus et de verts, il a imaginé un piètement composé de lambris de lattes de marbre et de lattes de bambou. « Je me suis chargé personnellement de la sélection, de la découpe et de l’assemblage de cette pièce, à la suite de la création d’échantillons ». Les marbres sont souvent travaillés en contraste, avec d’autres matériaux comme le bois, mais aussi en combinant plusieurs veinages. Ainsi les appliques Eclipse, qui s’emboîtent l’une dans l’autre, révèlent des effets de perspectives et de profondeurs. « Je joue avec les défauts de la pierre qui deviennent des qualités, je combine des veinages travaillés plus sombres avec des dessins plus plats et plus clairs ». 

A découvrir sur le PAD Paris, du 7 au 11 avril, 2021, à Collective Design Fair Monte-Carlo, du 30 avril au 2 mai 2021 et Collective Design Bruxelles, du 27 au 30 mai 2021. sebastiencaporusso.com

Ben Storms tutoie les limites de l’impossible

Tailleur de pierre, sculpteur et menuisier, autant que designer, Ben Storms a étudié l’Histoire de l’Art à l’université de Gand. La passion des matières, il l’a attrapé dans l’entreprise de ses parents, antiquaires du bâtiment et récupérateurs de matériaux anciens. « En plus de mes cours, j’ai appris à travailler le bois et la pierre, en me formant le week-end et pendant les vacances scolaires dans des ateliers d’artisan ». Après une collaboration avec le plasticien et sculpteur de polyester belge Nick Ervinck, il entreprend une formation de design à Malines, puis montre ses premières pièces à Milan, à Berlin. Depuis son exposition à l’Atelier Jespers à Bruxelles, en 2015, ses créations ont jeté le trouble, offrant un œil neuf sur le marbre, qui lui a notamment permis d’obtenir le fameux prix Henry Van de Velde.  

Des créations déroutantes 

Il pose des panneaux sculpturaux et monumentaux sur des coussins d’air aux enveloppes métalliques. Quand le lourd devient léger (et vice-versa), les repères sont perturbés. Pour créer des formes extrêmes et inverser les impressions visuelles, Ben Storm associe sa réflexion à des processus de haute technologie. « Mes méthodes de travail combinent les techniques anciennes et manuelles, comme le ponçage laborieux, avec la numérisation et la sculpture digitale CNC. Pour réaliser la table Ex Hale, j’ai fabriqué un moule en métal gonflé d’air. J’ai scanné cette forme en 3D pour la reproduire dans un bloc de marbre grâce à une machine CNC. Les finitions à la main et le sablage sous pression adoucissent la matière qui évoque le tissu patiné d’un coussin, l’illusion d’un textile imprimé.

Pour obtenir la finesse du plateau de la table In Vein d’une épaisseur de seulement 4 mm, tout en conservant la solidité de la pierre, je l’ai renforcée en son centre et j’ai augmenté l’épaisseur de la matière de 4 à 5 cm ». Et pour composer ses tables In Hale, installées en parfait équilibre sur un coussin métallique, Ben Storm fabrique d’abord les deux parties de l’enveloppe. Ils les soudent ensemble, comme une housse, en laissant une ouverture pour les remplir d’air alors que la plaque de marbre est déjà en place. Et il vient de mettre au point un paravent et une collection de luminaires qui revisitent les techniques de fabrication des tambours. Poétiques et élégantes, les expérimentations de Ben Storm n’ont pas fini de nous surprendre. 

A Bruxelles, solo show en mars 2021 à la boutique Natan, rue de Namur, et à Collectible du 27 au 30 mai 2021. benstorms.be

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