S'offrir des oeuvres d'art Andy Wahrol à prix abordable, c'est possible

Accrocher une oeuvre de Warhol, Basquiat ou Jeff Koons... chez vous, à prix abordable et pour une bonne cause ? C'est possible avec THE SKATEROOM, qui propose des reproductions d'oeuvres d'art sur des planches de skate. Un concept qui rencontre un succès fou !

Par Marie Honnay. Photos D.R. sauf mentions contraires |

Charles-Antoine Bodson parle vite, très vite. Tout comme ses quinze collaborateurs, jeunes pour la plupart, qui officient dans le QG de THE SKATEROOM : un grand loft planqué dans une ancienne usine de peinture à Forest. Quand il s’agit d’agiter la capitale, ces "secoués du bocal" n’ont de leçon à recevoir de personne. Sous le motto We value art, we value skate, we value social change, le projet d’œuvres d’art sur planches de skate, lancé il y a sept ans par Charles-Antoine Bodson, a mobilisé tellement de grands noms que cet article aurait pu se limiter à une interminable démonstration de name dropping : Jeff Koons, JR, Mark Gonzales, Paul McCarthy, Ai Weiwei, la fondation Basquiat ou Warhol… Mais comment, au juste, ce fils d’hommes d’affaires a-t-il bien pu convaincre ces artistes ou leurs descendants de lui céder les droits de certaines de leurs œuvres ? Des œuvres imprimées sur des planches de skate et vendues en édition limitée. En ligne, mais aussi dans des lieux prestigieux comme le MoMA de New York. Étrange ? Oui, un peu. Sauf, évidemment, quand Charles-Antoine Bodson vous raconte son incroyable histoire. Une histoire qui commence par une lubie d’enfant gâté. Je ne suis pas un skateur. Je collectionnais juste les planches d’artistes, commence le quadragénaire. Par amour de l’art, ajoute-t-il d’emblée comme pour souligner la sincérité de sa démarche. Ce que j’apprécie dans l’art - et dans la vie tout court -, ce sont les rencontres. J’aime la sincérité des artistes, leur capacité à questionner le monde.

La vidéo du jour :

Une histoire de rencontres

Un jour, par hasard, j’ai rencontré l’Australien Oliver Percovich, fondateur, en 2007, de Skateistan : un projet qui vise à construire des skateparks dans des lieux où ce sport devient, pour les jeunes qui le pratiquent, un moteur de développement, de (re)scolarisation et d’ouverture vers le monde. Comme j’avais déjà dans l’idée de vendre une partie de ma collection, j’ai décidé de contribuer à ce projet en reversant 30% du bénéfice de cette vente à Skateistan. Séduit par l’engagement de Percovich, le Belge décide de fermer sa galerie d’art et de se consacrer totalement au projet. Il lance alors THE SKATEROOM dans l’idée d’aider Skateistan à construire davantage d’infrastructures. En Belgique, tout le monde m’a pris pour un fou. Alors, je suis allé frapper à la porte de grandes institutions - comme le MoMA - qui ont accepté de vendre nos planches. La force de Charles-Antoine Bodson, c’est évidemment son audace. Dialoguer avec les artistes, c’est la partie la plus facile du projet. Le monde de l’art est dominé par de grands enjeux financiers, mais les artistes, eux, sont dans une autre logique. Ils ont envie de mettre leur talent au service de causes qu’ils jugent justes. Certains refusent même de percevoir les royalties sur la vente des œuvres. Quand nous proposons une édition signée par une star comme Paul McCarthy, elle permet à elle seule de financer tout un skatepark. Et quand les artistes voient qu’après quelques mois, leur travail a permis, par exemple, de construire une infrastructure au Mexique, ils signent sans hésiter pour une autre collaboration. Couplé à l’incroyable travail d’Oliver Percovich, l’enthousiasme de Charles-Antoine Bodson n’a pas tardé à faire mouche. « Pour comprendre notre engagement, il suffit d’observer la philosophie du skate : un sport centré sur la débrouille, l’entraide et la solidarité. Pour nous, tout ce qui compte, c’est de voir participer aux Jeux olympiques des filles qui, grâce à Skateistan, ont démarré le skate dans un pays plutôt hostile au sport féminin.

Solidaire et accessible

Si, depuis un an, THE SKATEROOM a pris une nouvelle direction en proposant, en marge de ses éditions limitées, des œuvres uniques aux prix forcément plus élevés, les planches les moins chères - une reproduction de l’iconique Campbell’s Soup d’Andy Wharol par exemple -, peut être à vous pour environ 200 euros. Rien ne me fait plus plaisir que de voir un ado débarquer dans la galerie ou au studio avec de l’argent qu’il a économisé en lavant des voitures, ajoute Charles-Antoine Bodson. « Dans les boutiques des musées, ces éditions plus accessibles font figure de bestsellers. Or, on le sait, ces grandes institutions, se financent par le biais ce type de produits. Et ça, les artistes qui collaborent avec nous le savent. A condition qu’ils s’inscrivent dans notre démarche et qu’ils soient prêts à financer nos projets, les musées ont tout intérêt à nous faire confiance. Récemment, pour la première fois depuis le début de notre collaboration, le MoMA a décidé de communiquer sur notre mission sociale en nous réservant un corner au cœur de la boutique du musée. Preuve que les mentalités sont en train d’évoluer.

Grâce à son succès et à un récent éveil des consciences par rapport à la pertinence de son action, Charles-Antoine Bodson a été approché par une flopée de stars désireuses d’associer leur image à THE SKATEROOM. Dans les prochains mois, Chris Martin, le chanteur de ColdPlay, mais aussi l’acteur Keanu Reeves ou encore la chanteuse Dua Lipa proposeront des planches en édition limitée. Quant aux marques de mode et d’accessoires associées de près ou de loin à l’univers du skate, elles n’ont pas tardé à rappliquer, elles aussi.

Vans et les autres

Depuis la récente pandémie, on sent clairement un sursaut de solidarité. Tant du côté des initiatives privées que chez les géants de l’accessoire, précise le fondateur de THE SKATEROOM. Nous sommes sur le point de collaborer avec des marques comme Swatch et Vans ; des marques qui ont compris qu’en acceptant de jouer dans la même cour que nous, elles pourraient faire d’une pierre deux coups : redorer leur image et accéder aux grands noms de l’art contemporain dont elles rêvent de s’offrir les services. D’ici 2024, nous voulons avoir financé 1.000 structures à travers le monde ; des structures qui viendront s’ajouter à celles que nous avons déjà inaugurées au Pérou, en Irak, en Iran, au Brésil, au Cambodge ou en Jamaïque, précise Charles-Antoine Bodson qui, fait rare dans le contexte des projets solidaires, reverse 10% de son chiffre d’affaires à Skateistan. Jusqu’ici, nous n’avons pas encore financé de Skatepark dans la capitale, mais c’est évidemment notre souhait le plus cher, glisse-t-il en souriant à la fin de notre rencontre. A l’étranger, le fait qu’on soit belge nous ouvre beaucoup de portes. Notre démarche est reconnue et saluée. J’imagine qu’à termes, nous serons entendus et suivis à Bruxelles également !

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