Les eaux pétillantes alcoolisées, la tendance qui enivre les USA

Imaginez une boisson très peu calorique, végane, sans gluten, composée uniquement de produits naturels. Le rêve, non ? Sauf que ces breuvages, aussi épidémiques que redoutables, émergent sur le marché des boissons alcoolisées. Dégustation et explication d’un phénomène qui fait chavirer la consommation des jeunes.

PAR CHARLES PIRON. PHOTOS D.R. |

L’été dernier, les États-Unis subissaient l’arrivée massive des Hard Seltzer, comprenez des eaux gazeuses alcoolisées. Les prévisions sont claires, d’ici 2021, le chiffre d’affaires avoisinera les 2,5 milliards de dollars. La marque la plus connue aux États- Unis se nomme White Claw. En 2019, ses ventes ont augmenté de... 320 %, fait historique et rarissime dans un secteur ancré dans les habitudes de consommation. De quoi donner le tournis. Mais comment expliquer un tel engouement ? Parce que ces boissons proposent une alternative “saine” aux alcools traditionnels et aux boissons aux goûts peu prononcés. En effet, les eaux pétillantes alcoolisées sont très peu sucrées. Les deux grandes marques oscillent entre 3 et 6 grammes de sucres par litre. À titre de comparaison, le Coca-Cola contient plus de 100 grammes de sucre par litre, une différence spectaculaire. Sur le plan des calories, on oscille autour de 100 pour une canette de 33 cl, soit un peu moins qu’une bière. Autre point non négligeable, l’absence de goûts prononcés. Quand un adolescent déguste son premier verre de bière ou de vin rouge, souvent, il se rebute. Dans ce cas-ci, la boisson est directement appréciée des jeunes puisqu’elle Les campagnes jouent sur l’ambiance conviviale, une image saine et décontractée... s’apparente à une eau aromatisée comparable aux boissons qu’ils consomment depuis leur tendre enfance. De plus, l’alcool est subtilement dissimulé derrière la fraîcheur du produit.

Les campagnes jouent sur l’ambiance conviviale, une image saine et décontractée...

Façonner des saveurs

Pour comprendre ces boissons, il faut d’abord comprendre leur mode de fabrication. Dans la production des eaux gazeuses alcoolisées, pas de distillation. Il ne s’agit donc pas d’une vodka ou d’un gin annexé à de l’eau gazeuse. Le procédé utilisé est celui de la fermentation, le même que pour le vin ou la bière. Bodega Bay, la première marque déjà commercialisée en Europe, utilise le même procédé que ses concurrents américains. La compagnie utilise du jus de pommes fermenté, qui atteint les 22 degrés d’alcool avant d’être totalement filtré. Charlie Markland, créatrice de la marque, explique : Le produit est à base de pommes, presque comme une liqueur, ensuite nous le filtrons avec du charbon. Les arômes de pommes ainsi que la couleur disparaissent. Ensuite, cette liqueur affranchie d’arômes est mélangée à des extraits de fruits et d’épices ainsi que de l’eau naturellement pétillante. En fin de fabrication, la boisson titre à 4 degrés d’alcool soit un niveau similaire à une bière légère. En bouche, le produit étonne. On découvre une boisson légèrement pétillante et enrobée d’arômes de fruits endimanchés. La marque propose deux arômes actuellement. Notre coup de cœur se porte sur la saveur pomme, gingembre et baie d’açaï qui offre des notes de petits fruits rouges et d’épices. Autre point non négligeable, l’absence totale du sentiment de boire de l’alcool.

Sain ou pas ?

Aux États-Unis, les Hard Seltzer jouent sur une communication extrêmement réfléchie. Tous les codes appréciés par les jeunes sont utilisés. La marque est très présente sur Instagram, on y découvre de nombreuses mises en scène de la boisson lors de fêtes en bord de plage ou lors de barbecues dans le désert. À chaque fois, l’image saine et décontractée du produit est valorisée. Et renforcée à la dégustation. Testé à l’aveugle, un tel produit pourrait en effet être comparé à un soda. Une question vient donc se poser : nos jeunes sont-ils en danger ? Pour le docteur Thomas Orban, alcoologue, Toute boisson alcoolisée qui a tendance à faire croire qu’elle ne l’est pas, met en danger la santé de nos jeunes qui n’ont qu’une envie, c’est de transgresser ! Il faut se méfier du marketing, les arguments surfent sur l’air du temps : vegan, peu calorique, etc. Mais on sait très bien que l’alcool présent en fait l’attrait et que la boisson va très bien se vendre. Car si l’on a l’impression de ne pas ingérer de l’alcool, les effets, eux, sont bien présents.

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