Pourquoi un vêtement plus durable sera-t-il toujours plus cher ?

Aujourd’hui quand on parle de mode il y a les extrêmes : l’ultra-luxe d’un côté, l’ultra-fast fashion de l’autre. Entre les deux il y a toute une série de petites marques qui se débattent pour contrer cette concurrence implacable. Leur secret ? Leur âme.
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Orta

On le sait, quand le contexte économique est plus tendu, c’est le « milieu de gamme » qui souffre. Car les plus grandes marques, les grands groupes de mode, l’ultra-luxe et ses excès se portent plutôt bien ; parce que le secteur est porté par des consommateurs chinois ou internationaux friands de luxe et parce que ce n’est pas vraiment la crise pour tout le monde… Et puis il y a la mode rapide, ultrarapide, de plus en plus rapide, et surtout, de moins en moins sensible à toute forme de durabilité ou de sens des responsabilités en matière d’environnement. Mais voilà, ce n’est pas cher, ça va vite, et parfois il faut bien avouer que c’est même plutôt bien réalisé… Si certains l’ont compris et boycottent d’emblée les sites chinois comme Shein ou Temu, d’autres ne peuvent s’empêcher de succomber aux sirènes de cette mode qui ne coûte absolument rien, même en sachant tout ce que cela implique du point de vue de la durabilité.

Sur le tapis rouge aussi, la mode se veut plus durable :

Celles qui ont plus de mal à convaincre, ce sont ces marques que l’on positionne dans le « moyen de gamme » : un vilain nom pour désigner ces marques qui essaient encore de produire du vêtement de qualité, bien réalisé avec une belle identité, tout en restant abordables. Leur mode d’ordre : achetez moins, mais achetez mieux !

Las, que ce soit dans le secteur de la mode ou dans celui de l’alimentation, on a beau être pétri de bonnes intentions, bien souvent quand c’est moins cher, c’est tentant… Alors, comment font ces petites marques que les gens adorent ? Celles pour lesquelles on économisera pendant un mois ou deux afin de pouvoir s’offrir une belle pièce, celle qu’on peut se payer malgré tout, même si cela veut dire qu’on achètera qu’une seule pièce au lieu de deux, trois ou même cinq chez un producteur moins scrupuleux ?

Atelier Preface
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Un certain sens de la communauté

Souvent, en mode comme dans d’autres secteurs, la force d’une marque repose sur l’identité de celui qui l’incarne. C’est le cas par exemple de la marque anversoise Essentiel, qui vient de fêter ses 40 ans et qui propose depuis toujours une mode radicalement différente, plus joyeuse, plus colorée. Derrière cette marque on trouve la personnalité d’Inge Onsea, véritable BV, présente sur diverses émissions de télévision et petite star des réseaux sociaux du côté flamand. L’ex-mannequin est l’incarnation parfaite de la femme à laquelle la marque s’adresse, car elle est celle à qui s’identifient les clientes.

Même phénomène du côté de chez Orta, la marque belge portée par Marion Schoutteten et son mari Gauthier Prouvost. Marion est très suivie sur les réseaux sociaux, où elle dispense un peu de sa vie privée, un peu de sa vie familiale, ses looks du jour, mais aussi ses galères, son quotidien dans la mode et de sa vie de femme entrepreneuse… Une formule qui gagne : Marion est la meilleure ambassadrice de sa marque, car elle porte admirablement les modèles qu’elle dessine, mais elle a aussi réussi à incarner une femme à laquelle tout le monde a envie de s’identifier : la bonne copine qu’on aimerait tous avoir, et qui en plus s’habille toujours bien.

Un certain sens de la durabilité

Qu’est-ce qui nous incite à dépenser plus cher pour un pull plutôt que pour un autre, si ce n’est la conviction qu’il tiendra plus longtemps, que la qualité de la pièce qu’on a achetée nous permettra de le garder plusieurs saisons sans qu’il s’altère ? Mais il y a aussi l’aspect durable, comme dans tous les points de notre consommation, on se veut plus responsables. Il y a dans ces marques un souci de rester Made in Europe, de plus en plus recherché par les consommateurs.

Le combat est déloyal
Gauthier Prouvost, Cofondateur d’Orta

Gauthier Prouvost, le mari de Marion Schoutteten et cofondateur d’Orta, est en charge de la production et du développement de la marque (qui est récemment devenue la première marque belge de prêt-à-porter certifiée B-Corp). Il s’est donné comme objectif de proposer un produit 100 % européen, du tissage à la confection, et pour cela, il est passé maître dans l’art de décortiquer tous les aspects de la production textile et de son impact global sur l’environnement. « Le combat est déloyal, quand on est écolo, car ce n’est pas seulement le prix du personnel qui impacte nos coûts. Certes, la main-d’œuvre européenne est plus chère, et une couturière qui assemble un vêtement au Portugal coûtera bien plus qu’à l’autre bout de la planète, où les normes n’existent simplement pas ou ne sont pas appliquées, mais ce serait réducteur de s’arrêter à ce seul critère », nous explique Gauthier. « On a poussé la réflexion jusqu’à l’analyse de la consommation d’énergie des usines, de leur pollution des cours d’eau, de l’air, de leurs émissions de carbone, de la provenance des machines qui y sont utilisées, etc. Et là, on ne parle pas seulement de durabilité, mais d’écologie, celle qui tient compte de la préservation du savoir-faire européen. C’est un ensemble de facteurs qui doivent être pris en compte et depuis plus de deux ans, j’essaye d’expliquer que quand on achète un vêtement européen, ce sont aussi des machines européennes, des emplois, une dépense en énergie décarbonée… C’est tout un écosystème et plusieurs industries que l’on défend, et c’est cela qui a du sens. Après, cela nous offre aussi bon nombre d’avantages : on travaille sur le même fuseau horaire que nos usines, cela nous donne une plus grande agilité, tant au niveau de la communication avec nos fournisseurs que de la logistique. S’il n’y a pas de bateaux venus du bout du monde, on réduit nos contraintes. Le plus compliqué, c’est de trouver les bons interlocuteurs, car il y a évidemment moins d’usines en Europe et surtout nous devons tenir compte du fait que si l’Europe nous garantit les normes les plus vertueuses, ce sont aussi les plus strictes. Toutes ces mesures et restrictions ont un sens, et je suis le premier à vouloir aller le plus loin possible dans ce combat, mais elles ont un impact sur le prix de chaque pièce, et j’ai réalisé qu’il est devenu impossible d’expliquer tout cela à notre consommateur, habitué à payer 5 à 15 € pour un T-shirt dans les chaînes de prêt-à-porter bon marché. On communique sur le Made in Europe qui regroupe toute une série de valeurs dans l’imaginaire des gens, et ce que le client comprend, c’est qu’il aura un vêtement globalement plus durable. »

D.R.
Marion Schoutteten et son époux Gauthier Prouvost, les fondateurs de la marque belge durable Orta. - D.R.

Un certain sens du style

Au-delà de cet argument, le succès d’une marque réside souvent dans d’autres éléments de séduction, à commencer par l’identité, comme le défendent en chœur Marion et Gauthier : « Le critère le plus important reste notre identité. Si une marque n’est pas incarnée, on s’en désolidarise et sa durée de vie sera singulièrement réduite. On l’a vu avec toutes ces marques autrefois branchées qui ont jeté l’éponge comme Scotch&Soda ou Superdry… Notre philosophie et notre vision font vraiment la différence, et cela suffit pour que la communauté que nous avons pu fédérer autour de ces valeurs reste très fidèle à la marque. La présence de Marion aussi : son identité forte, notre histoire en tant que jeunes entrepreneurs et son sens du style… Tout cela ruisselle sur cette identité à 360°C. C’est ce qui nous permet de nous positionner de plus en plus comme une marque une marque premium, car le combat sur le coût du vêtement est inégal et perdu d’avance, nous nous adressons à un public qui voit au-delà du prix. »

Et si la marque a réussi à convaincre une clientèle consciente de ces enjeux et très engagées derrière tout ce que le couple incarne, le défi est aussi de continuer de créer des collections qui vont la séduire : « Nous cherchons toujours à créer des collections intemporelles, piquées de détails identitaires, qui nous rendent immédiatement reconnaissables. Encore une fois, nous voulons inscrire notre identité dans une démarche résolument durable, une industrie qui fait ruisseler la création de richesses et une communauté soudée. C’est le défi que nous nous sommes lancé. »

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