Le lin s'invite dans la déco

Sa floraison éphémère et printanière pare les champs d’un bleu subtil. Plante à trésors, trésor de plante, plante à vivre, le lin a envahi la décoration. Une manne à exploiter pour les designers.

PAR AGNÈS ZAMBONI. PHOTOS D.R. SAUF MENTIONS CONTRAIRES. |

Plante écologique, mais pas exotique, le lin est un pur produit européen qui s’étend du sud de la Normandie à la Belgique et aux Pays-Bas. Pas exigeant, il ne réclame que du soleil et de la pluie, et offre une croissance rapide. Plus vieille plante textile cultivée en Europe, qui fournit 85 % de sa production mondiale, il est issu d’une agriculture de proximité et non délocalisable. 30 % du lin sont aujourd’hui transformés pour la décoration d’intérieur et pas seulement en lin lavé dans le domaine des textiles de la maison. Et déjà 10 % sont dédiés à des applications techniques, qui mettent en évidence sa robustesse, sa légèreté et sa capacité d’absorption des chocs. Il devient alors une fibre naturelle idéale pour les matériaux composites et bio-composites à haute performance. Transformé en tissu, en charge isolante pour la construction ou intégrée dans une nouvelle génération de plastiques, le lin se prépare à un bel avenir

Des textiles omniprésents 

Aujourd’hui le lin s’offre en lin lavé, multiplie ses usages au quotidien, passe en machine et ne se repasse plus si on le souhaite. Thermorégulateur naturel, il apporte sa fraîcheur en été, et isole du froid en hiver. Dormir dans des draps en lin est un vrai bonheur en toute saison et la gaze de lin accompagne des nuits de rêve. Le lin se tisse en combinaison avec le coton, l’alpaga et la ramie (une autre plante très ancienne de la famille des orties qui fait également son retour).

Sur les terrasses et au jardin, le lin outdoor garde son toucher textile, qui le rend comparable aux textiles d’intérieur. Ses fibres très résistantes produisent des tissus très solides et durables, soit une matière idéale pour fabriquer des torchons, des tabliers, des nappes et des serviettes. Ses fibres et sa texture offrent un résultat éclatant en teinture. Couleurs denses et profondes, nuances subtiles explosent au cœur des fils de sa chaîne et de sa trame.Le textile le plus ancien du monde est désormais la fibre végétale la plus tendance, la plus verte et la plus innovante du moment. Le lin nous touche comme nul autre textile.

" Naturellement technique avant même qu’on le transforme, il s’inscrit parfaitement dans son temps : traçable, authentique, il est résolument tourné vers l’avenir ", commente Marie- Emmanuelle Belzung, directrice de la Confédération Européenne du Lin et du Chanvre (CELC), qui organise régulièrement des campagnes de sensibilisation sur ces matériaux et encourage les designers à utiliser ces vecteurs d’innovation, dans des nouveaux projets, en les accompagnant et les conseillant dans le sourcing via la matériauthèque du Linen Dream Lab à Paris.
 

Des références belges

Fondé en 1956 par Étienne Vercruysse, Verilin produit des tissages en lin haut de gamme qui combine, savoir-faire, création et innovation. La société familiale, perpétuée par les petites filles du fondateur, Ilse et Anne-Sophie, est restée fidèle à l’esprit de luxe des origines avec, à son actif, un véritable palmarès de créations personnalisées et exclusives. Sélection de fils, tissages chaîne et trame, dessins jacquard, damassé, teintures en pièces ou en fils, conception et confection sur mesure, tout est fabriqué dans la manufacture historique de Courtrai. 

De la prise de mesures à la livraison et l’installation, Verilin met en forme des idées uniques : rideaux, linge de lit, coussins, linge de table... Des chefs comme Sergio Hermann, Peter Goossens ou Christophe Hardiquest ont mis Verilin à leur menu. Des grands noms de l’hôtellerie l’ont fait entrer dans leurs chambres. Collaborant également avec des architectes, Verilin valorise le côté intemporel de la matière magnifiée par la lumière naturelle des intérieurs, l’élégance de son tomber à table comme aux fenêtres. 

Parmi leurs créations innovantes, la collection Nuée, conçue par la plasticienne Liv Mathilde Méchin et la créatrice textile Côme Touvay, qui ont tenté de reproduire sur le lin des effets de clair-obscur célestes. Vichy et tissages jacquard avec jeux de géométriques, couleurs naturelles, douces et pastel, les créations de Verilin conjuguent modernité et tradition. Elles donnent à chacune de leurs nouvelles créations, le nom d’une héroïne hitchcockienne : Alma, Audrey, Alice, Gladys, ... Marie Mees et Cathérine Biasino, sous la signature The Alfred Collection, expriment, elles aussi, leur passion pour cette matière noble d’une grande simplicité, à la fois raffinée et robuste. Leurs créations en linge de lit et de table sont travaillées avec une recherche du détail essentiel.

Les tissages simples font l’éloge des jeux de lignes, de rayures, de quadrillages ou de carreaux, des différences de tissages subtiles. Le lin est lavable à 60o C et peut être séché en machine. Côté palette de couleurs, les blancs et les gris sont mis en valeur ainsi que quelques couleurs foncées comme le bleu marine et encré ou le brun chocolat. Outre les modèles des collections, des créations sur mesure pour le lit peuvent être réalisées sur commande.

À l’avant-garde de la création 

Dans l’univers de l’écoconstruction et des produits composites à haute performance, le lin est devenu un matériau très technique. En tant que biocomposite, utilisé en petites quantités et associé à une matrice en résine, il permet de fabriquer des meubles. Ainsi depuis une dizaine d’années, des designers pionniers conçoivent des pièces avec renfort de fibres de lin et matrice thermodure, résultat d’un processus de transformation des fibres végétales 14 de lin qui les combine à de la résine époxy composée d’éléments végétaux pour donner un matériau composite performant.

Frédéric Morand de la société française Saint Luc a mis trois ans pour mettre au point une première chaise en lin qui offre des propriétés mécaniques proches de celles de la fibre de verre, en dépensant dix fois moins d’énergie fossile et réduisant de 98 % les rejets de CO2 par rapport à un produit moulé en plastique. Des créateurs comme François Azambourg, Philippe Starck, Noé Duchaufour-Lawrance, Jean- Marie Massaud, Jean-Philippe Nuel et Christien MeinderstSma, de l’école d’Eindhoven, ont ouvert la voie...

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