Les architectes d'intérieur, les nouvelles stars d'Instagram

Depuis quelques années, boom du design oblige, les architectes d’intérieur sont, à l’instar des chefs et des créateurs de mode, les nouveaux princes des réseaux sociaux, en particulier Instagram. Ces experts, qui définissent nos espaces, étudient notre éclairage, choisissent notre mobilier… sont-ils de vrais conseillers ou des gourous du bon goût ? Nous avons enquêté.

Par Marie Honnay. Crédit photo : Laetizia Bazzoni |

Les archis psychologues, Sarah Di Lauro et Émilie Denis, fondatrices de Sadé Intérieurs  

Leur parcours, en bref...

Diplômées de Saint-Luc à Bruxelles, les deux Belges de 39 et 40 ans ont attendu d’être enceintes de leur premier enfant pour décider, après un début de carrière dans
un bureau spécialisé dans les demeures historiques, de créer leur studio en 2019. Conceptrices d’espaces, mais aussi mamans, les architectes d’intérieur basées à Uccle privilégient une approche pragmatique. Notre travail consiste, entre beaucoup d’autres choses, à guider nos clients pour que l’intérieur que nous concevons pour eux soit beau, mais aussi pratique, explique Émilie Denis. À un jeune père divorcé, nous déconseillons par exemple d’opter pour le canapé super design de ses rêves. Et si nous privilégions toujours les belles matières, nous faisons en sorte de dissuader les familles composées de plusieurs enfants et d’un chien d’opter pour un sol qui devra être bichonné régulièrement. Il arrive aussi que des gens nous annoncent d’emblée qu’ils n’ont pas besoin de beaucoup de rangement, mais lorsqu’on arrive chez eux, c’est le chaos. À nous de les orienter vers des solutions qui vont leur faciliter la vie au quotidien.

Leur approche ?

Pour qu’une collaboration se passe bien, il faut que le client nous fasse confiance et qu’il accepte qu’on l’entraîne dans notre univers. Aujourd’hui, les gens font trop souvent une
fixette sur des tendances éphémères. Or, nous savons qu’ils s’en lasseront rapidement. Le chantier idéal ressemble par exemple à ce gîte de campagne que nous aménageons en ce moment dans la région de Maredsous. Pour ce projet qui va de la suppression de murs intérieurs au choix du linge de maison, nous avons commencé le travail avec des bottes en caoutchouc. Nous le terminerons avec des gants blancs.

Et ça coûte combien ?

En général, nos clients optent pour un pourcentage équivalent à 10 ou 15 % du prix total du chantier, mais certains préfèrent une facturation à l’heure. D’autres nous demandent juste un avant-projet dont ils gèrent eux- mêmes le suivi et que nous facturons à titre forfaitaire. Si, pour faire appel à nous, il faut un minimum de moyens, nous faisons en sorte de réaliser de jolies choses en tenant compte du budget de chacun. Pour la boutique Fresh Lab à Uccle, nous avons cherché à créer une ambiance très luxe tout en respectant le budget imposé et l’obligation d’exposer de très nombreux produits. Nous avons notamment misé sur des étagères très fines réalisées par un ferronnier belge, partenaire de notre bureau. Collaborer avec des artisans locaux fait partie des valeurs que nous défendons.

Plus d'infos : sade-interieur.be

L'archi designer, Hortense Pontabry, architecte d'intérieur 

Son parcours en bref...

Détentrice d’un master en Landscape & Product Design, la Française Hortense Pontabry a fait ses armes chez un grand décorateur parisien, puis à New York au studio Ghislaine Vińas. Cette expérience m’a permis de me libérer de certains codes classiques, mais aussi de m’essayer au design de produits. De retour en France, j’ai collaboré à l’aménagement de l’hôtel La Mourra. Ce projet de 4 000 m2 implanté à Val d’Isère m’a à la fois fait grandir professionnellement et épuisée émotionnellement. C’est en prenant des vacances au soleil, à l’issue de ce chantier colossal, que l’architecte imagine Miasun, une tente de plage ultra ingénieuse tombée dans l’œil de Fatboy qui a racheté le concept en 2020, trois ans après son élaboration. Avec Valériane, une amie diplômée d’une école de commerce qui m’accueillait en Australie, j’ai eu l’idée de cette tente-parasol basée sur une structure tubulaire super légère (1 kilo max) qui se monte et de se démonte rapidement et qu’on transporte dans un simple sac.

Son approche...

Si, quand elle signe des projets pour des clients privés, l’architecte d’intérieur se met à leur écoute, quitte à gommer son propre style, la création d’objets lui laisse au contraire une grande liberté d’action. Aujourd’hui, mon travail combine architecture d’intérieur, création d’image et design d’objets. En 2021, j’ai par exemple aménagé la terrasse éphémère de la Grande Épicerie du Bon Marché à Paris ; un projet qui faisait cohabiter architecture d’intérieur et création d’une identité visuelle en phase avec l’ADN du magasin.

Plus d'infos : hortensepontabry.com 
 

L'architecte voyageuse, Julie Herion, fondatrice du studio Julie Herion 

Son parcours en bref...

Après des études en graphisme et une expérience de dix ans dans la pub, cette native de Namur s’est formée en architecture d’intérieur. Il y a huit ans, elle signe un premier projet : la conception d’une maison entière pour des amis. Dans la foulée, elle fonde son studio - désormais basé à Bruxelles - et, quatre ans plus tard, engage sa première collaboratrice. Grande voyageuse, elle puise dans ses nombreuses escapades au Maroc de jolies idées qu’elle réinjecte dans ses créations sous le signe de la couleur, des matières et des enduits évocateurs des décors méditerranéens. Son style très identitaire lui a rapidement permis de se démarquer et de signer des projets tant privés que publics comme la pâtisserie Swookies à Saint-Gilles, une herboristerie conçue dans un esprit “vieille pharmacie” à Philippeville ou encore la boutique de déco Rose Avril à Louvain-la-Neuve. Avec Natalia, ma collaboratrice, nous essayons de créer des intérieurs qui sont à la fois branchés, mais aussi joyeux et agréables à vivre en évitant le total look. Quand nos clients nous suivent jusqu’au bout de notre idée, nous réalisons des espaces très audacieux. Tout récemment, pour une designer, créatrice de décors pour des défilés de mode, nous avons conçu une grande banquette en tissu violet complétée par un podium rehaussé de contremarches en miroir.

La vidéo du jour :

Son approche...

Pour l’instant, notre travail va du gros œuvre (comme la redistribution d’espaces) au choix de pièces de mobilier plus imposantes. Mon rêve serait toutefois de me voir confier un chantier pour lequel je pourrais tout choisir jusqu’au moindre petit objet.

Et ça coûte combien ?

Le studio de Julie Herion propose deux types de services : la création du concept et la réalisation d’images 3D pour un forfait prédéfini. Dans ce cas, comme l’avait choisi la créatrice de la boutique Rose Avril, le client suit lui-même son chantier. Quand le studio se charge de la mise en œuvre du projet, il faut compter environ 14 % du budget total du chantier envisagé.

Plus d'infos : julieherion.be

La décoratrice éco-friendly, Nafi Rêve, influenceuse déco responsable 

Son parcours en bref...

Après un début de carrière dans le secteur des ONG, cette Belge de 38 ans, désormais influenceuse et chroniqueuse télé et radio, a profité du confinement pour développer une activité d’aménagement d’espaces centrée sur la récupération de mobilier vintage. J’ai commencé à publier sur les réseaux sociaux des photos d’espaces que je décorais avec du mobilier et des objets chinés. Pour moi qui suis totalement autodidacte, il s’agissait d’abord d’une envie de promouvoir la décoration responsable. Petit à petit, mon envie de transmettre mes convictions écologiques s’est transformée en une activité professionnelle à temps plein.

Son approche ?

Depuis environ deux ans, je propose mes services aux personnes désireuses d’aménager une ou plusieurs pièces de leur maison sur base de mobilier de récupération. Je souhaitais aussi donner la possibilité aux gens de créer un intérieur qui leur soit totalement personnel, plutôt que de reproduire des schémas ou des décors formatés vus sur les réseaux sociaux. J’ai donc développé AIBI (pour Aménagement d’Intérieur Basé sur l’Introspection ), une méthode qui invite les gens à s’interroger sur ce qu’ils ont envie de ressentir dans les différentes pièces de leur maison. Pour une cliente qui souhaitait une chambre qui la fasse “se sentir belle”, la décoratrice a chiné un meuble coiffeuse devant lequel elle peut se maquiller. En février dernier, la décoratrice a également publié un manuel pratique et didactique centré sur sa méthode personnelle.

Et ça coûte combien ?

Le prix des meubles et des objets que la décoratrice chine pour chaque projet : un montant défini par le client lui-même en début de chantier auquel s’ajoute un forfait de 250 € par jour pour la conception de l’espace, ainsi que 15 % du montant des achats. Depuis ce printemps, Nafi Rêve propose aussi des séances de coaching (trois matinées ou trois soirées : 250 €/ personne), en complément de la méthode présentée dans son livre "Créez votre intérieur en respectant la planète (éditions Racine)" au prix de 24,95 €.

Plus d'infos : nafireve.com

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