Et si cette habitude italienne au restaurant était le nouveau chic ?

"Fare la scarpetta"... En français, cette tradition italienne se traduit tout simplement par "saucer son assiette", une pratique longtemps décriée dans les bons codes de conduite au restaurant. Mais qu'en est-il aujourd'hui ? 

Par Camille Vernin, Photo : Unsplash |

"Fare la scarpetta", l'expression italienne se traduit littéralement par "faire la petite chaussure". Concrètement, il s'agit d'utiliser une mie de pain épaisse pour extraire la sauce de son assiette jusqu'à la dernière goutte. Dans certaines cultures comme en Grèce, qui fait la part belle aux recettes tartinables telles que le tzatziki ou le tarama, saucer son assiette est très bien vu. Idem en Italie, ou cette pratique courante est particulièrement appréciée, car considérée comme un signe d'appréciation pour la nourriture. Dans d'autres comme en Belgique et en France, ce geste n'a pas fait l'objet du même traitement au fil des époques. Et si "fare la scarpetta" redevenait l'ultime geste à la mode ?

Ces trois indices annoncent que vous allez manger dans un mauvais restaurant :

La cuisine plaisir avant tout 

C'est lors de notre récente visite chez BISTЯO que nous avons ouï cette expression italienne pour la première fois dans la bouche d'un chef. C'est Benjamin Denis, chef derrière les fourneaux du nouveau petit frère de L'Air du Temps signé San Degeimbre, qui a lâché cette italian touch au détour d'une conversation. Une façon de résumer la cuisine qu'il apprécie : beurrée, juteuse, généreuse, de terroir. Celle dans laquelle on a envie d'aller puiser avec la grosse cuillère, celle où l'on trempe allègrement d'épaisses mies de pain dans son assiette pour ne pas en perdre une goutte de sauce savoureuse, sans dire pour autant adieu au raffinement du goût, à la précision des gestes, ni à l'engagement durable. Est-ce le feu vert ultime qui annonce la fin des soi-disant bonnes manières à la table des restaurants gastro/bistronomiques, ou une petite offensive bocusienne loin de l'injonction permanente à manger sainement ? 

Quoi qu'il en soit, le fait qu'un chef bistronomique invite pleinement à saucer son assiette dans les règles de l'art est une grande nouvelle. Nous ne sommes plus à l'ère du Petit Larousse du savoir-vivre ou du guide de l’étiquette dans lesquels on pouvait lire ce genre de phrases surannées : "n’enfourche pas un morceau de pain pour saucer son assiette. Ces mauvaises habitudes choqueront inévitablement l’entourage et pire, une future belle-mère…". Aujourd'hui, la plupart des chefs bistronomiques ou gastronomiques ne s'offusqueront pas de voir un client pourlécher son assiette à l'aide d'un morceau de pain. Au contraire.

Un geste pas si mal vu 

"Rien n'est interdit dans un restaurant", confiait déjà Yannick Alléno au Figaro en 2016. Au restaurant, le mot d'ordre reste le plaisir. Pourquoi frustrer un client en ne le laissant pas finir la sauce qu'il adore dès lors ? Une ouverture d'esprit que partage Stéphane Raynaud, au Bistrot Le Lion d’Or à Carouge, qui confirme qu’une sauce est le prolongement du plat. "Cet acte valorise l’effort du cuisinier et de l’équipe qui ne se sont pas contentés d’ouvrir un sachet en poudre et de le mélanger à de l’eau. Une sauce est une preuve de savoir-faire", raconte-t-il au Temps. Ou comme le disait Bernard Pivot : "Les bonnes manières sont le prétexte de ceux qui voudraient en avoir des mauvaises de temps en temps"

S'il s'agit de votre ultime plaisir au restaurant, on ne vous jugera donc pas. Et pour celles et ceux qui rêvent de finir cette petite sauce au yuzu excellentissime qui trempe nonchalamment dans l'assiette, on peut opter pour une alternative un peu plus confortable, celle de piquer dans son pain avec sa fourchette et puis de saucer nonchalamment. Une façon de passer en quelque sorte inaperçu. 

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