Un palmarès parfois contesté, mais jamais renié
Ce lundi, le Guide Michelin annoncera son palmarès pour 2023. Un classement très attendu, bien que souvent contesté surtout quand il va à l’encontre de ce que l’on en attend. En effet, le monde de la gastronomie est en pleine mutation et le Guide se perd un peu à expliquer ses valeurs. En retirant des étoiles à certains monuments de la gastronomie française, il s’est attiré les foudres de toute la profession. Est-ce que cela veut dire que ces restaurants ont perdu en qualité ? « Absolument pas ! » nous explique Carlo De Pascale, « mais il faut bien reconnaître que certains chefs, qui sont en place depuis de 40 ans, ne peuvent pas se renouveler en permanence et n’offrent plus une expérience aussi étonnante qu’elle était il y a 25 ans… Michelin est une entreprise privée, pas une agence de tourisme. Leur rôle est aussi de mettre en avant les nouveaux venus.» Bien que de nombreux chefs prétendent s’en distancer et ne travailler que pour leurs clients, le recul est souvent vécu comme un traumatisme… C’est un fait : l’étoile reste une sorte de standard. Ce barème vous amène souvent une clientèle nouvelle, qui, désertera votre restaurant, si elle venait à disparaître.
Découvrez en vidéo qui est René Redzepi, le chef de l'un des meilleurs restaurants du monde :
Gert de Mangeleer, chef triplement étoilé en 2012 pour le restaurant Hertog Jan (fermé en 2019) explique ce paradoxe : « Les étoiles, c’est moins important, c’est vrai, surtout qu’il y a d’autres classements qui sont apparus : comme le Gault&Millau, les 50best ou même La Liste en France, qui sont autant de vecteurs de succès. Mais quand vous discutez avec les chefs internationaux, la chasse aux étoiles reste une réalité et une préoccupation pour les plus grands. Et malgré tout ce qu’on en dit, je ne voudrais pas que l’on sous-estime la valeur de ces étoiles. Une étoile au niveau national, 2 étoiles au niveau européen, et une 3e étoile vous rendent visible à l’international. Quand nous avons reçu notre troisième étoile, le jour suivant la consécration, nous avions la télévision chinoise et japonaise devant la porte. Cela nous a amené un volume de clients qui nous a permis de faire beaucoup de choses. »
Quid des prix ?
Certains restaurateurs profitent de l’Étoile pour augmenter considérablement leur prix d’autres, par contre, jouent la carte de l’humilité et ne procèdent qu’à de petites augmentations. Le Soir a mené une enquête sur ce phénomène en septembre 2022 et a pu constater une augmentation en moyenne de 9,7 % sur le prix des menus après obtention d’une étoile. Dix établissements sur les vingt nouveaux étoilés de 2022 avaient alors modifié leurs prix, la plus grosse hausse étant de 30 % pour un même menu. Si dans 20 % des restaurants, l’addition n’a pas bougé, on constate tout de même que les chefs tirent parti de cette récompense. Certains prennent un autre chemin : on se souvient par exemple de Maxime Collard, à Paliseul, qui, au moment de recevoir sa deuxième étoile pour son restaurant la Table de Maxime, n’a augmenté le prix de son menu découverte que d’une dizaine d’euros.
À ce moment-là, la difficulté n’est plus de payer la note certes, mais bien de parvenir à réserver une table. Le restaurant, pris d’assaut, est réservé des mois à l’avance. Une augmentation de la fréquentation que l’on a pu chiffrer. Selon la société de réservation de tables en ligne Guestonline, on estime qu’un restaurant fraîchement étoilé constate une augmentation des réservations de près de 27% dans l’année qui suit son intronisation (avec un pic de plus de 90% dans les premiers mois).
En conclusion, quoi qu’on en dise, l’étoile booste singulièrement le chiffre d’affaire d’un restaurant et lui assure une position plus confortable à moyen terme. Ce qui explique donc pourquoi les chefs qui en perdent une se sentent un peu perdus et redoutent les conséquences sur leur trésorerie.
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