Pourquoi Christophe Hardiquest ferme Bon Bon

Après Hertog Jan il y a deux ans, c’est aujourd’hui au tour de Bon Bon d’annoncer sa fermeture. Qu’est-ce qui peut motiver un grand chef à fermer son établissement étoilé, alors qu’il est au sommet de sa reconnaissance ? Nous nous sommes posé la question.

Ingrid Van Langhendonck, Photos Photonews |

La nouvelle tombe comme un coup de tonnerre : le double étoilé Bon Bon fermera ses portes en juin. Un coup dur pour les gastronomes, mais aussi, par extension, une mauvaise nouvelle pour Bruxelles, car on sait que les restaurants étoilés constituent un pôle d’attractivité majeur pour les touristes et surtout pour le tourisme d’affaires. Sans trop nous avancer sur les motivations intimes de Christophe Hardiquest, c’est en interrogeant d’autres chefs étoilés et en revenant sur les interviews qu’il nous accordait en 2021, que nous avons pu dégager un début d’explication à cette décision.

1/ La Belgique mène la vie dure à ses restaurants

Entre un régime de TVA peu avantageux et des frais de personnel qui sont difficiles à assumer pour une micro-entreprise, le business model du restaurant est difficile à équilibrer si l’on veut être rentable. Or, plus vous avez d’étoiles, plus on attend de vous un service haut-de-gamme; ce qui nécessite parfois plus de monde affairé au service qu’il n’y a de places disponibles dans votre salle… Quand vous savez en outre que la plus grande majorité de la clientèle d’un double étoilé provient du monde des affaires ou des touristes, on comprend qu’après deux ans de pandémie et de restrictions, cela soit très compliqué à assumer financièrement. Si nous ne sommes pas dans les livres de compte de Christophe Hardiquest, on peut imaginer facilement que cet aspect ait joué dans sa prise de décision.

C'est en cuisine que le chef est heureux, c'est sont terrain d'expression

2/ La pénurie de personnel

Interrogez les chefs des grands restaurants en ce moment, tous vous chanteront la même chanson. Le personnel qualifié est de plus en plus difficile à trouver. Lionel Rigolet nous le disait en juin dernier : la plupart de ses employés ont enfin pu goûter au plaisir d’être en famille le soir, de ne plus devoir travailler en service coupé, et souvent il est très difficile de les attirer à nouveau dans cette vie compliquée qu’est celle d’un restaurateur.

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Du côté de la Villa Lorraine, Yves Mattagne dresse le même constat : Même si on augmente les salaires, trouver des gens motivés et les garder devient un véritable casse-tête. Du personnel de qualité, c’est l’essence même de l’expérience dans un étoilé, et quand les soucis de personnel prennent le pas sur les autres missions d'un chef dans son restaurant, on peut imaginer que cet aspect du métier incite les grands chefs à chercher d’autres formules…

Un étoilé, c'est une brigade à gérer et parfois autant de monde qu'en salle (Photo Comme Chez Soi - Photonews)

3/ Un changement de fond

On se souvient du succès de ‘Bon Bon chez Marie’, ou de son initiative Brasserie de midi, lancée juste après le déconfinement : des formules plus abordables qui surfent sur le concept de bistronomie, qui font descendre les étoilés de leur tour d’ivoire, tout en conservant la patte du chef. Quand nous l’avions rencontré durant le confinement, Christophe Hardiquest s’interrogeait déjà en juin dernier sur son métier, son art et de la nécessité de changer les choses, avec sa ‘cuisine de mémoire’ à emporter durant le confinement, il explorait déjà de nouveaux modes d’expression et il y a fort à parier qu’il nous annonce assez vite un nouveau projet construit sur un autre modèle. Ce qui est sûr c’est qu’avec le talent d’un chef comme Hardiquest, ce nouveau projet sera au moins aussi créatif que celui que l’on regrette déjà. Une affaire que l'on suivra de près.

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