Pourquoi ce village espagnol menace-t-il de fermer ses portes aux touristes ?

A Minorque, le pittoresque village de Binibeca pourrait bientôt être interdit aux touristes. Ce sont les habitants eux-mêmes qui sont à l'origine de cette idée. Comment en est-on arrivé à une telle situation ? Explications. 

Par Audrey Morard. Crédit photo : Unsplash |

Binibeca est un charmant village situé à l'extremité sud de Minorque, l'une des îles de l'archipel des Baléares. Ses rues se caractérisent par des façades blanches éclatantes comme on peut trouver sur les îles grecques et des volets peints dans les tons de vert. Le lieu séduit par ce cadre charmant et reposant, mais aussi ses ruelles pavées et son front de mer sur lequel vous pouvez vous balader. Forcément, un tel cadre attire des touristes. Un peu trop aux yeux des habitants qui menacent purement et simplement... de fermer son accès aux touristes. 

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"Des touristes sont déjà entrés dans la maison"

Les résidents de Binibeca se plaignent depuis quelques années maintenant de la venue massive des touristes. L'un d'entre eux a fait savoir sa colère dans les colonnes du journal espagnol El Diario : "Des touristes sont déjà entrés dans les maisons, ils s'asseyent sur des chaises, ils repartent avec des choses. Certains n'ont pas hésité à grimper sur nos murs et à faire des beuveries en plein air". Environ 200 habitants vivent à Binibeca. Lors de la saison estivale, il peut avoir jusqu'à 800 000 visiteurs par jour entre mai et octobre. Avec à la clé de nombreuses dérives.

Pour ne plus être confronté à de telles situations, Óscar Monge, à la tête du collectif représentant les 195 propriétaires de Binibeca, a émis l'idée de complètement fermer l'accès au village aux touristes. L'homme a conscient que des familles sont à la tête de bars et de restaurants et vivent donc du tourisme local, mais face aux dégâts provoqués par le tourisme de masse, il estime ne pas avoir d'autres choix que d'interdire l'accès à Binibeca. "Depuis la côte, vous pourrez toujours visiter le périmètre du village, mais vous ne pourrez pas entrer dans les ruelles intérieures, le spot le plus convoité pour réaliser des photos Instagram", a-t-il précisé au Guardian. Un vote est prévu en août prochain pour savoir si cette fermeture sera ou non effective. En attendant le résultat de cette consultation, les habitants ont mis en place un créneau de visite pour les touristes. Ils ont uniquement le droit d'entrer dans le village entre 11h et 20h. 

Une aide financière de 25 000 € avait déjà été donnée aux habitants de Binibeca pour leur permettre de réparer leurs habitations suites aux dégâts provoqués par les touristes. Mais selon les informations de El Economista, ce coup de pouce n'a pas été renouvelé cette année. 

L'Espagne en lutte contre le surtourisme

Il n'y a pas que les habitants de Binibeca qui s'insurgent contre le flux incessant des voyageurs en Espagne. Le pays entier semble se rebeller contre le tourisme de masse. Des îles Baléares à Barcelone, des protestations fleurissent aux quatre coins du pays.  Le 20 avril dernier, une mobilisation historique a lieu dans l'archipel des Canaries où des milliers de citoyens sont descendus dans la rue pour faire part de leur mécontentement et dénoncer les conséquences sociales et écologiques du tourisme de masse. Les messages suivants étaient inscrits sur les pancartes : "Le tourisme augmente mon loyer", "stop aux méga-travaux", "ce n'est pas de la sécheresse, c'est du pillage".

D'autres personnes sont allées plus loin dans leurs actions. En effet, six personnes du collectif “Canarias se agota” qu'on peut traduire par “Les Canaries s’épuisent” en français, ont entamé une grève de la faim pour interpeller les autorités. Dans le sud du pays, les rues de Malaga sont désormais décorées d'autocollants anti-touristes, tandis que de faux panneaux "chutes de pierres" ou "méduses dangeureuses" ont vu le jour dans les Baléares pour faire fuir les touristes de certaines plages. Suffisant pour dissuader les voyageurs ?

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