C’est indéniable. L’attrait pour les ateliers créatifs n’a jamais été aussi important. Le nombre d’espaces permettant à nos mains de s’activer et à notre esprit de se calmer explose partout dans le monde. À Bruxelles, on pense à Glaçage, Slime World, Boucan, Pollen Atelier ou encore Craffiti pour ne citer qu’eux. Peinture, céramique, dessin, couture… Beaucoup redécouvrent ces pratiques avec un enthousiasme quasi-thérapeutique. La question se pose alors : ces ateliers sont-ils devenus nos nouveaux refuges pour évacuer le stress et les angoisses du quotidien ?
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Faire face à l’angoisse moderne
« Quand je suis concentrée sur mes céramiques, je perds la notion du temps, c’est comme une bulle d’air », confie une participante assidue des ateliers de peinture sur céramique de Le Glaçage, à Ixelles. Pour elle, ces moments lui permettent de laisser son esprit vagabonder tout en créant quelque chose de tangible. « Ça fait du bien de créer quelque chose avec ses mains, sans objectif de perfection ».
« Les modes de vie contemporains, rythmés par la performance, l’immédiateté et l’isolement numérique, laissent souvent peu de place à la reconnexion avec soi-même », déclare la psychothérapeute Anne-Françoise Meulemans. « Avoir les mains dans la terre permet de se plonger dans le concret, de s’ancrer dans le monde et d’entrer dans un état que l’on pourrait quasiment qualifier d’hypnotique, voire de pleine conscience. C’est comme si l’on mettait son cerveau en convalescence, loin des scrolls et des stimulis permanents. »
Les neurosciences s’y intéressent aussi. Plusieurs études ont mis en lumière l’impact de l’activité manuelle sur la réduction du stress. Manipuler de la matière, organiser des couleurs, voir ses idées se concrétiser en objets : tout cela favorise un sentiment d’accomplissement qui apaise le cerveau. Si l’atelier créatif trouve son public, c’est aussi parce qu’il offre une alternative qui peut sembler moins intimidante par rapport aux outils traditionnels de gestion du stress, comme la méditation ou la thérapie classique. L’idée d’abandonner toute exigence de réussite semble aussi être la clé. Les ateliers créatifs offrent un espace où l’erreur n’est pas sanctionnée, mais devient partie intégrante du processus. Un contraste net avec les exigences de la vie professionnelle et sociale.
Créer du lien
Au-delà de l’impact sur le mental, ces ateliers sont aussi des lieux de rencontre, où les participants échangent sur leurs créations, mais aussi sur la vie en général. « Tout ce qui favorise le lien aide beaucoup les gens », ajoute Anne-Françoise. « Ces endroits de sociabilisation qui existaient autrefois et qui ont disparu, on les retrouve spontanément dans ces espaces de rencontre. Ils viennent contrer un contexte où l’individualisme a tendance à prédominer en favorisant un retour à la collectivité ». Une forme de « thérapie collective » douce et sans prétention donc.
Une thérapie alternative ?
Alors, thérapie à part entière ? Pas vraiment, mais pour beaucoup, ces moments créatifs remplissent une fonction similaire. Ce n’est pas un hasard si des concepts comme Art et Bulle, un atelier à Bruxelles, proposent des séances de création en petit comité, parfois en collaboration avec des thérapeutes professionnels. Ici, la frontière entre soin psychologique et création devient floue, chacun y trouvant ce dont il a besoin : pour certains, un moment de décompression ; pour d’autres, une véritable introspection.
La comparaison avec la psychanalyse peut néanmoins sembler exagérée. « On assiste à une sorte de thérapeutisation du monde », avertit la psychothérapeute. « On reprend des savoir-faire qui existent depuis toujours et on leur affuble un titre très vendeur, avec un prisme thérapeutique qui attire ». Néanmoins, il est indéniable que les ateliers créatifs, en plus de leur valeur artistique, répondent à un besoin profond de déconnexion et de ressourcement. Dans un monde où tout doit être productif, rapide et maîtrisé, les ateliers créatifs nous coupent des notifications et de la pression quotidienne. Créer devient alors un moyen de réapprendre à s’écouter.
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