Le tatouage, le nouvel accessoire essentiel?

Exit le petit dauphin que les filles se faisaient timidement imprimer sur la hanche. Désormais, l’encre sur peau s’expose, y compris dans les milieux réputés conservateurs. Focus sur une tendance qui a fini par intéresser la mode et qui s’impose comme un indispensable accessoire de peau.

PAR MARIE HONNAY. PHOTOS D.R. |

Dans une campagne de pub assortie d’une vidéo très esthétisante lancée ce printemps, l’artiste multimédia germano-slovène Annina Roescheisen plante le décor de ce qui aurait pu, il y a quelques années encore, s’apparenter à une mini-révolution. Si l’apparition de cette belle trentenaire ultra-tatouée dans la communication d’une marque de dessous plutôt rangée comme Simone Pérèle ne semble plus déranger grand monde, c’est parce que le regard de la société a changé.

En 2018, on ne compte en effet plus les campagnes de pub et les produits de consommation aussi improbables qu’une boîte de sushis ou un sac d’une marque populaire affichant un motif inspiré du tatouage. Passé du statut d’underground à celui de branché en quelques années (merci David Beckham, Rihanna, Cara Delevingne et toutes les célébrités qui ont contribué à initier le mouvement), le tatouage s’invite partout. Synonyme de liberté (c’est en tout cas le message qu’Annina Roescheisen aimerait faire passer), le tatouage joue – c’est là que ça devient intéressant – sur deux tableaux.

Dans un monde de plus en plus formaté, il permet, à la fois de témoigner d’une certaine forme d’anticonformisme, et d’afficher des ambitions fashion en devenant un accessoire de mode à part entière, au même titre qu’un bijou ou une ceinture.

Tendance vintage 

Propriétaire depuis 18 ans du studio liégeois Little Tear, Denis Larminier confirme ce changement de mentalité : "Avant, il n’arrivait quasiment jamais qu’une personne non introduite dans le milieu me demande une sleeve entière (un motif recouvrant l’ensemble du bras, ndlr) en guise de premier tatouage. La pratique restait plutôt réservée aux bad boys et aux artistes. Quant au métier proprement dit, il a beaucoup changé lui aussi. Lorsque j’ai commencé, on ne pouvait acquérir du matériel que lors des conventions (des rendez-vous durant lesquels le public peut se faire tatouer sur les stands de différents artistes venus du monde entier, ndlr) et sur recommandation d’un tatoueur expérimenté. Aujourd’hui, tout s’achète sur Internet, parfois au rabais. D’où les dérives que cela induit."

Inutile donc, de souligner l’importance de miser sur des tatoueurs chevronnés, les seuls capables de manier le dermographe dans les règles de l’art. Parmi eux, tous n’accèdent pas au star-system. Soit parce que leur patte n’est pas suffisamment différenciante. Soit parce qu’en matière de dessins sur peau, certains styles sont plus à la mode que d’autres. C’est notamment le cas du dotwork, un motif réalisé sur base d’une infinité de points juxtaposés ou encore du hand poked, une technique réalisée sur base d’une simple aiguille trempée dans l’encre. Très en vogue actuellement car revisitée dans un esprit minimaliste, elle trouve son origine dans la culture maori.

Starification et liste d'attente 

En marge de ces jeunes tatoueurs débutants qui ne sont souvent ni artistes, ni même graphistes et qui, succès du secteur oblige, ouvrent des studios avec des résultats parfois très improbables, ceux qui ont pignon sur rue depuis de nombreuses années – ou qui comptent des people parmi leurs clients – sont forcément très demandés. Au point, pour une poignée d’entre-deux, de devenir à leur tour des stars de la toile et de se faire courtiser par les marques.

C’est le cas de la New- Yorkaise Virginia Elwood qui poursuit une collaboration entamée l’an dernier avec la marque de prêt-à-porter Zadig & Voltaire en customisant le flacon du parfum This is Her sorti, pour l’occasion, en édition limitée. Plus récemment, l’enseigne Sushi Shop a demandé à l’artiste parisien Jean André de revisiter les looks de ses boîtes en y apposant ses motifs old school forcément très tendances.

#Metoo

À force de s’acoquiner avec les secteurs de la mode ou du food, les tatoueurs ont compris l’importance de se mettre en scène dans les médias et sur les réseaux sociaux. À ce petit jeu, les filles ont d’ailleurs une longueur d’avance. Un exemple parmi les plus récents : l’artiste Tati Compton. Suivie par plus de 240 000 personnes sur Instagram, la sculpturale tatoueuse qui a récemment collaboré avec la marque de sweaters The Elder Statesman doit sa notoriété à son aura, tout autant qu’à son talent artistique. Cette arrivée massive sur le devant de la scène d’une poignée de tatoueuses bien décidées à occuper un terrain jusqu’ici majoritairement masculin est l’une des grandes tendances de l’année dans le milieu du tattoo.

Si certaines excellent dans un style qu’on pourrait qualifier de “féminin” (car romantique et inspiré de la nature), d’autres teintent leurs dessins de traits d’humour, de poésie, voire d’un petit côté sulfureux qui fait mouche. À Paris, Violette Chabanon – qui a notamment collaboré avec la marque de dessous Undiz – fait partie de cette nouvelle génération d’artistes à suivre.

Dans le tatouage comme dans de nombreux domaines artistiques, un changement de mentalité est donc clairement en marche, mais en termes de chiffres, la représentation féminine est encore minoritaire. Lors de la huitième édition du Mondial du Tatouage qui s’est tenue à Paris en mars 2018, on comptait par exemple 55 femmes sur 420 participants. La bonne nouvelle ? Au niveau mondial, il semblerait que le tatouage soit actuellement l’un des principaux viviers de talents féminins. Cette évolution reste donc un bel encouragement pour le futur de la création dans son ensemble.

Suivez So Soir sur Facebook et Instagram pour ne rien rater des dernières tendances en matière de mode, beauté, food et bien plus encore.

Lire aussi :