Ce restaurant wallon revisite le mythique bouchon lyonnais

Cette semaine, Carlo et Flo nous emmènent à Nivelles goûter la cuisine d’un bouchon lyonnais. Un bouchon qui n’est pas tombé de la dernière bouteille. Le Cigalon de Jean Dubois existe depuis plus de trente ans, dont vingt à Villers-la-Ville, puis en plein centre de Nivelles depuis les années 2010. Quel est leur verdict ?

Par Florence Hainaut et Carlo de Pascale. Photos : Florence Hainaut et Carlo de Pascale. |

C’est quoi un bouchon lyonnais ? Un restaurant typique de la capitale des Gaules, avec presque toujours des nappes en vichy, une cuisine solide, avec des abats qui pleuvent de partout, et, certains matins, le mâchon, une sorte de brunch bien avant la lettre avec tout sauf des tartines à la confiture et des pancakes.

Tiens, « bouchon », ça vient d’où ? Il semblerait, selon plusieurs sources, que les échoppes lyonnaises où l'on servait à la fois du vin et de la cuisine se distinguaient par le fait que les exploitants y pendaient un rameau à l’entrée. Rameau appelé « bousche » à Lyon, et ça aurait donné bouchon.

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Le Cigalon nivellois possède-t-il les codes du genre ? Presque, certains plats sont un peu “belgisés”, d’autres font un petit tour hors de la région lyonnaise (cassoulet, choucroute), mais la promesse au niveau des abats et du roboratif est tenue ! Cervelle, andouillette, ris de veau, rognons, escargots, terrine… Il ne manque que le tablier de sapeur (en gros, de la tripe, panée et frite), mais on ne doute pas que ce plat figure de temps en temps à la carte.

Pour les lecteurs qui sont encore restés, ne partez pas! Les abats, il faut les découvrir ou les redécouvrir, c’est une façon moderne et durable d’exploiter au mieux la ressource viande. Et puis, il y a un « cursus honorum » des abats, je vous déconseille de commencer cette exploration par l’andouillette, c’est brutal, une andouillette, mais plutôt par le ris de veau, voire même la cervelle. Florence, reste avec moi, ne me quitte pas! 

Dans l’assiette

Florence étant en mode « Plutôt crever ! » face à l’andouillette, je m’y colle. Dingue de ris de veau, Flo est déçue lorsqu’elle apprend que la table d’à côté, quatre rugbymen bien… « mascus », mais sympas, ont commandé sa glande favorite, tarifée 35 euros, pour ceux qui, ce soir-là, ont pu en profiter. A l’apéro, alors que monte en nous une envie de Picon-vin blanc, on nous propose le même, mais en très belge, l’amer Labiau-vin blanc. J’adore ce rescapé du terroir wallon, et si on s’éloigne de Lyon le temps de stimuler nos papilles, on va y retourner à grandes enjambées.

Je prends la cervelle sauce tartare, alors que d’habitude, je passe mon tour sur ce seul abat. Elle est fondante et la sauce, parfaite. Florence se dépatouille avec des Helix Pomatia au beurre à l’ail; oui des escargots de Bourgogne, que l’on peut choisir par 6 ou 12 (15 ou 25 euros). Elle se régale ; je trempe au passage un peu de mon pain dans les creux de son assiette à gastéropodes, et seul petit regret, c’est que plutôt que de servir les hermaphrodites dans leur habitat naturel (la coquille), ils sont enfilés dans un biscuit, certes qui simplifie la tâche de la mangeuse, mais qui soustrait ce plaisir régressif d’aller chercher la petite bête.

C’est là qu’on arrive aux choses sérieuses. Tandis que ma partenaire de ripaille a commandé une élégante « caille farcie aux morilles, jus au Porto » (29 euros), je me vois servir une andouillette « Lemelle », à la Beaujolaise (sauce au….Beaujolais) à 28 euros. Allez, lecteurs et lectrices qui êtes encore là, cette andouillette, grillée, c’est de la bonne, c’est de la balle ! Non, elle ne sent pas, elle « goûte », c’est du « tiré à la ficelle », pas du broyat. Elle arrive avec un « aligot » (purée de pommes de terre à la tomme) et j’avoue ne pas être sûr que ce soit bien classique comme mariage, même s’il est parfaitement heureux.

La caille – bien désossée – de Florence est un régal, servie avec une purée aux choux, le plat est, par contraste, dans le registre de la finesse…très gourmand. 
Notre seul questionnement, de (presque) vieux routiers du manger-entre-commande-et-addition, c’est sur les « jus », les sauces.  Ils sont certes, très bons, mais ils nous semblent manquer un peu de caractère, de « terroirisme », au regard de la parfaite verticalité de la cuisine du Cigalon. Côté vin, passée l’émotion de l’apéritif, nous nous laissons faire « au verre » avec d’honnêtes propositions maison, du léger, fruité, on adore ça avec les plats bien assis.

Très belge dame blanche (10 euros) pour moi, très belgo-irlandais Irish coffee pour Florence (10 euros) à la crème un peu trop fouettée alors que nous la préférons simplement battue, framboise et poire en digestif. Oui, nous avons fait une petite entorse à nos habitudes, d’autant que le « verre a été mis » par les rugbymen ayant séquestré les derniers ris de veau.

Verdict

Une belle et trentenaire maison, parfaitement localisée au cœur de la jolie ville de Nivelles, où arrivent  tarifés avec justesse, donc pas donnés. Si on se laisse aller, on atteint en effet assez vite les 80 euros par personne. Nous ne le répéterons jamais assez, même si, parfois pleuvent les critiques sur le « prix des restaurants », depuis des années que nous les arpentons, plus que jamais, si l’on veut que la profession perdure et que les vrais passionnés puissent encore en vivre, il faut y mettre le juste prix.

Où ? 32 rue de Bruxelles, 1400 Nivelles. Ouvert lundi et mardi midi, du jeudi au dimanche, midi et soir.

Quand ? Fermé le mercredi.

restaurantlecigalon.be

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