Comment le tarot est-il devenu le nouvel outil de développement personnel ?

Le tarot et les arts divinatoires en général ne cessent de gagner en popularité. Serait-ce parce que nous sommes toujours plus désireux de trouver du sens à nos vies ? Focus sur une tendance qui monte, à mille lieues des cabinets feutrés de Madame Irma.  

Par Audrey Morard. Crédit photo : Unsplash |

Dans les allées des magasins de loisirs, des boîtes de jeu de tarot sont rassemblées les unes à côté des autres, rivalisant de couleurs attrayantes, de graphisme travaillé… Il y a encore quelques années, ces boîtes se vendaient sous le manteau ou dans les boutiques ésotériques. Mais aujourd’hui, le tarot profite d’un regain d’intérêt de la part de toutes les franges de la population. On le retrouve même intégré en animation bienveillante dans des soirées entre copines, un cocktail à la main le vendredi soir, pour se déconnecter de sa semaine et parler de ses ressentis.

On est bien loin des arts divinatoires aux accents mystiques auxquels on pense forcément quand on parle désormais de tarologie. Mais comment s’est opéré ce changement ?

Zoom en vidéo sur la méthode JATO, la technique qui permet de débloquer un temps précieux au quotidien : 

Ancré dans l'instant présent

Le tarot est aujourd’hui devenu une sorte de nouveau loisir. Pour Séverine Piette, tarologue, cet engouement s’explique par plusieurs facteurs : "Le tarot est sorti de sa seule sphère divinatoire. Il a été récupéré pour devenir un outil de développement spirituel et personnel. Il y a également eu le Covid ; la crise sanitaire nous a invités à l’introspection et aux remises en question. Des lectures en ligne se sont développées à ce moment, le secteur a su profiter de cette ouverture online. La pandémie a vraiment joué un rôle d’accélérateur".

Face à ce lot d’insécurité et de perte de repères, des personnes se sont tournées vers le tarot pour donner du sens et voir la vie sous un autre angle. "On ne va jamais consulter quand tout va bien dans notre vie", sourit Rodrigue, qui se fait régulièrement tirer les cartes pour, entre autres, confirmer des ressentis. Séverine ajoute : "Les outils classiques d’anticipation et de prévision ont montré leurs limites. Les individus se sont tournés vers d’autres choses dont le tarot pour par exemple questionner ce qui est juste pour eux à un instant T. Son langage, composé d’archétypes, d’images et de symboles, vient nous toucher ailleurs. Il ouvre notre regard à une dimension moins rationnelle de la réalité et libère notre intuition".

Le tarot repose sur des images, des archétypes, mais aussi des symboles. © Unsplash

Léa est, elle aussi, une adepte du tarot. Elle consulte régulièrement une amie tarologue, jusqu’à deux fois par mois : "Je n’ai jamais vu le tarot comme un moyen de prédire l’avenir, mais plus comme une manière de me guider. J’ai besoin de ce moment pour y voir un peu plus clair dans ma tête". Car le tarot n’est plus cantonné à sa dimension divinatoire où il est question de prédiction dans le futur. En 2024, il est davantage psychologique notamment grâce aux travaux d’Alejandro Jodorowsky.

Le tarot psychologique constitue un instrument de connaissance de soi qui repose sur une démarche active. Il utilise la projection en invitant le consultant à plonger dans les cartes comme dans un miroir. Séverine complète : "Le tarot s’ancre dans le présent. L’enjeu est de reformuler la question face à des demandes encore trop souvent orientées vers le futur. Par exemple, demander “Qu’est-ce que je dois mettre en place aujourd’hui pour évoluer dans tel ou tel domaine ?, plutôt que “Que va-t-il se passer si…?”. Rodrigue nous confie : "Le tarot nous donne une direction à prendre. Si on se rend chez un tarologue en se demandant quelles perspectives on veut donner à sa vie et que nos choix sont confortés, c’est encore plus intéressant".

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Reprendre la main sur sa vie

Preuve que le tarot séduit, des personnes décident d’entamer des formations à l’image de Marie : "Le tarot s’est mis sur mon chemin assez naturellement. J’y suis arrivée via mon professeur, Philippe Koeune. En le suivant sur Instagram, mon œil a été attiré par un post qu’il venait de publier sur un week-end d’initiation. J’étais libre, je me suis dit “Go”. J’y suis allée sans attente, mais j’ai tout de suite senti que cela me parlait et que j’allais m’y retrouver". Elle poursuit aujourd’hui son apprentissage du tarot psychologique avec un rendez-vous par mois pour approfondir ses connaissances, mais aussi tirer les cartes avec les cinq autres élèves de son groupe. Des moments qu’elle définit comme étant hors du temps et enrichissants. "Il y a une cohésion de groupe, on est dans le partage autour de qui nous sommes et comment on traverse nos vies".

La carte de l'Impératrice. © Unsplash

Des amies de Marie sont intéressées par le tarot, mais la jeune femme nous confie vouloir aller plus loin pour tirer les cartes à son entourage. "Il nous est déjà arrivé en fin de soirée qu’on se dise “Allez maintenant, on sort les cartes” si l’ambiance s’y prête. Mais je tire les cartes surtout pour moi et selon mes envies. Il faut avant tout y mettre une question et une attention".

Le tarot est un outil d’interprétation de ce qui se joue en nous. On apprend à se faire confiance. Le tarot permet d’une certaine manière de reprendre la main sur sa vie. Lors d’une séance de tarot, le consultant pose sa question, tire les cartes et devient ainsi acteur de son tirage. "L’homme a encore fortement tendance à remettre son pouvoir et son pouvoir de décision entre les mains des autres. Le tarot permet de mettre des repères à l’intérieur de soi et de ne plus les laisser entre les mains de notre environnement extérieur. Encore faut-il être ouvert au tarot", glisse Séverine.

La responsabilité du tarologue 

Même si le tarot se démocratise, des personnes restent encore sceptiques. Séverine l’a constaté lors d’un événement durant lequel elle était amenée à tirer les cartes. "Des personnes ne souhaitaient pas en savoir plus, bien que j’essayais d’expliquer le processus. TikTok a ouvert la voie du tarot aux plus jeunes, qui sont aussi plus  sensibles à toutes ces questions de sens face à un avenir incertain". Mais des individus éprouvent encore des réticences, voire des peurs vis-à-vis du tarot. "Pour s’immerger dans l’univers du tarot, mieux vaut faire preuve de lâcher prise et ne pas être trop rationnel. Si on veut essayer, il faut être ouvert et pourquoi pas curieux, mais certainement pas fermé", témoigne Marie. Séverine insiste sur l’importance de ne pas prendre chaque tirage au pied de la lettre : "Il ne faut pas rester dans une lecture au premier degré, ne pas sacraliser non plus et ne pas mettre de lourdeur. Le tarot doit rester une sorte de jeu".

Séverine pointe aussi du doigt la responsabilité du tarologue : "Même si on parle de tarot psychologique, nous ne sommes pas forcément psychologues de formation, ni armés face à certaines pathologies ou fragilités psychiques. Il est selon moi essentiel de poser un cadre et de connaître ses propres limites, en restant dans le jeu. Comme n’importe quelle discipline, le tarot demande de la pratique. Plus nous le pratiquons, plus notre intuition s’affine. Il peut avoir un petit côté addictif (rires). Mais le tarot est tellement riche et rempli de mystère. J’ai l’impression d’à chaque fois découvrir autre chose. C’est sans fin (sourire)".

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