À quoi ressemble un trek sur le huitième plus haut sommet du monde ?

Avec ses itinéraires côtoyant les plus hautes montagnes du monde, le Népal est considéré comme la Mecque du trek. Deux jeunes trekkeurs reviennent sur leur parcours où le dépassement de soi est le maître-mot. 

Par Audrey Morard. Crédit photo : D.R |

En novembre dernier, Luc s’envolait pour l’Asie du Sud-Est pour un voyage de plusieurs mois avec un ami. Première étape de son périple : le Népal, une destination qui n’était pourtant initialement pas prévue. Mais une discussion entre les deux compagnons de route a changé les plans : les deux amis ont évoqué l’idée de se rendre au Népal et d’y entreprendre un trek.

Le Français de 28 ans y a vu là l’occasion de tenter une nouvelle aventure pour se surpasser, mais aussi tester son corps : "Je cours 50 kilomètres par semaine, je joue au foot, je pratique le trail. J’avais improvisé un trek près du Mont-Blanc sur une journée. Mais au Népal, je ne savais pas comment mon corps allait réagir ne serait-ce qu’à 3000 mètres d’altitude. Je me suis dit “Tu vas peut-être revenir tout cassé !” " (Rires)

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L'intensité comme fil rouge

Luc et son ami n’avaient donc presque rien organisé de leur trek avant le départ. Tout s’est enchaîné à leur arrivée à Katmandou, la capitale népalaise. "Les tarifs sont assez élevés en Europe, donc on s’est dit qu’on attendrait d’être sur place afin d’avoir des prestations moins chères. L’hôtel où nous logions avait l’habitude d’organiser des treks et on nous en a proposé un autour du Manaslu, le huitième plus haut sommet du monde, culminant à 8 163 m. Notre choix s’est arrêté sur ce parcours".

Luc débute alors son parcours en découvrant sous un ciel bleu éclatant de sublimes gorges, de longues passerelles himalayennes, qui les plongent, lui et son groupe, dans un décor où l’on se sent petit face à l’immensité des paysages. Le tout avec un sac à dos dont le poids varie entre huit et dix kilos. "Les débuts ont été denses, on a marché 20 km les trois premiers jours, avant de rapidement grimper à 2 500 m. On montait ensuite de 300 à 400 mètres par jour. Il fallait que notre corps s’adapte pour éviter le mal des montagnes". Un mal particulièrement redouté par les adeptes de trek.

Plus on monte en altitude, plus la respiration, la marche et l’effort sont intenses. Une mauvaise préparation peut mener à une fin tragique, d’où l’importance des journées d’acclimatation. Luc a été confronté au mal des montagnes principalement en matinée avec comme principal symptôme, des maux de tête : "Ils n’étaient pas très forts, mais je sentais que quelque chose n’allait pas bien. La solution est de tout de suite le dire au guide et de boire un maximum d’eau. J’en consommais entre trois à quatre litres par jour".

Les vertigineuses passerelles himalayennes font partie intégrante des paysages népalais. 

Le dépassement de soi 

Le trek a quelque chose de fascinant. Les marcheurs parcourent des kilomètres pendant des heures dans des massifs montagneux, où ils sont amenés à sortir de leur zone de confort et à se dépasser. Entre 80 à 100 personnes se lancent dans le trek du Manaslu chaque jour. Le chiffre monte à 400 pour ceux autour de l’Annapurna et de l’Everest. Accompagné de sa petite amie, Thomas a également entrepris un trek autour du Manaslu sur les conseils de sa supérieure. À l’inverse de Luc, le couple a préparé son trek bien en amont : "On a consulté pas mal d’agences afin de regarder ce que chacune proposait. Celle que l’on a choisie n’organisait pas de treks en groupe, on est donc partis à deux, accompagnés d’un porteur et d’un guide. Il se souvient d’une femme croisée sur le chemin de la descente : Il lui restait cinq minutes à marcher avant d’atteindre le pic. Elle était en larmes. Il y avait quelque chose d’émouvant. Cela forçait le respect car elle continuait d’avancer malgré la douleur".

Le trekkeur peut rencontrer des difficultés lors des différentes étapes, confie Luc : "Tu sens que c’est difficile. Le souffle ralentit, il te prend beaucoup plus d’énergie. On est clairement dans le dépassement de soi". C’est ce que j’ai le plus aimé dans ce trek. Quand on demande à Luc quelle est l’image la plus forte de son périple, il cite la dernière étape avant de franchir le pic situé au col de Larkya Pass à 5 106 m. "J’ai passé une nuit blanche à cause du grand froid et de l’excitation. On s’est levés à 4 h du matin. On a commencé l’étape dans le noir, en file indienne, avec notre lampe torche. On a ensuite marché sur la neige. On a froid, on a faim, mais on sait qu’on touche au but. Le cadre était impressionnant : plus on grimpait, plus le soleil se levait. L’arrivée au pic est un vrai bonheur. Tu sais que tu as réussi. Tu es au plus haut. Je n’étais d’ailleurs jamais monté aussi haut de ma vie. Et puis on prend des photos et on se laisse transporter par le paysage".

Le pic du trek de Manaslu entrepris par Thomas et Luc se situe à 5 106m au col de Larkya Pass.

La puissance de la nature

La nature joue un rôle essentiel dans la capacité à se surpasser lors d’un trek. Elle fait partie intégrante du parcours. Elle est comme une compagne de route qui vous observe, vous pousse et vous soutient dans chacun de vos pas. Thomas va jusqu’à parler d’un lien spirituel : "On est tout le temps dehors. Quelque chose se crée avec la nature. On est touché par les montagnes qui nous entourent. Le jeune homme de 30 ans confie avoir très peu de souvenirs des instants où il marchait. Il se remémore en revanche ces moments où il a pris le temps de contempler les paysages qui lui faisaient face : Il y a quelque chose de méditatif. On est ancré dans le moment présent, on ne réfléchit à rien. C’est la preuve que j’étais réellement dans ma bulle".

Le trek au Népal nous plonge au coeur d'une nature splendide, presque méditative.

Luc a, lui aussi, été impressionné par la puissance de la nature : "On en prend plein la vue, du premier au dernier jour. On bascule dans une totale déconnexion à certains instants. On se sent presque un peu perdu". Ce voyage a poussé Thomas dans des réflexions qui ne lui avaient pas effleuré l’esprit avant son départ : "Nous avions un porteur pendant notre trek. Je suis arrivé à me demander “Qui sont les plus aliénés entre eux et nous ?” Nous sommes face à nos ordinateurs toute la journée, à penser à nos prochains achats, déconnectés du monde réel… Les porteurs travaillent dans des conditions physiques difficiles, mais ils sont dehors et papotent en permanence avec les autres Népalais. J’ai pas mal réfléchi sur le sujet. Bien sûr, cette réflexion reste valable tant que les charges à porter ne mettent pas leur santé en danger et que cela est réalisé dans un cadre établi".

Thomas et Luc ont tous les deux été conquis par leur trek népalais malgré la contrainte de l’altitude. Mais cette aventure reste accessible selon eux, à condition de connaître son corps. Luc suggère de commencer par un circuit de quatre jours. "On monte un peu plus chaque jour, on observe comment on réagit, et si on est en forme, on vise plus haut et plus long". Thomas se voit retourner au Népal d’ici cinq à dix ans : "Le projet serait de se rendre dans un campement plus isolé, avec moins de refuges et davantage d’autonomie". Luc souhaite également rééditer l’expérience du trek. "Je vais en refaire, c’est certain (sourire). J’ai ressenti une petite frustration de ne pas avoir été encore plus confronté à l’altitude. J’ai même l’impression de ne pas avoir été au bout de moi-même". Une bonne raison de recommencer. Pour aller plus haut.

Les trekkeurs peuvent marcher jusqu'à 20 km par jour.

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