On a testé, le Dillens à emporter

Comme tout le milieu, Le Dillens a dû se réinventer et a opté pour une version « en bocal », soit une épicerie dans laquelle on trouve plein de choses à manger… en bocal donc. 

Texte et photos : Florence Hainaut et Carlo De Pascale. |

Je crois que si je jette encore une poubelle pleine de contenants de nourriture à usage unique, je vais tout plaquer pour aller élever des chèvres dans le Larzac. J’inviterai Carlo de temps en temps. Soutenir les restaurants en cette période quand on fait gaffe à sa production de déchets, c’est l’assurance de nager en pleine dissonance cognitive. Un peu comme militer pour les droits humains et avoir un smartphone. Bon, on s’invente les problèmes qu’on peut, ça évite de se souvenir qu’on traverse une période un tantinet angoissante. Alors que je chouinais sur un énième pot en plastique sans savoir si je devais le mettre dans le sac bleu ou le blanc, m’est apparu en rêve un bocal en verre consigné. C’est lourd, ça fait bling bling dans le sac, faut aller le rapporter, mais ce n’est pas comme si nos loisirs actuels ne nous laissaient pas le temps de le faire. 

Le lieu

J’ai donc patiné jusqu’au Dillens un lieu que j’ai fréquenté plus que de raison quand il était encore un bar où les fêtes semblaient ne jamais prendre fin. L’endroit est récemment devenu un vrai restaurant bistronomique dans lequel on ne peut plus hurler au barman « Allez, juste un dernier verre ! », mais où l’on mange excellemment bien. Faut dire que le grand Ben y a installé ses tabliers depuis deux ans. Je dois à cet homme ma passion dévorante pour les joues de porc et les navets. D’abord serveur dans un café branché, la cuisine le titille. C’est au Garage à Manger qu’il apprendra le métier. Et au Dillens qu’il volera de ses propres (grandes) ailes. Il s’associe avec le petit Ben et Thomas, gardiens du lieu depuis des années. 

Comme tout le milieu, ils se sont retrouvés fort dépourvus lorsque la Covid fut venue. Et comme tout le milieu, ils se sont vite réinventés pour survivre. Le Dillens est devenu « le Dillens en bocal »,  une épicerie dans laquelle on trouve plein de choses à manger en bocal (qui l’eut cru), une sélection de vins nature particulièrement étoffée, du plus classique au plus pouet pouet, des sakés de qualité, des bières qui viennent de pas loin, des bouquets de fleurs et puis des petits trucs selon l’inspiration. Et puis on y trouve le grand Ben, le petit Ben et Thomas, qui bossent comme des dingues en espérant que ça paie au moins leurs charges. Je ne sais pas où les restaurateurs et restauratrices vont chercher la force chaque matin. Et je sais qu’ils et elles ne sont pas les seuls à galérer depuis un an, mais ce sont elles et eux que je vois chaque semaine pour nos chroniques confinées. D’où la bouffée d’empathie et d’admiration.

Les bocaux

Tout ça nous éloigne un peu de nos estomacs. Je vous disais donc que j’avais patiné jusqu’au Dillens. Période de grand froid oblige, le grand Ben avait préparé des bocaux de tartiflette que Carlo aurait adorés. J’ai opté pour des rillettes de poulet rôti (6€) et un pickles de carottes et oignons brûlés (4€). Associez les deux sur une tranche de pain de campagne grillé et dites « merci la vie ». Les plats se réchauffent au bain-marie (à bocal fermé, sinon ça devient sec). L’effiloché de porc aux cèpes, purée au potimarron (16€) est un délice. La parmigiana de butternut à la scarmoza (17,50€) aussi. Et le chou farci (8€), dans lequel j’aurais peut-être mis plus de chou, est exactement ce dont j’avais besoin pour traverser un mois de confinement en plus.

Toutes leurs viandes viennent de chez Segers, leur voisin boucher du Parvis de Saint-Gilles (le seul à qui je dis merci après avoir fait la file 30 minutes tant tout est bon et à prix corrects). Les légumes sont bio et de saison (d’où le butternut au lieu de l’aubergine dans la parmigiana). Ben prépare des plats à la fois super simples, généreux (un grand bocal nourrira deux humains de taille normale), bon marchés et impressionnants de précision. Chaque semaine, des classiques (boulettes sauce tomates, vol-au-vent) « parce que c’est ce dont les gens ont besoin pour le moment », de la soupe, des pickles de légumes, des confitures, des rillettes.

Pour revenir à nos bocaux, j’ai hâte de leur rapporter mes consignes. Et je les échangerai contre des bocaux pleins. Ma poubelle ronronne, je me régale, je ne me ruine pas. Encore une formule qui va me manquer quand la vie reprendra ! 

11, place Julien Dillens, 1060 Bruxelles. Ouvert du mercredi au vendredi de 12h à 19h et le samedi de 10h à 17h. ledillens.be

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