Des tableaux en corde, la tendance déco qui interpelle

Alors que l’upcycling devient une règle d’or en design, une artiste belge a fait de la corde son principal outil. Elle la met en mouvement dans ses œuvres et crée des tableaux singuliers: entre sculpture, peinture et tapisserie. Visite d'atelier chez Axelle Gosse.

 

Audrey Morard, Photos D.R |

L’atelier d’Axelle Gosse est décoré de tableaux colorés aux formes imposantes. En s’approchant de plus près, on découvre des cordes collées les unes aux autres. Certaines sont habillées de petites tâches, d’autres de nœuds. Ces particularités pourraient rebuter plus d’un artiste, mais Axelle Gosse tient à les conserver. “Plus il y a de défauts, plus cela va me plaire (rires). Ce serait moins intéressant à travailler. On m’a souvent demandé ‘Mais pourquoi gardes-tu cette corde alors qu’elle est tachée ?’ Si la tache est là, c’est qu’elle doit y être ! Je ne veux surtout pas dénaturer la corde”.

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Apprivoiser la corde

Avant de devenir artiste, Axelle Gosse a été décoratrice pendant vingt ans. Il y a huit ans, elle se lance dans la création de petits fauteuils. Elle en produit une cinquantaine, puis décide d’ajouter des cordes à ceux qu’elle n’a pas utilisés. “C’est comme cela que j’ai commencé à aimer le travail de la corde”. La Belge commence alors à développer une technique bien à elle, où la première étape consiste à tracer des lignes sur une toile. “Je ne pars pas d’un mouvement, je me laisse avant tout guider par mon instinct. Je dessine spontanément les mouvements. Si on m’impose un thème, je ne suis pas aussi à l’aise. J’ai l’impression d’avoir moins de liberté”. Axelle appose ensuite les premières cordes de son tableau sur les lignes tracées à l’aide de deux ou trois couches de colle. “Certains tableaux voyagent vers des lieux humides ou tropicaux comme Porto Rico. Il est essentiel que l'œuvre tienne le plus possible”.

Le jour de notre rencontre, l’artiste dispose sur sa grande toile blanche des cordages bordeaux, bleu turquoise, orange et marron les uns à côté des autres. Un travail d’orfèvre qui prend en moyenne trois semaines. “Explorer la corde est passionnant. Je peux passer cinq ou six heures d’affilée sur un tableau. Plus j’avance dans la technique, plus je veux aller loin”. Car Axelle Gosse a le souci du détail. Elle confie avoir arraché à plusieurs reprises certaines parties de ses œuvres, avant de les recommencer. “Les tableaux retravaillés sont souvent les plus beaux car il y a une vraie recherche. Ils m’apportent plus de richesse. Un tableau est une partie de soi qui met du temps à sortir”, sourit-elle.

“Je ne cherche pas la perfection”

La couleur est un élément primordial pour Axelle Gosse. Une oeuvre avec des cercles jaunes, violets, verts trône dans son entrée. Un tableau rectangulaire décoré de couches de couleurs chaudes (orange, rouge, marron) est accroché sur l’un des murs de sa cuisine. “La couleur est le fondement de mon travail. J’y suis sensible depuis mon plus jeune âge. Grâce à mon ancien métier, j’ai aiguisé mon regard et les associations de couleurs. Pour l’anecdote, mon premier tableau était blanc (rires), mais il ne reflétait pas ma personnalité, ce n’était pas moi. J’ai eu le même sentiment le jour où j’ai imaginé une oeuvre totalement noire”.

Axelle se fournit en cordes partout où elle passe. Elle peut en dénicher dans une grande surface en Afrique du Sud comme dans une brocante en Belgique. En plus de la couleur, elle est attentive à la texture de la corde. “Je préfère les cordes rêches comme celles en chanvre. J’aime l’idée qu’une corde puisse s’effilocher car elle est mal filée. Je ne cherche pas la perfection”. L’artiste a été plus d’une fois confrontée à des difficultés. “La corde peut parfois ne plus répondre à nos mouvements. On a beau remettre de la colle, déposer un poids, utiliser des durcisseurs, il n’y a rien à faire. Elle ne veut pas se mettre dans le sens qu’on souhaite lui donner. Il faut savoir dire stop dans ces moments-là”.

Le voyage et la nature comme moteur

Les voyages constituent l’une des principales sources d’inspiration d’Axelle Gosse. Elle essaie de retranscrire dans ses tableaux toutes les couleurs et tous les espaces qu’elle a pu contempler. La nature tient aussi une place essentielle dans son processus de création. “J’aimerais davantage infuser dans mon travail une partie plus urbanistique où la nature reprendrait ses droits et possession de l’environnement”. La Belge a l’habitude de voyager tout comme ses œuvres. Elle reçoit des demandes des Açores, de Londres, de France, mais aussi de San Francisco. Elle a récemment vendu un tableau au DJ Lost Frequencies. Axelle aimerait pour ses futurs projets créer davantage de mobilier comme des tables basses et s’envoler pour le Maroc afin de teindre ses cordes. “J’ai aussi envie de mettre plus de relief, plus de matières dans mes créations. Mais pour réaliser tout ça, il me faudrait plus de temps (rires)”.

axellegosse.be

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