Comment reconnaître un restaurant vraiment durable ?

Loin des vieux clichés, comment reconnaître si un restaurant se trouve réellement dans une démarche durable ? Rencontre avec Noémie De Clercq, sérial entrepreneuse passionnée de food qui vient de dévoiler Manifeast, une nouvelle revue qui référence les tables vraiment durables à Bruxelles.

Par Camille Vernin, Photo : Pexels |

Pourquoi prête-t-on autant d’attention aux aliments qui entrent dans notre cuisine, pour relâcher notre vigilance une fois au restaurant ? Tout simplement parce que l’on estime que les professionnels travaillent forcément avec des produits de qualité bien sourcés. Ce n’est pas tout à fait vrai comme nous l’explique Noémie De Clercq. La sérial entrepreneuse passionnée de food derrière Mingle (de la consultante food et durable à l’attention des restaurateurs), vient de dévoiler Manifeast. Dans cette nouvelle revue jolie comme un objet déco, elle analyse ce que l’HoReCa met dans nos assiettes et référence les tables vraiment durables à Bruxelles.

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Durable, ça veut dire quoi ?

Et elle propose d’aller encore plus loin que le simple bottin à bonnes adresses durables. Elle élabore un tableau de bord avec 18 critères bien précis à partir desquels elle analyse nos adresses bruxelloises. L’objectif ? Développer ce qu’elle appelle un « radar de durabilité ». Comment repère-t-on une adresse tenue par des passionnés d’un resto coté en Bourse ? Celle qui propose simplement du café de spécialité ou du vin nature de celle qui limite le gaspillage alimentaire, cuisine de saison autant que possible et favorise le circuit court ?

« Le but n’est pas de culpabiliser le mangeur ou la mangeuse ni le restaurateur », précise bien Noémie. « Simplement montrer ce qui est possible, ce qui est mis en place dans certaines adresses, et de permettre aux gens qui se rendent au resto de placer le curseur sur les critères qui sont importants pour eux ». Parmi ces derniers, on citera notamment : production raisonnée (avec des aliments bio et de saison), transports réduits, déchets limités,…

« Chacun possède sa propre hiérarchie de valeurs. Certains mangeront local pour des raisons écologiques, d’autres décideront de consommer bio pour des raisons de santé. Personnellement, je suis issue d’une famille de restaurateurs et d’agriculteurs : il m’est impensable de ne pas payer justement les personnes qui sont à l’origine de la nourriture que je consomme au quotidien », confie Noémie, qui pense peut-être rajouter un critère lié à l’égalité des sexes à l’avenir.

Aller au-delà de l'assiette

Chose intéressante et que l’on a tendance à oublier, être durable, ça se passe aussi hors de l’assiette. Cela inclut la « responsabilité sociale » de chaque adresse vis-à-vis de ses employés. « À chaque restaurateur, j’ai posé la question : qu’est-ce que vous mettez en place pour que votre personnel reste ? », explique-t-elle. Chez Titulus, les employés se voient offrir un massage tous les trois mois car on connaît la pénibilité du travail HoReCa sur le corps. Chez Nona : en plus des visites chez les producteurs belges tous les trimestres, le personnel bénéficie d’une évaluation deux fois par an pour s’améliorer, chose rarissime dans le secteur.

Au Café Boudin, la boss Alice partage une charte de valeurs avec toute l’équipe. Elle paie les surprimes liées au travail du dimanche et des jours fériés et veille à condenser tous les jours de travail pour permettre plus de jours de congé d’affilée. « On pense que c’est la base, mais ce n’est pas le cas. L’HoReCa est un milieu où il y a beaucoup de turnovers. Ce sont des petites choses comme ça qui font que les travailleurs restent », explique Noémie.

Quand sustainable rime avec sexy

Même quand on est déjà sensibilisé, il suffit de lire « durable » pour penser teintes neutres, odeur aseptisée, de la verdure à perte de vue et ambiance un brin mormone. Des clichés qui ne sont plus forcément d’actualité, mais qui pèsent encore fortement sur notre inconscient collectif. « J’ai développé mon mini-radar depuis des années. Je fais gaffe à tout. Généralement, quand c’est instagrammable, je fuis. S’il y a un avocado toast à la carte, c’est fini », sourit Noémie, qui s’est pourtant refusée à intégrer « des adresses ‘végétarien chiant’ des années 2000 » pour citer ses mots.

On sort des clichés instagrammables donc, mais on reste sur des adresses qui ont réussi le pari de rendre le durable hyper-sexy. Elle cite le Dillens à Saint-Gilles, son « salon » ou Bia Mara et ses savoureux fish and chips. En même temps, elle casse un second cliché tenace : manger raisonné, c’est forcément cher. « Je ne voulais pas créer un recensement des grandes tables vertes inaccessibles, mais montrer que le durable c’est la pizzeria du coin (Nona), c’est le durumier version 'sexy' (Pois Chiche), c’est un food truck (El Taco Mobil), ou encore un bar à vins avec des petites assiettes à partager (Achille). »

Comment les repérer ?

On sait désormais ce qu’est une adresse durable, mais comment les repérer au premier coup d’oeil quand on est néophyte ? « Franchement, impossible, affirme d’emblée Noémie. À part les gens super sensibilisés ». On s’en doutait mais on est un peu déçus… Le seul indice « physique » ? Les labels « Good Food » à Bruxelles et « Tables du Terroir » en Wallonie. Petit bémol, leurs critères varient beaucoup. On peut par exemple retrouver du Coca au menu et être labellisé. Surtout, tous les restaurateurs n’en veulent pas. En cause : une méconnaissance encore trop importante de la part du public. En effet, la procédure est très lourde dans la vie déjà chargée d’un restaurateur, tout ça pour ne pas attirer forcément beaucoup plus de clients. Résultat, beaucoup d’adresses ne sont pas certifiées, alors qu’elles sont pourtant ultra engagées.

Ne reste plus qu’à développer nous-même notre sens critique, en se procurant la revue Manifeast notamment, ou en se renseignant davantage sur les adresses que l’on fréquente. Le site internet de « Good Food » est un bon allié aussi. Pour les grandes tables, le Michelin distribue une « étoile verte » depuis 2020. Et quand on demande à Noémie par où commencer là, maintenant, tout de suite, elle cite sans hésiter Frank. « J’ai très faim là, donc je m’attablerais bien chez eux. C’est un ancien de chez Humus x Hortense, c’est hyper comfort food et il y a des brunchs à tomber »

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