Eric Domb : success-story d'un jardinier qui termina Patron de Pairi Daiza

Eric Domb nous a reçus dans son petit paradis de nature. Il nous parle de son rêve et de l’avenir des parcs de loisirs qui passera forcément par une autre vision de l’écologie. 

Par Ingrid Van Langhendonck, Photos Laetizia Bazzoni et Pairi Daiza |

Un businessman d’un autre genre 

Après une longue promenade au gré des jardins du parc, par un joli matin d’avril, nous nous retrouvons en Terre du Froid, un des 8 mondes de Pairi Daiza pour évoquer avec son fondateur le présent et le futur du Parc. Alors qu’il annonçait récemment avoir décidé de s’arrêter une fois son douzième monde inauguré, Eric Domb se montre confiant en sa bonne étoile et en l’avenir de son projet. : « En fait, ma vocation était d’être jardinier, fondamentalement, et comme tous les jardiniers, j’aime aller dans les détails, ce que je n’ai pas encore pu faire parce que je vivais dans l’angoisse de ne pas terminer mon projet…»

Mais quand il définit plus avant son concept, il ne s’agit pas d’un simple business plan, mais de quelque chose de bien plus spirituel, et c’est sa marque de fabrique. « Au final, j’ai créé une société commerciale uniquement pour pouvoir réaliser mon projet de vie. Rien ne m’insupporte plus que quand on me définit comme un homme d’affaires ! Ce n’est pas que je sois hostile au concept, mais je n’ai pas voulu faire des affaires au départ, je ne voulais rien vendre: j’ai voulu créer mon Jardin Extraordinaire. Je définis plus ce projet comme on décrirait un musée, ou un projet qui est dans la transmission d’un certain patrimoine : l’objectif est large, mais les financements font partie des contraintes. Plus le parc est rentable, plus on peut réaliser de choses, prendre soin des animaux… C’est un projet au service d’un projet. Pourtant, nous vivons dans une société où on oppose souvent les démarches : les choses sont soit commerciales, soit culturelles : il y a une sorte d’hostilité envers l’acte marchand, qui est forcément perçu comme vil et cupide, alors qu’il s’agit juste de savoir comment financer un projet qui a une âme. »

Un projet qui a une âme

Il le répètera plusieurs fois, Eric Domb pense avoir enfin compris ce qu’il faisait : « Je réalise un rêve d’enfant, certes : mais au-delà de cela, nous avons voulu créer un lieu qui puisse réconcilier l’humain et la nature. C’est pour cela que dans chaque monde, vous avez les animaux, les plantes mais aussi des minéraux, d’autres merveilles de la nature, mais aussi et surtout vous avez l’humain : l’architecture, la poésie, l’artisanat… Je suis un peu en contradiction avec la démarche traditionnelle des jardins zoologiques qui ont souvent tendance à opposer l’homme et l’animal : les bâtiments sont purement fonctionnels, il n’y a pas d’intégration des deux univers et ce n’est pas notre démarche. Je fais partie de ceux qui pensent que continuer à présenter la préservation de la nature comme un système devant se libérer de l’humain n’est pas réaliste, ni porteur d’avenir, il est ultraculpabilisant. Je pense pour ma part que si on veut conscientiser l’humain à la nécessité de prendre soin de sa planète et lutter contre la disparition de la vie sur terre, cela passe par l’amour et l’émerveillement »

Un coup de foudre 

"En novembre 1992, on m’a emmené ici, on m’a présenté l’Abbaye de Cambron ; et je suis tombé fou amoureux de cet endroit. J’ai acheté ce domaine pour un peu moins de 100 millions de francs belges à l’époque. Je me suis endetté jusqu’au trognon, j’ai emprunté de l‘argent à mes parents, mes frères, à tous mes clients, j’ai tout mis en gage pour acquérir cet endroit.  Surtout que mon idée n’était pas claire à ce moment : j’étais venu voir ce site à la demande du beau-père de ma secrétaire, qui voulait en faire un jardin ornithologique. Il cherchait des investisseurs et m’emmenait avec lui pour l’aider à consolider le projet.  Sauf qu’en visitant le domaine, il a été découragé, persuadé qu’il n’y arriverait jamais, et a laissé tomber son idée. Pour moi ça a été un déclic. Je me suis lancé sans aucune aide, avec un business plan bancal, un banquier inconscient et puis un apport en capital de Wapinvest et de la SRIW. Aujourd’hui, nous représentons 500 emplois directs et tout ce que je demande à la Région, c’est de me laisser faire. »

La recette de son succès 

Alors, quel serait le secret de ce Parc, qui a reçu en juin 2020, pour la troisième année consécutive, le titre de « Meilleur parc zoologique d'Europe » aux Diamond Theme Park Awards. Les oscars des Jardins animaliers et des parcs d'attractions ?  

 

« Les gens reviennent, parce qu’ils sentent qu’il y a quelque chose de vrai. Tout ici, jusqu’au dernier gravier est authentique, les arbres centenaires ont été importés, comme les rochers ou les minéraux. Ce sont de vrais jardiniers chinois qui ont élaboré le jardin chinois, selon les méthodes ancestrales. Mon conseil d’administration en voyant le coût de cette opération, m’a accusé de vouloir me faire plaisir sur le dos de mes actionnaires, mais il n’était pas question pour moi d’aller chercher des lanternes en ciment ou des décors en carton-pâte. On a créé un jardin chinois qui est un modèle du genre et quand vous vous y promenez, vous vous y sentirez bien parce que tout a été fait jusque dans les moindres détails pour que la magie opère. J’ai voulu la même démarche dans tous les mondes et aujourd’hui, même sans connaître les détails historiques ou conceptuels, les gens ressentent en s’y promenant les siècles de relation entre l’homme et la nature qui y sont décrits, même s’ils sont idéalisés, ils sont une sorte de ‘best of’ de ce que ces mondes ont à nous apprendre. Donc oui, ce qui caractérise notre succès, c’est que les visiteurs reviennent : un wallon sur trois revient chaque année visiter le parc, 80% de nos visiteurs sont belges : tout cela prouve que nous parvenons à créer du lien entre les visiteurs et cet endroit. »

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