Journée des droits des femmes : Quand la mode fait bouger la condition féminine

En ce 8 mars, journée internationale des Droits des Femmes, on se penche forcément sur tous les aspects de la vie des femmes, et bien que cela puisse sembler anodin, les vêtements que portent les femmes en disent long sur l’état de leurs droits et de leur place dans la société à une époque donnée.
Petit tour d’horizon.

 

Ingrid Van Langhendonck, Photos Photonews |

La mode par genre, un concept récent

Quand on observe l’histoire du vêtement, on constate qu’à l’Antiquité, au Moyen Âge et jusqu’à la Révolution Française, les hommes et les femmes partagent toute une série de codes vestimentaires: les robes, les pagnes, les toges font partie de l’habillement des rois et des seigneurs antiques. Ce n’est pas étonnant, d’ailleurs, que l’Égypte connue une période de grande égalité entre les hommes et les femmes, associée à une certaine mixité en termes de vêtements. Les rois égyptiens portent la toge, la robe, la cape,… on porte de longues perruques et du maquillage à la cour de Louis XVI… Finalement, c’est au tournant du XIXe siècle, quand démarre l’ère industrielle que l’homme abandonne rubans, dentelles, fleurs brodées et soies colorées pour arborer un costume, neutre, sombre, composé essentiellement d’un pantalon et d’un blazer sobre.

Reléguant à l’univers féminin, réputé futile, les imprimés, les volants, les drapés, les matières brillantes… Cette notion de pudeur que l’on pense rétrograde est en fait singulièrement récente. Il fut des époques où les femmes avaient le droit de montrer leurs seins de manière ostensible. Cela ne signifie pas qu’elles avaient davantage de droits, évidemment, mais le fait qu’à certaines périodes de l’histoire on ait davantage enfermé la femme dans des codes vestimentaires dont il est indécent de s’affranchir en dit long sur la place qu’on lui accorde et le chemin qu’il reste à parcourir vers davantage d’égalité.

Sur cette fresque trouvée dans une tombe de Louxor, on voit clairement les hommes porter des tuniques, semblables à celles portées à la même époque par les femmes

Le costume pour femmes, un scandale dans les années 60

C’est dans le courant des années 30 que le look à la garçonne se répand et séduit. Les femmes s’affranchissent du corset après la guerre. Alors qu’elles ont souvent repris en main l’industrie, les commerces et les tâches des hommes durant la guerre, elles ont gagné le droit de porter un vêtement qui leur laisse davantage de liberté de mouvement. C’est une étape importante et un phénomène de mode qui accompagne un véritable mouvement de libération de la femme. Pourtant en 1968 quand Françoise Hardy apparaît en smoking Saint-Laurent à l’opéra de Paris; elle est violemment huée, au point de quitter la salle. Une femme en pantalon, qui s’approprie les codes vestimentaires des hommes serait donc aussi choquante qu’une femme en minijupe ou trop dénudée…

François Hardy en 1966... Difficile de croire qu'un telle tenue puisse faire scandale

Car la minijupe de Mary Quant, qui apparaît en Angleterre au début des années 60 est un exemple d’une des victoires des femmes sur les convenances. Quand la mode de la minijupe déferle sur la planète mode, la société bien-pensante s’offusque, mais les femmes tiennent bon, font fi des critiques et imposent la liberté de se balader jambes nues. Cette révolution est au moins aussi importante que celle qui a libéré les femmes du corset 30 ans plus tôt!

Il faudra attendre les années 70 pour davantage de liberté et une certaine indifférence au choix vestimentaire des unes et des autres… Il est d’ailleurs intéressant de noter que durant les années 70, en pleine période peace and love, la révolution sexuelle met les hommes et les femmes à pied d’égalité en matière de désir et l’égalité entre les hommes et les femmes fait un bond en avant. La mode elle aussi se fait alors moins contrastée entre les hommes et les femmes : les hommes des années 70 portent les cheveux longs, des chemises à fleurs, des couleurs vives et des talonnettes… Les allures androgynes déambulent dans les rues…
Les sociologues de la mode font des liens très évidents entre la condition de la femme, sa place dans la société et les vêtements que l’on voit alors descendre dans la rue.

Mary Quant, une révolutionnaire

La Mode non genrée, la réponse ultime ?

Ainsi, on aimerait pouvoir se réjouir de voir aujourd’hui paraître bon nombre de collections unisexe, aurait-on enfin compris que le vêtement ne peut pas être le signe d’une distinction entre les hommes et les femmes, d’une discrimination? … Mais il faut bien constater que ce sont souvent des vêtements masculins revisités: une mode lisse qui ne met en valeur ni le corps de la femme, ni le corps de l’homme… À défaut de pouvoir laisser chacun assumer et vivre pleinement son identité, on se contente en 2022 de vouloir uniformiser pour ne pas cloisonner. Pour de nombreux observateurs et sociologues, ce n’est pas le bon chemin… l’égalité entre l’homme et la femme sera probablement atteinte le jour où une femme pourra porter absolument ce qu’elle veut, même en rue sans être jamais inquiétée ou critiquée…
Ou, mieux quand un homme osera porter une robe, une jupe sans être directement étiqueté au niveau de son orientation sexuelle…

La vidéo du jour :

À ce titre, certaines femmes fortes et indépendantes: comme Madonna, Lady Gaga, ou plus récemment Rihanna sont le signe de cette montée en puissance d’une autonomie et d’une indépendance vis-à-vis des diktats sexistes. A travers leurs provocations vestimentaires, ces femmes de pouvoir manifestent en s’autorisant des tenues excentriques, originales ou dénudées, et sans avoir de comptes à rendre à personne… Une démarche qui ne descend pas encore dans la rue mais qui fait tomber certains tabous et fait avancer, pas à pas, les mentalités…

Provocation ou émancipation? Rihanna au défilé Dior en mars 2022

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