La bataille des osso buco de Carlo et Florence

En ces temps de confinement, impossible d’aller au restaurant. On se rattrapera quand ça sera fini. Et les chefs et cheffes auront besoin de nous tous et toutes pour surmonter la catastrophe économique qui se prépare. En attendant, on se débrouille pour se nourrir sans eux, quitte à s’affronter par plats interposés !

PAR FLORENCE HAINAUT ET CARLO DE PASCALE. PHOTOS MYRIAM BAYA. |

Carlo et moi sommes d’accord sur à peu près tout, dans la vie. Mais nous avons quand même un différend. Un gros. Il affirme que l’osso buco, ce ragoût milanais de jarret de veau, se prépare sans tomate. Et moi je dis avec. Alors d’accord, il est Italien et chef de surcroît, donc a priori plutôt au courant des us et coutumes de ce genre de truc. Mais ma recette, c’est celle de ma mère, qui la tient elle-même de la sienne. Autant vous dire que s’en écarter est interdit par la convention de Genève.

Cette semaine, on a donc organisé un match d’osso buco, tout en respectant les plus strictes règles de confinement. J’aime encore bien dire à Carlo qu’il fait partie du public à risque pour le COVID-19. Ça le fait râler et il est drôle quand il râle. Il a donc cuisiné son osso buco (je vous préviens, il manquait de tomate), moi le mien. La livraison s’est faite par paillassons interposés, le debriefing via WhatsApp.

La version de Carlo

Florence qui me challenge sur l’osso buco, non mais je rêve ! Ce plat essentiellement et viscéralement milanais se vautre dans le beurre, le vin blanc, le bouillon, mais jamais la tomate. Ou alors, juste une ou deux tomates pelées pour teinter un peu la sauce, mais, un déluge de sauce tomate, non ! C’est une corruption, certes pratiquée au quotidien par nombre de cuisiniers et cuisinières, mais non !

Dans une cocotte en fonte, je fais rissoler au beurre, une brunoise de céleri, un demi-oignon émincé et une gousse d’ail. J’y colore les ossibuchi (jarrets) préalablement salés et farinés. Quand ils sont légèrement dorés, je mouille presque à hauteur de vin blanc et de bouillon de bœuf. Je poursuis la cuisson à feu doux à couvert pendant 2 h 30. Il faut que ça frémisse. En fin de cuisson, je filtre le jus de cuisson, je garde mes ossibuchi au chaud et je réduis le jus de cuisson à consistance nappante. Au moment de servir, je nappe de jus de cuisson, je parsème d’une gremolata de zeste de citron, ail et persil. Je sers avec un risotto classique au safran, bien chargé en beurre et parmesan, refroidi puis grillé à la poêle.

    L’avis de Florence  

    Ça manque de tomate ! Le risotto est fabuleux, mais grassouillet, comme tout le reste. Pardon de t’apprendre la vie, Carlo, mais regarde comment on fait un vrai osso buco...

      La version de Florence 

      Dans la cocotte en fonte de ma grand- mère, et dans un mélange huile et beurre, je fais dorer 1kg de tranches de jarret de veau avant de les éponger. Dans la graisse, je fais cuire (5 minutes) 3 carottes en fines rondelles, 2 branches de céleri en morceaux, 1 oignon et 1 gousse d’ail finement émincés. Je saupoudre les légumes de farine et fais cuire quelques minutes en tournant constamment. Déglaçage avec 1dl de vin blanc, 1dl de bouillon de poule et 500g de tomates (en boîte ou fraîche et émondées). Sel, poivre, quelques branches de persil, laurier et on enfourne deux heures à 160 degrés. C’est tout. On sert avec une gremolata, évidemment. Ah, un détail : je l’ai servi avec un riz de chou- fleur plutôt que mes habituelles tagliatelles, pour alléger le plat. Le clou du cercueil de Carlo, sans doute. Je l’avais pourtant prévenu qu’il était un public à risque. Il n’avait pas compris pourquoi.

        L'avis de Carlo

        Allez, c’est pas mal. Le riz de chou-fleur, désolé mais non ! Mais c’est moins pire que des tagliatelles, qui n’ont jamais leur place en garniture.

        Le mot de Carlo

        Florence le sait, j’aime faire et refaire des plats à l’infini. J’aime les plats historiques, comme l’osso buco. Ce plat a deux particularités passionnantes. La première c’est la présence de la gremolata. Un condiment où l’on mélange le zeste de citron râpé, l’ail très finement émincé et le persil. Ce mélange citronné se marie parfaitement avec le jus riche de l’osso buco, qu’il soit tomate ou... pas tomate.

          La deuxième, c’est que contrairement à ce que l’on croit, les tagliatelles n’ont rien à faire à côté de l’osso buco. La tradition veut qu’on le serve avec un risotto au safran, risotto giallo ou risotto alla milanese. Mieux encore, cet accompagnement sera encore plus traditionnel s’il est sauté, voire grillé, après refroidissement. Et n’oubliez pas la moelle. Mangez-la avec le risotto. Puis, on en reparle !

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