Le Tournant, le resto qui fait bouger Matongé

En plein Matongé, un quartier, dont on dit qu’il est « en mutation », où adresses africaines, asiatiques et cantines pour jeunes pas toujours jeunes qui aiment le vin bio et la cuisine « avec un petit quelque chose en plus » se côtoient, Carlo et Flo ont testé la cuisine du Tournant…

Texte et photos Florence Hainaut et Carlo de Pascale. |

Justement, c’est dans le « tournant » de la chaussée de Wavre, à Ixelles que ça se passe… Entre Certo, Osteria Bolognese, Kitchen 151, par exemple, sans oublier certains « spots » de la proche Place Saint-Boniface qu’on voudra bien sauver, Le Tournant a trouvé son public depuis plus de vingt ans au total, dont presque dix sous la direction de Denis Delcampe.

A L’heure où vous lirez ces lignes, les restaurants auront rouverts, mais j’ai eu la chance, sans Florence, qui attend son vaccin pour vraiment déconfiner, de jauger (le mot est incontournable) de la terrasse couverte aménagée à quand même 60 mètres de distance de la cuisine, derrière la Maison Demeuldre, fournisseur historique des listes de mariage du Bruxelles chic pendant des décennies, laquelle maison a gracieusement prêté l’espace au Tournant et à Kitchen 151, la voisine d’en face.
Une terrasse bien abritée du vent, de la pluie, avec un système de walkie-talkies entre cuisine et service, un système bien rodé depuis près de deux semaines au moment de notre passage.

Des entrées canailles

Je l’ai dit, c’est rôdé, Denis Delcampe a volontairement transformé la carte habituelle en formule menu à prix canon (35 euros, avec quelques choix qui prévoient un supplément), de fait, ça fait une vraie petite carte, avec des entrées un peu « canailles » (c’est un mot ringard de chroniqueur pour dire principalement avec du gras) comme le foie gras maison, à base de foie de canard flamand bientôt condamné à disparaître, sans oublier un « ceviche »; et plats plutôt mijotés, poulet à l’estragon,  dahl de lentilles, roulade de veau en basse température sans oublier ce soir là le fameux tartare de bœuf au couteau aux trompettes de la mort.

Le foie gras arrive avec un excellent pain au levain (foin de mièvres brioches avec le foie gras !), une confiture de figues et par ce froid polaire, il nous réchauffe le cœur et le corps, mon invité et moi. Mon commensal qui rêvait du tartare depuis le confinement se régale, les frites maison sont aujourd’hui remplacées par des grenailles; les frites n’auraient pas supporté de traverser la chaussée de Wavre, et on ne va pas faire les difficiles.

Ma roulade de veau, qui finit de fondre dans son bouillon de cuisson arrive dans une cocotte bien chaude; elle se défait à la fourchette et réjouit le palais. Les garnitures sont un petit peu plus en mode « mise en place » que d’ordinaire, légumes méditerranéens « gardés au chaud » et riz basmati.  On est peu moins « bistronomique » (mot honni, mais on se comprend) que d’habitude (quoique le tartare est pile dans le registre), un peu plus bistro simple, mais là aussi on sait que le chef Denis a dû faire avec des conditions pas simples et, une fois de plus, on salue la performance.
Mon compagnon de tempête prendra l’assiette de fromages, une belle sélection du Comptoir du Samson de la proche place Flagey, tandis que - comme à chaque fois que je mange dans le froid depuis le 8 mai - je me termine au sucre avec un simple sorbet au fromage blanc, point trop sucré, juste complété d’une tuile qui goûte bon le beurre.

Dans les verres ?

On aura commencé avec un pétillant alsacien, Crémant d’Alsace 0 dosage d’Achillée 2018, 8€ le verre, pour suivre avec un Côtes du Rhône « Les Molières 2017 » (30 euros) qu’on nous a vendu (avec raison) comme une « syrah sur le fruit », vu qu’il fallait arbitrer entre les goûts de mon invité (qui aime les vins riches et concentrés) et les miens (le gamay, carrément).
Parce que les circonstances sont particulières, une fois n’est pas coutume, nous avons parlé avec le chef, notamment de l’après 9 juin. Denis Delcampe compte continuer le système du menu, mais avec des choix étendus et souhaite revenir à « un travail plus en précision, une cuisine « minute », de préparations sur l’instant. J’ai envie de beaucoup de choses et l’envie de manger est souvent à la base de mes menus; tiens,  j’ai particulièrement envie de cuisiner du ris de veau, par exemple. Je pense que cette cuisine de l’immédiateté, au final, ça se ressent » 
21h55, Denis vient annoncer la fermeture imminente pour ce soir, «car les flics passent », on paie, on a passé un bon moment, on n’a même pas eu froid, ou presque pas.

L'adresse ? 168 chaussée de Wavre, 1050 Ixelles. restaurantletournant.com

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