L'étoilé le moins cher de Belgique confie le secret de son menu ultra accessible

Payer 40€ dans un restaurant étoilé, un vœu pieux ? Pas si l'on en croit le menu de cette adresse située à moins d'une heure de la capitale. On a demandé le secret de ce rapport qualité/prix audacieux à son chef. 

Par Camille Vernin, Photo : Le restaurant Quai n4. |

Manger dans un restaurant étoilé est-il forcément un luxe réservé à l'élite ? Oui et non. Rappelons dans un premier temps que le guide Michelin se base uniquement sur la qualité des assiettes pour attribuer ses étoiles, en fonction de 5 critères universels (sourcing, savoir-faire, harmonie des saveurs, style du chef et régularité). À Singapour, le petit boui boui de quartier Hill Street Tai Hwa Pork Noodle propose ainsi des nouilles allant à 6$ dans un cadre loin du standing que l'on se fait d'un resto étoilé.

Vertigo : le bar caché de la capitale européenne se transforme en restaurant 

Manger étoilé pour 40€

Plus près de chez nous, à Ath, un restaurant a l’ambition revendiquée d’être l’étoilé le moins cher de Belgique. Son nom ? Quai N°4. Située à une petite heure de Bruxelles, cette adresse récompensée d'une étoile au Michelin en 2022 propose un rapport qualité/prix rarement vu ailleurs. Le lunch 3 services est affiché 40€. Comptez 65€ pour le dîner 4 services et 85€ pour le 6 services. Comptez respectivement 31 et 41€ pour l’accord mets/vins. Un menu étoilé 6 services et vins compris pour 125€ par personne, on peut parler d'affaire. Mais comment expliquer, dans un secteur fragilisé par la crise sanitaire, l'inflation et l'indexation des salaires, que certains parviennent encore à proposer des menus aussi accessibles ? 

On a interrogé Maxence Bouralha, chef de Quai n°4 avec Charles-Maxime Legrand, pour savoir comment son restaurant était parvenu à briser la conjoncture. "Dès l'ouverture du restaurant, notre philosophie était de vouloir offrir une gastronomie accessible", nous explique-t-il. "On a mis tout en place pour y arriver. D'abord, nous sommes propriétaires, ce qui aide pas mal. Ensuite, nous sommes deux patrons en cuisine, ce qui limite le personnel. Finalement, jouer la carte de l'accessibilité fait que notre restaurant est rempli tout le temps". À la question "la gastronomie est-elle forcément élitiste, le chef Maxence Bouralha répond : "Pratiquer ces prix-là nous permet de recevoir une clientèle très diversifiée, des vieux comme des jeunes".

Comment maintenir l'excellence ? 

Exit l'idée trop souvent répandue qu'il faut vite se rendre dans un restaurant gastronomique prometteur avant qu'il n'obtienne l'étoile et ne fasse gonfler ses prix. "Cela dépend de la philosophie du restaurant", reconnaît Maxence Bouralha. "Quand nous avons eu l'étoile, rien n'a changé. Lorsque nous avons été contraints d'augmenter nos prix, c'était pour nous maintenir à flot avec l'inflation, l'indexation des salaires et l'augmentation du prix de l'énergie. Rien à voir avec l'étoile"

Le choix des produits est-il impacté ? "Nous essayons de toujours mettre un ou deux produits nobles dans le menu. Pour le reste, nous restons sur une moyenne de produits moins "nobles" mais que l'on va essayer de sublimer par l'assaisonnement ou la cuisson". Selon le chef, cela invite non seulement les clients à découvrir des produits rarement travaillés et qu'ils n'auraient donc pas goûtés de base, mais aussi à faire la démonstration de toute sa technicité et de son talent. C'est notamment le cas pour le poisson. Les deux chefs ayant précédemment travaillé au Sea Grill, ils bénéficient donc d'une formation particulièrement intéressante dans le domaine. "On travaille du maigre, du merlu, du lieu jaune... Ce sont des poissons que l’on travaille moins souvent en restauration, et qui sont pourtant très facile à sublimer avec un bel assaisonnement et un bon accompagnement. À l’achat, ce sont des produits qui coûtent moins cher que des Saint-Jacques, un turbot ou d’autres poissons plus nobles." 

Où faire des économies ? 

La localisation joue évidemment un rôle. Les coûts immobiliers beaucoup plus élevés dans les grandes villes, comme à Bruxelles, ont évidemment des répercussions sur le prix des menus. Mais si Quai N°4 peut se permettre un tel rapport qualité/prix, c'est aussi grâce à une bonne gestion derrière l'assiette nous confie-t-on. "C'est avoir un suivi fiscal de l'entreprise au jour le jour, surveiller le coût des marchandises, toujours payer ses fournisseurs en temps et en heure pour éviter les complications...". C'est aussi beaucoup de recherches. Comme pour le vin, par exemple. L'adresse athoise tente constamment de dénicher de très bonnes bouteilles avec le meilleur rapport qualité/prix possible. C'est finalement du travail manuel, notamment pour leurs alternatives sans-alcool. Les jus centrifugés, infusions et assemblages de cocktails sont tous homemade, imaginés sur place par leur sommelier. Outre une étoile glanée au Michelin, cette table élue découverte de l’année 2021 par les inspecteurs du Gault&Millau. On se tente une virée à Ath ?

Ne manquez plus aucune actualité lifestyle sur sosoir.lesoir.be et abonnez-vous dès maintenant à nos newsletters thématiques en cliquant ici.