Combien peut gagner un chef étoilé ?

Alors que Top Chef cartonne, le métier de chef fait aujourd’hui rêver les jeunes. Entre l’aura de luxe et la médiatisation, le chef est une star. Mais est-ce vraiment un bon filon pour devenir riche ? 

Ingrid van Langhendonck, photos D.R. |

C’est la chaîne C News qui en fait état sur son site : le chef est une célébrité au moins aussi glamour qu'un acteur ou un sportif. Certains sont partout : livres, émissions, blog, … Un investissement en temps et en énergie considérable en marge de leur activité. Mais est-ce que le jeu en vaut la chandelle ?

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Le salaire de base

On apprend donc via les infos récoltées sur le site Boursorama que, sur Paris, les chefs de brasserie ou de bistrots peuvent gagner jusqu’à 3.000 euros par mois, des montants qui grimpent si vous êtes un chef à la mode ou si vous décrochez une étoile. Dans les plus grands palaces étoilés, le salaire du chef qui génère des chiffres d’affaires conséquents peut grimper jusqu’à 20.000€ net par mois.

Yannick Alleno, un des chefs les plus étoilés de France, multiplie les projets

Et en Belgique ?

« Le système est très différent en Belgique », nous explique Carlo De Pascale, « Ces salaires sont ceux que de grands groupes de restauration peuvent offrir à de grands chefs. En Belgique, même les restaurants doublement et triplement étoilés sont de petites entreprises familiales et je pense qu’aucun de nos grands chefs belges ne peut se payer de telles sommes. »
Le personnel en cuisine ou le sommelier d’un restaurant étoilé peut espérer toucher un salaire autour des 2000 ou 2500€ net par mois, ce qui n’est pas royal quand on sait que les semaines en restauration tournent plutôt autour des 70 heures au lieu des 38 heures légales. Le seul moyen de faire grimper ses revenus ? Devenir un peu connu et monétiser sa présence sur des événements ou sur la couverture d’un livre.

Les activités annexes

En effet, pour les cuisiniers «stars», ce sont ces activités annexes qui rapportent le plus. Le numéro un dans ce domaine, Cyril Lignac, qui multiplie les apparitions en télé, toucherait ainsi près de 250.000 euros par an rien que pour cette activité. Du côté de Top Chef, Philippe Etchebest serait rémunéré 85.000 euros par saison, Hélène Darroze 60.000 euros, Michel Sarran 50.000 euros et Paul Pairet 35.000 euros, c’est ce qu’a révélé le magazine Public. Chez nous encore une fois, les émissions culinaires sont plus rares et ne rémunèrent pas autant . La plupart des chefs se produisent sur de nombreux événements et chez certains, c'est du beurre dans les épinards: Chef in the Sky, Culinaria, Tram Experience, événements privés pour les entreprises, certains chefs comme David Martin sont très actifs sur ce plan et ce dernier se comporte comme un vrai businessman qui a su monétiser son image et nouer des partenariats à l'année, avec Ixina par exemple. D'autres, comme Christophe Hardiquest sont plus frileux et quittent moins volontiers leurs cuisines. Ce qu'on peut comprendre quand on apprend que participer à un événement en Belgique ne rapporte parfois pas plus de 500€ la prestation.

Le bouquin, un bon plan ?

D’autres chefs se servent de leur nom pour devenir une marque. Certains multiplient donc les publications, et Boursorama nous confirme que cela rapporte : Cyril Lignac, encore lui, aurait ainsi gagné 5,6 millions d’euros en dix ans, grâce à la publication de ses 43 livres de cuisine. Le site révèle par ailleurs que des maisons d’édition sont parfois prêtes  à débourser jusqu'à 50.000 euros pour mettre un grand chef en couverture (avec, en plus, 10 à 15% de prix de vente de chaque livre).
Encore une fois en Belgique, nous ne sommes pas si bien lotis, nous explique Carlo De Pascale : « Ces chiffres sont valables pour des grands chefs : Cyril Lignac, Jamie Oliver, Ottolenghi… qui sont vendus partout dans le monde. En Belgique, nous consommons la gastronomie française mais nos livres ne se vendent pas à Paris… Nous ne touchons que nos droits d’auteur. Je pense que certains auteurs flamands sont plus rentables : Pascale Naessens ou Sergio Herman ont édité des livres qui se sont vendus comme des petits pains et leur champ d’action est plus large. » Dans un autre registre, certains chefs peuvent gagner jusqu'à 1500€ pour une recette ou un cahier de charges pour un plat préparé qui se revendique de leur main: des groupes comme Delhaize ont par exemple misé sur les chefs belges pour toute une série de plats signés Wout Bru, Lionel Rigolet...

Le dernier livre de Carlo de Pascale: Pour l'instant, nous en avons vendu 3000 et c'est un beau score en Belgique, mais en dessous de 10 000 exemplaires, cela ne rapporte pas beaucoup.

Devenir influenceur

Cette montée en puissance de la starification des chefs permet de développer d’autres partenariats, certains seront même rémunérés : vêtements, automobile, horlogerie… Les marques de luxe aiment l’image authentique et haut de gamme du chef étoilé. Les chefs qui l’ont compris sont actifs sur les réseaux sociaux : des nouveaux «influenceurs» qui peuvent dès lors conclure des partenariats rémunérés. Ils publient alors des posts et des vidéos rémunérées par les marques dont les tarifs à l’unité peuvent varier de 500 à 5.000 euros. Mais ces contrats ne se développent toutefois pas beaucoup chez nous où ils sont encore trop chronophages et trop peu rémunérateurs pour les chefs. La formule prend surtout à Londres, New York ou Paris mais on en observe de temps en temps chez nous, surtout en Flandre avec des chefs médiatiques comme Sergio Herman ou Peppe Giacomazza qui cartonne sur VTM.

Sergio Herman, Chef star en Flandre et aux Pays-Bas

Paradoxalement, ce n'est donc pas forcément en cuisine que les chefs gagnent le plus, mais seul leur talent aux fourneaux leur permettra de se démarquer et de développer ces autres activités et gagner davantage, un équilibre que l'on imagine difficile à trouver et à conserver.

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