Révolution végétale : Les restaurants deviendront-ils bientôt tous totalement végétariens ?

La révolution culinaire est en marche en Belgique. Alors que la semaine sans viande se clôture, l’offre de restaurants proposant des options végétariennes ne cesse de se multiplier. Face à l’ampleur du mouvement végétarien, nous nous sommes demandées si à l’avenir, les restaurants allaient tous devenir végétariens. Élément de réponse avec le chef Christophe Hardiquest du restaurant Menssa.

Par Anissa Hezzaz Photos : D.R. |

Depuis 2018, la Semaine sans viande a lieu chaque année au mois d’octobre. Le but de cette initiative ? Promouvoir un régime alimentaire flexitarien dans lequel la viande, le poisson et les produits laitiers sont remplacés par des ingrédients d’origine végétale. Si pendant longtemps le végétarien était la cible des critiques, aujourd’hui, les mentalités ont évolué, et désormais, choisir de ne plus manger de viande ou de poissons, n’est plus seulement considéré comme une lubie fantasque, c’est aussi et surtout vu comme un mode de vie à part entière et un choix presque politique. Après avoir longtemps joué les faire-valoirs, les légumes volent la vedette aux viandes et poissons et il suffit de jeter un œil aux menus de tous les restaurants pour comprendre que le végétarien a une place de choix dans le cœur des chefs.

En vidéo, quelques alternatives à la viande :

La viande en voie de disparition ?

Les plats végétariens s’invitent donc naturellement dans les menus des restaurants et ceux prônant une alimentation tournée vers le végétal se multiplient et se voient récompensés. Chose que l’on n'aurait même pas pu imaginer il y a de ça 30 ans. En 2022, nous vous parlions d'Amaranthe, le premier restaurant gastronomique entièrement vegan de Belgique, dont les chefs nous confiait à l’époque vouloir proposer "des plats élégants haut de gamme préparés avec le meilleur de ce que la nature a à offrir".

Le guide culinaire We’re Smart, vient quant à lui, tout juste de récompenser les meilleurs restaurants de légumes du monde et on y retrouve une quinzaine de tables belges, dont Vrijmoed à la 4ème position, ou encore Humus x Hortense à la 9ème position. À la 37ème place des 100 meilleurs restaurants du monde, c’est le restaurant Menssa qui se distingue. Rien d’étonnant d’ailleurs, car le chef Christophe Hardiquest, anciennement auréolé de deux étoiles, est devenu la référence belge en matière de gastronomie avec son ancien restaurant BonBon. Christophe Hardiquest, fait en effet partie de ces chefs qui n’ont pas attendu que le végétarisme soit à la mode pour mettre à l’honneur le végétal dans leur assiette. En 2020, il recevait déjà le prix du meilleur restaurant de légumes du royaume selon le classement des Smart World Awards. Mais alors que le chef a décidé de mettre un point final à son établissement BonBon il y a maintenant un peu plus d’un an, faisant alors trembler la planète food, c’est désormais pour son nouvel établissement Menssa, qu’il se voit attribuer cette récompense toute fraîche. Il y a reçu la distinction la plus haute du classement du guide We’re Smart en obtenant 5 radis. Pour Frank Fol, cofondateur du mouvement We're Smart, cette distinction était logique : "Le chef de l'ancien BonBon n'est manifestement pas une feuille blanche. Il adhère déjà pleinement à la philosophie qui consiste à mettre les fruits et légumes à l'honneur, et il le fait avec brio dans son nouveau restaurant."

Le légume, la nouvelle star

Car avec Menssa, il voulait surtout montrer une approche plus naturelle et plus humaine de la gastronomie. Au menu de son restaurant, qui se présente comme un comptoir avec 22 couverts, les produits de la terre, du jardin et de la forêt, sont autant valorisés que ceux de la mer. Lors de notre passage en été, on constate avec étonnement qu'un carpaccio composé uniquement de tomates de bœuf (du jardin bien sûr !), surpasse la version carnée à laquelle on aurait pu s’attendre à la lecture du menu. Et que dire du dessert dont la pièce maîtresse était le fenouil, laqué et cuit au barbecue comme on aurait cuit une viande, qu'on trempe avec délectation dans une béarnaise sucrée. Une façon de clôturer ce repas d’exception avec un plat certes osé, mais qui a le mérite de rappeler aux plus réfractaires que le légume peut être sexy, délicieux et hautement raffiné ! Parce que pour Christophe Hardiquest et son équipe, le respect du végétal prime avant, tout comme le fait de travailler chaque partie pour ne rien délaisser ou négliger. “Aujourd’hui, un bon chef ne doit pas fermer les yeux sur quoique ce soit, on a un vrai rôle à jouer. Pour vous dire, je pense même à récupérer les coquilles d'œuf”.


Face à la montée en puissance de tous ces établissements et de leur révolution culinaire, doit-on s’attendre à voir fleurir un tas de restaurants uniquement végétariens ? Cela, signifie-t-il que les restaurants qui servent de la viande ou du poisson seront bientôt définitivement morts ? Bien sûr que non, d’ailleurs en 2023, seuls environ 5 % des Belges sont végétariens et végétaliens, et la viande occupe encore une place importante dans la gastronomie belge. Mais pour le chef Hardiquest, il est clair que le végétal a de plus en plus de place dans la gastronomie. “Je suis le petit frère d’Alain Passard, - nb. le chef étoilé de l'Arpège, à Paris, précurseur de la cuisine végétale - il disait à l’époque : “j’en ai marre du sang, je ne veux plus travailler la viande”, et puis, tout le monde a suivi.” 

Un métier en pleine transformation

Il est évident que la gastronomie évolue en ce sens, mais les viandards existent et existeront toujours. Et même si la culture alimentaire des jeunes est de plus en plus tournée vers l’ alimentation végétale, au pays de la carbonade, on aime définitivement encore la viande. En ce sens, Christophe Hardiquest parle d’une régénérescence du métier : “Le métier va se transformer. Ceux qui seront là sur le marché vont rester, mais ils vont devoir s'adapter. La jeune génération qui arrive aime se faire plaisir avec du végétal, avec du soja, avec du fast food de rue, et tous ces concepts à la mode comme le Mix, et c'est génial, mais il ne faut être raciste envers aucun produit.” Parce que le vrai luxe aujourd’hui, ce n’est plus forcément de manger du caviar à la cuillère. “Pour moi, le luxe, c’est parfois simplement de manger une bonne salade avec des gens que j’aime”. Même s’il l’admet, “manger une délicieuse sardine bien fraîche, c’est ça aussi le luxe !”.

Infos :

Où ? Menssa, avenue de Tervuren 453, 1150 Woluwe-Saint-Pierre
Quand ? Ouvert du mardi au samedi soir, du jeudi au vendredi midi

https://menssa.be/

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