Guide Michelin 2023 : trois adresses primées qu'on avait déjà repérées pour vous

Dans l'édition 2023 du guide Michelin, vous avez peut-être reconnu quelques adresses déjà repérées par la rédaction de SoSoir. Tour d’horizon des pépites dont on vous parlait avant qu'elles ne deviennent étoilées. 

Par Camille Vernin, Photo : Pexels |

Ce lundi 13 mars 2023, le guide Michelin a remis ses étoiles à l'occasion d'une cérémonie organisée au Théâtre royal de Mons. La Belgique et le Luxembourg sont désormais riches de 44 nouvelles tables étoilées. Parmi les grands gagnants de cette année, nos spécialistes food au nez fin, Florence Hainaut et Carlo de Pascale avaient déjà repéré quelques adresses. Une à Lasne, une à Bruxelles et une à Arlon. 

La vidéo du jour : 

La Table

La Table n’a ouvert que depuis peu quand nous y allons; c’est rare que nous prenions le risque de nous cogner à des adresses et une organisation en rodage, mais j’avoue avoir eu une petite impatience à retrouver du produit bien saucé. Le lieu a de l’allure, bois, belles matières, sobriété, zero fautes de goût, on est dans le simple mais chaleureux, tables espacées, confort ; les codes locaux de la bourgeoisie en velours sont respectés, sans ostentation, et d’ailleurs la salle est complète de régionaux de l’étape, en ce compris quelques gastronomes oenophiles notoires qui, comme nous, suivent le chef depuis longtemps. Nous sommes accueillis par le maître d’hôtel, Guillaume Vegreville, à l’abord sautillant et qui bien vite, surtout quand il tombe la veste, laisse transparaître une solide expérience hôtelière de haut niveau. Florence frétille et applaudit, c’est menu!  De mon côté, de plus en plus fatigué par les menus qui lambinent, je m’enquiers, « ça envoie ? ». Guillaume me rassure, « le chef est en pleine forme, si vous voulez un rythme un peu soutenu, on vous suit ».

On y mange quoi ? 

Allez, c’est parti pour une menu 5 services (tarifé à 90 euros) et les mises en bouche mettent le niveau, fort et vite. Elles arrivent en mode « bento » d’allure presqu’un peu « Picard » (mais chiadé), et tout y est hyper travaillé et très bon. Et en plus, ça nous ouvre l’appétit sans bien entendu le caler. En vrac, du couteau et dashi, un macaron foie gras-pomme, du thon mariné, et j’en oublie. On sent le boulot artisanal et construit derrière ces petites bombes de saveurs. Et ça suit, poêlée de bons gros cèpes dodus et jaune d’œuf confit, Saint-Jacques, joue de boeuf, langoustine et potimarron et de la biche très bien entourée, notamment d’une échalote farcie, je ne sais plus à quoi mais c’était bon. Est-ce de la gastronomie ? Oui. Sont-ce de produits nobles et classiques ? Oui, assurément. Cela réinvente-t-il le genre? Non, mais c’est travaillé, précis, et la cuisine suit le rythme que nous avons choisi, démontrant ainsi que le chef tient à nous faire vivre l’expérience de son art et pas uniquement la maîtrise des plats.

On sent le chef Laborie en mode « épate » mais avec juste ce qu’il faut de retenue pour convaincre, car le fil conducteur de saveurs et de saison est évident dans ce menu, c’est cohérent, et c’est donc réjouissant. Dans les verres? La carte des vins est riche, le chef est amateur de belles bouteilles. Peu de bouteilles « nature » si chères à Florence, encore moins au verre, mais on nous a servi une belle cuvée champenoise à l’apéro, suivie d’accords bien équilibrés qui ne nous sont ni montés à la tête, ni ont vidé la Mastercard.

Verdict 

Bref, une belle maison est bien née, il reste au chef amateur de rugby et à son équipe à transformer l’essai sur la durée. C’est carrément une bonne nouvelle pour la région (où les très belles tables ne sont pas si nombreuses) et, du coup, on va, pour la première fois dans l’histoire de « C’est moi qui t’invite », laisser la conclusion au chef : « Moi qui suis un stressé du bulbe je n’ai jamais été aussi cool, je suis bien ». Nous, aussi, merci.

L'article complet ici

Où ? 33 rue du Try Bara, 1380 Lasne

Plus d'infos : latablebenjaminlaborie.be

Barge

Tandis que certains esprits chagrins nous racontent régulièrement le centre-ville sur l’air de “Tout-fout-le-camp-c’était-mieux-avant”, des enseignes modernes et audacieuses ouvrent dans le Pentagone. Comme Barge, contraction de Barbara et Grégoire, la cheffe de salle et le chef de cuisine (ndlr : Barbara a quitté Barge en décembre 2022), deux jeunes qui osent se lancer sur un coin du boulevard d’Ypres. Jeunes ? Oui, tout juste trente ans, soit dans ce métier, largement plus de dix ans d’expérience. Et de la bonne, notamment à l’Air du Temps de San Degeimbre.

Le lieu

Le soir où nous nous attablons, le lieu n’a que trois semaines de vie et déjà, tout est en place. On le dit tout de suite : on a affaire à des pros. Florence est conquise depuis le trottoir : baies vitrées, briques apparentes, look urbain chic. Pour ma part, même si je suis client du genre, j’ai toujours au fond de moi un doute quand tant de fées post-modernes se sont penchées sur le berceau d’un nouveau resto.

L'assiette 

La porte franchie, ça continue dans le petit lait pour ma commensale préférée : menu unique et carte de vins nature autoproclamée “carte des boissons fermentées à base de raisins”. Je suis client de cette tendance “urbanonaturiste”, mais je crains toujours le cliché, quand deux bonnes nouvelles arrivent : le menu, 55 € pour 5 services (28 € pour 3 le midi), c’est un prix canon, et ça se confirmera quand on l’aura mangé. La carte des vins ne tape ni dans les sulfites, ni dans les prix : un Beaujolais à 30 € accompagnera notre repas dans la joie. Ça change des wannabe qui ouvrent des restos en quête d’étoiles en alignant illico des prix de palace. Forcément, le menu ne va pas faire dans le homard bleu ni dans le foie gras. On est ici dans les codes de la gastronomie qui fait des étincelles autour du maquereau ou du chou-fleur, et ce n’est pas pour nous déplaire, même si nous sommes loin d’être des intégristes de cette néogastronomie du produit simple ; on aime aussi les langoustines et les viandes en sauce.

Maquereau donc pour commencer, qui enchante Florence, tandis que j’ai fait mon précieux “qui-n’aime-pas-le- maquereau-et-les-sardines” et le chef m’a préparé un tartare de veau aux anchois et salicornes d’une grande finesse. Ensuite, une tomate (cerise) crevettes pimpée par une huile de crevettes intense et délicieusement persistante. Puis, chou-fleur... qui est très “chou-fleur”, parfaitement rôti au beurre, coulis de persil et jambon ; gourmand et fin, même si ce gros morceau de légume peut déconcerter les tenants d’une gastronomie plus classique.

Le chef rassure les mangeurs plus traditionalistes avec un beau morceau de veau (de l’éleveur dingue de ses bêtes, Lothar Vilz), caviar d’aubergines et quelques patates fumées avec délicatesse, ébouriffantes de précision. Quelques touches de lacto-fermentation de-ci de-là nous rappellent que le chef a appris partie du métier chez San Degeimbre, mais Grégoire a déjà sa patte bien à lui. Un dessert de cuisinier pour finir, un bel assemblage de cerises, biscuit et émulsion à la reine-des-prés.

On y retourne ?

Certainement ! Voilà une équipe de pros qui nous fait profiter de son talent et de son expérience à prix plus que raisonnable. Et surtout, au-delà de la cuisine et des vins, déjà bien campés, on est ici dans un lieu déjà bien “habité”. Si j’insiste là-dessus, c’est parce que quelques expériences récentes de lieux où l’on mange parfaitement mais où manque la figure de l’hôte nous ont laissés sur notre faim. Grégoire est en cuisine et il est là, Barbara est en salle et elle est là, cela nous semble une donnée essentielle de la restauration d’aujourd’hui !

L'article complet ici

Où ? Boulevard d'Ypres 33, 1000 Bruxelles

bargerestaurant.be

La Grappe d'Or

À moins que vous ne soyez voisins, l’excursion à la Grappe d’Or risque de s’apparenter à un minitrip, avec nuit sur place. Ça tombe bien : Clément Petitjean et sa femme Monia Aouini gèrent aussi une série de chambres (entre 69 € et 190 €). Carlo y étant allé voici quelques mois, c’est sans lui que j’ai découvert l’adresse qui fait partie de ses "Best of Wallonie". Faut dire que le resto a sa petite réputation et draine des estomacs de tout le pays et au-delà. En 2008, le chef, qui devait avoir 25 ans à l’époque, décroche l’étoile, un an à peine après avoir repris les rênes de l’établissement. Il est, au fur et à mesure des années, devenu l’un des fers de lance de Génération W, un collectif de chefs wallons qui a à cœur de travailler des produits du terroir et d’en faire la promotion. Le pigeon vient de la ferme de Sohan à Pepinster, les plantes, fleurs et légumes de Sensenruth, les fromages belges sont sélectionnés par Pascal Fauville, et les yaourts viennent de la Bergerie d’Acremont.

Le lieu

On ne va pas vous mentir, l’étape est plutôt chic, même si le premier menu est à 43 €. On opte pour la formule “Composition” (84 € ou 122 € avec l’accord mets-vins). On n’est pas dans une cantine sans chichis. Ici, les nappes sont blanches, le service est sans accroc et le public pas très rock’n’roll. L’ancienne ferme gaumaise est superbement rénovée et le jardin, où on dépose avec délicatesse les clients pour l’apéro, un havre de paix.

L'assiette

Ce jour-là, dans la salle, où la canicule passait décidément mieux avec quelques ventilateurs, nous avons reçu un sandre aux herbes anisées (le chef adore mettre plein d’herbes bizarres dans ses plats et ça tombe bien, rien ne m’excite plus qu’un truc vert inconnu), un turbot poché, beurre blanc au maitrank, navet laqué à la tagette (une plante bizarre) et pickles. Le chevreau nous a tiré une larmichette. Dommage, Carlo n’est pas là pour profiter du chariot à fromages, parce que moi, je me force, mais je n’aime toujours pas ça. Légère détente à l’arrivée du dessert : des fraises (oui, locales), un crumble de lait, riz d’épeautre, sorbet fraise et oseille rouge.

À boire ?

C’est Monia qui s’occupe des vins. Une sélection plutôt classique, à part un Red is Dead, un pétillant naturel rosé, du domaine Le Sot de L’Ange en Loire, gentiment barré, qui m’a fait battre des menottes de bonheur. Pas bêtes, Clément et Mounia gèrent aussi la boutique Vin en vie, plus bas dans la rue, où je suis allée en acheter le lendemain. Et c’était comment, ce repas ? Le Chef, même s’il n’a pas 40 ans, est loin d’être un débutant. Clément Petitjean aime surprendre, notamment avec des touches d’acidité qui bousculent les papilles, dans le bon sens du terme, selon Carlo qui trouve que l’originalité du chef est dans l’assiette, dans les goûts tranchés.

Bref, même si nous n’y avons pas dîné ensemble, mon comparse à lunettes s’est plus éclaté que moi. Soyons de bon compte, tout était parfait dans mon dîner, je ne pourrais absolument rien reprocher au menu, c’est une question de goût : j’aime la cuisine qui fait pouet pouet et les chefs flamando-scandinaves aux tatouages improbables, les assiettes très simples, les tables sans nappe et les bouteilles qui pétillent sans faire exprès. Par contre il y avait à la Grappe d’Or un truc que je n’ai trouvé nulle part ailleurs : à côté du lavabo, dans le coin où on va se repoudrer le nez, un grand bocal de soucoupes volantes acidulées. Quel bonheur d’avoir six ans à nouveau !

L'article complet ici 

Où ? 317, Rte de Luxembourg, B-6700 Arlon

lagrappedor.com

Ne manquez plus aucune actualité lifestyle sur sosoir.lesoir.be et abonnez-vous dès maintenant à nos newsletters thématiques en cliquant ici.