Frondes, le resto éphémère qui bouscule les idées reçues sur la cuisine végétarienne

Là où naquit et mourut Chabrol, un restaurant que nous avons tant aimé à Schaerbeek, s’installe Frondes, un concept ultra-abouti, mais éphémère. Vous avez jusqu’à décembre 2024 pour le découvrir.

TEXTE ET PHOTOS : FLORENCE HAINAUT ET CARLO DE PASCALE. |

Aurélia D’Hollander et Davide Feniello se sont rencontrés dans une cuisine au Canada. Ensemble, ils aiment manger des légumes – toujours de saison ! –,  la cueillette sauvage et faire fermenter des trucs et des bazars. Avant de faire le grand saut en s’installant ici, ils ont travaillé tous les deux chez Ivresse, à Uccle, dont on vous a déjà parlé avec enthousiasme.

Du légume, de la saisonnalité et des fermentations, c’est le genre de pitch qui me plaît et qui transforme immédiatement Carlo en vieux râleur “Ouin, ouin, des betteraves”. Ce qui est fou, c'est qu’il aime bien les betteraves, je ne comprendrai jamais pourquoi il se sent obligé de surjouer le viandard. S’il y en a bien un de nous qui prend avec plaisir le plat végétarien du menu, c’est monsieur “Ouin ouin betteraves”. Bref, je le laisse s’exprimer, c’est important, tout en sirotant ma coupe de prosecco nature (7 €). Lui a opté pour un vermouth Berto rouge (7 €).

Je m’extasie sur la beauté des lieux, faits de volutes, de courbes, de vieux carrelages et de miroirs. Une merveille Art Nouveau, dont Carlo m’apprend qu’elle est totalement en toc : il s’agit de faux vieux réalisés par les propriétaires du temps où l’endroit abritait un resto italien. Ce qui n’entame pas ma bonne humeur. Ah, j’avais oublié de vous dire, ici pas de petits plats à partager (j’ai l’air de me moquer, mais c’est une formule que j’adore) mais un menu en quatre services (45 €) ou en cinq services (58 €). On prend le petit.

En vidéo, un nouvel étoilé en Belgique :

Dans l'assiette

En amuse-bouche, une polenta croustillante, crème de courgette fermentée et fleur de, je ne sais plus quoi. En fond sonore, un commentaire qui fuse : Ça envoie sa mère. Ah, monsieur betteraves retrouve sa joie de vivre. Et il a raison, cette petite bouchée vient donner le ton : les chefs savent ce qu’ils font.

En entrée, une assiette à base de chou rave, fraise, aguachile – sorte de bouillon froid – de concombre et livèche, huile de feuille de figuier, pickles de graines de moutarde et échalote. Je trouve que l’intitulé dit beaucoup de la démarche : chaque assiette de ce repas constituera une somme dingue de travail et de recherche. Pas une truffe, un caviar ou un truc un peu ostentatoire, que des ingrédients très simples et travaillés avec plus ou moins toutes les techniques (en pickles, en fermentation, cru, cuit, en huile, en bouillon…) pour un résultat très juste, très équilibré.

C’est un peu caricatural, commente Carlo devant le tableau végétal à la Arcimboldo que représente son assiette…, mais c’est bon. À propos d’art, je m’extasie devant la beauté des assiettes. C’est à ce genre de détail que je remarque que je vieillis. Rien ne m’émeut plus qu’une belle céramique. C’est le début de la fin, ça sent le sapin. Bref, celles-ci ont été faites à la main par une certaine Clara de la Céra qui les a signées une par une et mes aïeux que c’est joli.

On sirote un verre de Bande de cave 2022, 100 % Negrette de chez La Colombière (33 € la bouteille / 7 € le verre), un rouge juste comme on aime (“on” ça veut dire que moi, je l’aime super léger et que Carlo aime tout de même qu’il ait un peu de corps).

En deuxième entrée, une focaccia aux pommes de terre, crème de tournesol fermentée, asperges et huile d’ail des ours. Déjà, c’est d’une beauté irréelle. Si je n’avais pas si faim, je n’oserais pas la manger. Et il se fait que c’est aussi particulièrement réussi. En plat, j'ai pris les raviolis à la ricotta de bufflonne, petits pois frais, jus de cosses, fleurs de sureau, citron. Ce plat est fantastique. Sous son apparente simplicité, il vient vous donner des petits coups de pied dans les papilles. Carlo a pris l’autre option, courgettes braisées, bisque d’algues, amazake (une boisson de riz fermentée) et risotto de sarrasin. J’ai un peu l’impression de manger chez ma tante qui a été à Woodstock. Je lui fais les gros yeux, suivis des yeux au ciel. J’ai un peu mal aux rétines, mais le message est passé. Mais le jus est juste fou !, s’empresse-t-il d’ajouter. C’est vrai que cette bisque d’algues est incroyable, contrairement à son intitulé, elle ne goûte pas la marée. Comment font-ils ? Mystère.

En dessert, un donut au sirop de feuilles de capucine avec une glace yaourt et miel. Je ne sais pas comment Davide et Aurélia arrivent à rendre un beignet si léger, mais c’est du génie.

Verdict

Au final, un menu 100 % végétal, très fin, très travaillé, aux portions justes qui font qu’on ne sort pas avec envie d’aller chercher des frites (ça nous est arrivé). Emmenez-y votre Monsieur Betteraves, on en a tous un dans notre entourage, il pourra se défouler, mais devra admettre que la cuisine gastro végétarienne qui atteint ce niveau, c’est quand même affolant.

Informations pratiques

Frondes - Chez Chabrol
57/61 Avenue Louis Bertrand
1030 Schaerbeek

www.chabrol-restaurant.be

Ouvert du mardi au samedi, de 18h30h à 22h

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