Pourquoi les marques de mode détruisent-elles leurs invendus?

La Commission Européenne a voté le 22 mai dernier en faveur de l’interdiction de la destruction des vêtements invendus. Si le texte doit encore être négocié avec le Parlement dans les prochaines semaines, ce serait le début d’une véritable révolution dans le monde de la mode. On vous explique pourquoi.

Par Ingrid Van Langhendonck, Photos Unsplash |

Une situation surréaliste

La France avait ouvert le bal au début de l’année en interdisant aux marques françaises et qui fabriquent en France de détruire les invendus, mais qu’est-ce que cela implique réellement ? Il faut savoir que de nombreuses marques détruisent leurs invendus pour des raisons parfois assez ubuesques. Pour les marques de fast fashion, il s’agit tout simplement de se débarrasser d’un stock énorme de vêtements produit et vendu pas cher : la valeur de ces millions d’invendus est donc tellement basse qu’il est plus intéressant de les détruire que de les stocker. Une gifle pour l’économie, une aberration pour l’écologie…

D’autres marques ont même étendu cette pratique aux vêtements en retour des ventes sur Internet. En effet, on connaît tous des personnes qui achètent un vêtement dans plusieurs tailles et renvoient celui dans la taille qui ne correspond pas. Ces pièces retournées sont donc aussi détruites avant même d’avoir été portées une seule fois.

On achète trop de vêtements - Photo Unsplash

Pourquoi ? Parce que si ces pièces doivent être étiquetées, entreposées, éventuellement nettoyées, ré-emballées et remises en vente, cela demande une logistique énorme, et un coût qui n’est pas couvert par le prix du vêtement. Certains grands sites de vente en ligne préfèrent donc tout simplement les détruire également… Le plus fous, ce sont certaines grandes marques de luxe qui ont, elles, pris l’habitude de détruire leurs invendus car elles ne pratiquent pas de soldes, ne souhaitent pas qu’un vêtement griffé se retrouve dans des outlets, ou dans un marché parallèle, et finalement portés par une clientèle qui ne correspond pas à leurs critères, et qui ferait dévaluer la valeur de la marque… Un calcul assez cynique, mais qui se justifie au niveau de l’image...

La vidéo du jour : 

Pollution et gaspi

Quand on sait que chaque année on brûle dans le monde pour 400 milliards d’euros de vêtements, on prend la mesure de ce gaspillage inacceptable. Surtout que l’industrie de la mode est l'une des plus polluantes au monde, l’incinération de ces tonnes de vêtements ne vient pas forcément faire du bien au bilan carbone des vêtements bon marché que nous achetons sans y penser…

Pour les marques, il est question de produire mieux, de veiller à une meilleure gestion des stocks ou de mettre en place un système de dons à des associations pour gérer les stocks d’invendus. Mais le défi est de taille pour un secteur qui a grandi et pollué de manière exponentielle en quelques décennies sans se poser trop de questions. La Suède est d’ailleurs opposée à ce texte de loi, le pays d’H&M sait les dégâts que vont causer ce type de mesures européennes sur sa marque emblématique.

Et pour les consommateurs ?

Quant à nous, consommateurs, nous savons aussi que finalement nous ne portons qu’une petite partie des vêtements que nous entreposons dans nos armoires, ce genre de combat mené par la Commission Européenne est l’occasion de se poser une question collective sur l’usage que nous faisons de nos vêtements, sur la manière dont nous les achetons et sur la manière dont nous consommons… Alors que la plupart d’entre nous sont devenus plus attentifs au supermarché, quand ils font leurs courses, que nous sommes plus attentifs au Nutri-Score ou à la provenance de nos fruits et légumes, il est important d’en faire de même avec nos vêtements. Acheter moins mais acheter mieux donner une vraie durabilité aux vêtements… Une prise de conscience vitale.

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