La nouvelle adresse bruxelloise d'Isabelle Arpin

Carlo et moi adorons Isabelle Arpin. On l’a connue arrosant de ses étoiles les restaurants dans lesquels elle faisait étape, mais elle rechignait à se poser vraiment. C’est désormais chose faite et on en est tout ému. À Bruxelles, on a découvert son resto, tout beau, tout nouveau.

PAR FLORENCE HAINAUT ET CARLO DE PASCAL. PHOTOS D.R. |

La cheffe

On pourrait dire d’Isabelle Arpin qu’elle est comme le Phénix, qui renaît sans cesse de ses cendres. Sauf qu’elle ne meurt jamais. Originaire de Dunkerke, un diplôme d’économie et un de cuisine en poche, elle tombe follement amoureuse d’Ostende où elle travaillera pendant vingt ans. Elle quitte la côte belge et débarque chez Alexandre, à Bruxelles, où elle récupère l’étoile que le restaurant avait perdue.

Sa personnalité (une des plus sympas du paysage gastronomique belge), sa cuisine précise qui se moque des modes, son air d’être toujours à deux doigts de faire une blague et sa simplicité en font une star. Puis elle s’en va et s’installe dans la cuisine de feu le WY de Bart de Potter, un endroit un peu bizarre au milieu d’un showroom de voitures. Elle maintient l’étoile, puis s’en va à nouveau. On la retrouve quelques mois plus tard au Louise 345, sorte de gentlemen’s club pas ultra-chaleureux. Les choses ne se passent pas comme espérées. "Alors j’ai fait comme dit Macron", rigole-t-elle, "j’ai traversé la rue et j’ai trouvé du boulot."

Le lieu

Nous sommes au 362 avenue Louise. Le restaurant a ouvert avec quelques semaines d’avance. Très inattendu de la part de cette cheffe qui est à la fois fan de montres et systématiquement en retard. Le lieu lui ressemble : c’est chic, épuré mais pas amidonné. Nappes blanches, murs blancs, fresque graphique orange. La cuisine est semi- ouverte, on la voit fignoler ses plats.

Dans le fond on repère Sina, qui était plongeur dans le restaurant Alexandre et qu’elle a pris sous son aile de caneton et formé à l’excellence. Ils sont inséparables.

La carte

Un apéro ? Va pour la bulle de Bioul. En amuse-bouche, un velouté de céleri-rave à la crème de réglisse, du velours, un kroepoek, crémeux d’herbes et chartreuse et un mille- feuille de pomme de terre et betterave au chèvre. C’est si joli qu’on hésite entre les manger et s’en faire une broche. Il faut dire qu’Isabelle est venue à la cuisine parce qu’elle trouvait ça “joli”.

Toute jeune, elle dévorait des magazines gastronomiques et s’extasiait devant les photos de plats composés comme des œuvres d’art. Sans jamais sacrifier le goût et l’équilibre sur l’autel de l’esthétique, elle sculpte et peint des assiettes sublimes, comme ce thon mariné aux pickles de chou rouge, sauce au saké, fondant comme du beurre. À propos de beurre, elle fait le sien légèrement fumé, et sur les petits pains maison, c’est addictif. On finira par en redemander deux fois.

On a peu l’habitude de boire le midi et ce Merlot bio italien, ”glouglou” à souhait, menaçait de nous faire chanter O sole mio avec une cravate sur la tête. Arrive la deuxième entrée. Un bazar, les amis, mais je ne sais même pas comment vous décrire ce qu’elle a provoqué en moi tellement c’était puissant. Le pitch ? Foie gras poêlé, huître portugaise, crème de topinambour. Sans doute l’un de meilleurs plats qu’il m’ait été donné de goûter. Je change tous mes plans de carrière, je veux passer ma vie couchée entre ce foie et ce fruit de mer, les orteils qui trempent dans cette sauce fabuleuse. C’est peut-être un détail pour vous, mais le plat était servi avec une cuillère, pour ne pas en perdre une goutte et éviter à Carlo cet habituel moment de honte: quand je me mets à lécher les assiettes dans les restos chics, parce que la sauce, c’est plus fort que moi.

La crème au praliné servie avec le veau maturé aux légumes de saison me file encore quelques frissons. Il y a dans cette viande une tendreté incroyable et dans ce plat, on sent presque de la tendresse. Ou alors c’est le Merlot. On termine avec un crémeux au chocolat et à la cardamome, nougat glacé et noix torréfiées. Je sanglote de bonheur dans l’aisselle de la cheffe, qui n’en demandait pas tant.

Isabelle Arpin a enfin son restaurant à elle. Il était temps. Et c’est une grande adresse. On est ici dans de la gastronomie, donc à réserver pour les occasions. Menus entre 55 et 105€, lunch à 32€.

362, Avenue Louise, 1050 Bruxelles. T. +32 (0) 492 971 927

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